Dans un contexte marqué par le retrait des États-Unis des programmes d’aides au développement et alors que les pays africains font face à un service de la dette en expansion, le nouveau président devra mobiliser de nouvelles ressources de financement.
Ce qu’il faut retenir
Sidi Ould Tah a été élu président de la Banque africaine de développement (BAD) ce jeudi 29 mai à Abidjan, lors des assemblées annuelles de l’institution panafricaine. Il succède au nigérian Akinwumi Adesina, dont la présidence a été troublée par des accusations de favoritisme. Le mauritanien a remporté l’élection dès le troisième tour de scrutin, avec plus de 76 % des voix, contre cinq tours nécessaires pour son prédécesseur.
Candidat de dernière minute, il a devancé le Zambien Samuel Maimbo et le Sénégalais Amadou Hott. À 60 ans, cet économiste discret devient le 9e président de la principale institution financière panafricaine, après avoir profondément transformé la BADEA (Banque arabe pour le développement économique en Afrique) qu’il dirigeait depuis 2015.
Pourquoi c’est important à suivre
La BAD est le principal banque de développement du continent africain. En 2024, la BAD a investi 11 milliards de dollars dans de nouvelles opérations, ce qui représente un record pour l’institution. Ce montant comprend 5,5 milliards de dollars consacrés au changement climatique. Le capital de l’institution, financé à partir des contributions des 81 pays membre – 54 africains, 27 non-régionaux – est passé de 93 milliards à 318 milliards de dollars (82 milliards à 280 milliards d’euros) ses dix dernières années.
Pour autant, le nouveau président devra composer dans un contexte international dégradé. De nombreux pays africains font désormais face au mur de la dette, leur remboursement étant jugé comme à haut risque. Cela nuit à leur capacité d’investissements. Pour ne rien arranger, les États-Unis se sont retirés des programmes d’aide au développement sur le continent. Washington envisage d’ailleurs d’arrêter son engagement de 550 millions dans le fonds africains de développement, le guichet concessionnel de la banque à destination des 38 pays les plus vulnérables du continent. Sidi Ould Tah devra préserver l’héritage des “High 5” – électrification, industrialisation, sécurité alimentaire, intégration régionale et amélioration des conditions de vie – tout en répondant à ces nouveaux défis.
Citation à retenir
« Je veux féliciter le docteur Sidi Ould Tah pour son élection réussie (…). Je suis entré dans cette course mû par l’amour pour notre continent et pour offrir une vision pour le futur de l’Afrique. Aujourd’hui les gouverneurs ont choisi le leader qui, selon eux, va donner la vision de l’Afrique que nous voulons à ce moment décisif », a déclaré le candidat zambien, Samuel Munzele Maimbo, dans un communiqué transmis à l’Agence France-Presse.
Le chiffre à retenir : 565 millions
L’ambitieux programme de développement, baptisé « High 5 », mis en place par Akinwumi Adesina a permis de changer la vie de 565 millions d’Africains, sont les données présentées par la BAD.
À surveiller
Afin de faire face à ces nouveaux défis, le président devra trouver de nouvelles ressources de financement. Le FAD, financé en grande partie par des contributions de pays non africains, compte ainsi mobiliser 25 milliards pour la période 2026-2028, soit 16 milliards de plus que le cycle précédent.
Sidi Ould Tah compte également faire appel au fonds privés et institutionnels : fonds de pension africains (qui gèrent près de 2 000 milliards de dollars), fonds souverains – en particulier ceux du Golfe –, compagnies d’assurance et membres de la diaspora. Mais convaincre ces investisseurs reste un défi. Le nouveau président sait que pour attirer ces capitaux, la BAD devra jouer pleinement son rôle de catalyseur et de garant, en apportant plus de sécurité dans un environnement africain souvent perçu comme incertain.

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