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La légende du tennis Roger Federer rejoint le club des milliardaires

Federer
Roger Federer a assisté au défilé Dior Homme printemps-été 2026, organisé dans le cadre de la Fashion Week de Paris, le 27 juin 2025. Source : Getty Images

Porté par des contrats publicitaires lucratifs et sa participation dans la marque de chaussures On, la star suisse a rejoint le cercle très fermé des athlètes milliardaires. Et un pari dans les technologies alimentaires pourrait bientôt gonfler encore davantage sa fortune.

 

En 2019, Roger Federer se tenait au centre du court de Bâle, sa ville natale, sous une pluie de confettis dorés, les larmes aux yeux. L’émotion était légitime après sa victoire en deux sets en finale du Swiss Indoors, ce tournoi où il avait débuté adolescent comme simple ramasseur de balles. Mais à 38 ans, cette célébration semblait aussi trahir une conscience plus intime : celle que ses plus grands moments sur le circuit commençaient à se raréfier.

Ce trophée allait d’ailleurs être le dernier de Federer. Miné par les blessures, il a vu ses trois dernières saisons sur le circuit ATP lourdement compromises avant de ranger définitivement sa raquette en septembre 2022. À 44 ans, s’il n’a pas ajouté de nouveaux titres à une collection déjà riche de 20 Grands Chelems et de deux médailles olympiques, il est néanmoins resté, jusqu’à la fin et au-delà de sa carrière, le joueur de tennis le mieux rémunéré. Selon Forbes, sa fortune nette atteint désormais 1,1 milliard de dollars, notamment grâce à sa participation minoritaire mais stratégique dans On, la marque suisse de chaussures et vêtements de sport cotée en bourse.


Fils d’un père issu d’une famille suisse influente et d’une mère sud-africaine, tous deux employés dans l’industrie pharmaceutique, Roger Federer a découvert le tennis dès l’âge de trois ans. Devenu numéro un mondial chez les juniors, il passe professionnel en 1998 et se révèle cinq ans plus tard en décrochant son premier titre du Grand Chelem à Wimbledon. En 24 ans de carrière sur le circuit ATP, il a passé 310 semaines au sommet du classement en simple masculin et remporté 103 tournois. Avec près de 131 millions de dollars de gains, il occupe le troisième rang historique derrière ses grands rivaux : Novak Djokovic (189 millions) et Rafael Nadal (135 millions).

Federer a connu encore plus de succès en dehors des courts, accumulant près d’un milliard de dollars (avant impôts et commissions d’agents) grâce à ses contrats publicitaires, ses apparitions et diverses activités commerciales, soit plus du double des revenus estimés de Djokovic ou Nadal, selon Forbes. Avec un portefeuille de sponsors inégalé, comprenant plusieurs marques qui l’ont accompagné pendant plus d’une décennie, il a été le joueur de tennis le mieux payé au monde pendant 16 années consécutives. En 2020, il a même dominé tous les sports, avec un revenu total avant impôts estimé à 106,3 millions de dollars.

Federer fait partie des sept athlètes à avoir dépassé le milliard de dollars de revenus avant impôts au cours de leur carrière sportive, aux côtés de LeBron James, Tiger Woods, Phil Mickelson, Cristiano Ronaldo, Lionel Messi et Floyd Mayweather.

Aujourd’hui milliardaire, Federer fait partie d’un cercle extrêmement restreint : il est seulement le septième athlète de haut niveau à rejoindre le club des « trois zéros ». Le premier à y parvenir fut un autre joueur de tennis, Ion Țiriac, champion de double masculin à Roland-Garros en 1970 et ancien joueur de hockey sur glace pour la Roumanie aux Jeux olympiques d’hiver de 1964. Investissant après la chute du communisme, Țiriac est devenu milliardaire en 2007 et possède aujourd’hui une fortune estimée à 2,3 milliards de dollars, principalement dans l’immobilier, l’automobile et les services financiers.

Il a été suivi en 2014 par Michael Jordan, membre du Basketball Hall of Fame, dont la fortune est aujourd’hui estimée à 3,8 milliards de dollars, puis par Magic Johnson, légende des Lakers (1,5 milliard de dollars), et Junior Bridgeman, ancien sixième homme des Bucks de Milwaukee, dont la fortune était de 1,4 milliard de dollars à sa mort en mars. Seuls LeBron James (1,2 milliard de dollars) et Tiger Woods (1,3 milliard de dollars) ont rejoint ce club prestigieux alors qu’ils étaient encore en activité.

Le succès commercial de Federer repose avant tout sur son pouvoir d’attraction. Grâce à un portefeuille de sponsors soigneusement constitué, incluant depuis longtemps Lindt, Mercedes-Benz, Rolex et Moët & Chandon, il est devenu l’incarnation du luxe, en parfaite harmonie avec son style élégant sur le court et sa réputation irréprochable.

« Son caractère et sa sympathie jouent un rôle essentiel », explique Lisa Delpy Neirotti, directrice du programme de gestion sportive à l’université George Washington. « On peut être un grand athlète, mais tout le monde ne vous apprécie pas forcément. Federer est accessible, charmant, très poli et sophistiqué. Ses marques reflètent parfaitement cette image. »

En 2018, Federer a su tirer parti de ce capital sympathie en quittant Nike — qui lui avait versé environ 150 millions de dollars sur deux décennies — pour signer un contrat de 300 millions de dollars sur dix ans avec la marque japonaise Uniqlo. Et comme Uniqlo ne fabrique pas de chaussures de tennis, laissant libre cette catégorie que Nike aurait verrouillée par exclusivité, Federer a pu saisir une opportunité encore plus lucrative avec la société On, basée à Zurich.

Federer a découvert l’entreprise lorsque sa femme a commencé à porter ses baskets, et il a rapidement pris contact avec les fondateurs d’On : David Allemann, Olivier Bernhard et Caspar Coppetti. En 2019, il a investi dans cette start-up en plein essor, alors principalement axée sur les chaussures de course.

Bien plus qu’un simple investisseur, Federer a participé au développement d’une chaussure de tennis et d’une ligne de vêtements lifestyle. Son pari a rapidement porté ses fruits : en seulement deux ans, On est entrée en Bourse à New York, Federer conservant une participation estimée à environ 3 %. La société affiche aujourd’hui une capitalisation de près de 15 milliards de dollars, et ses actions ont progressé de 86 % depuis l’introduction en Bourse, portant la valeur de la participation de Federer à plus de 375 millions de dollars. « Roger a été le catalyseur », confiait Marc Maurer, alors co-PDG d’On, à Forbes en 2023. « Nous voulions simplement ouvrir la porte, convaincus que le tennis était le sport de l’avenir. Nous avons eu beaucoup de chance que Roger se lance dans cette aventure avec nous. »

Federer a aussi récolté des rendements remarquables grâce à d’autres investissements. En 2013, il a cofondé la société de gestion Team8 avec son agent de longue date, Tony Godsick, puis, quatre ans plus tard, ils ont lancé la Laver Cup, un tournoi annuel par équipes opposant six joueurs européens à six joueurs du reste du monde. Désormais intégré au circuit ATP et capable d’attirer régulièrement les plus grandes stars, l’événement est resté rentable chaque année, à l’exception de 2023, marquée par d’importants travaux d’infrastructure. L’édition 2024, prévue en septembre à San Francisco, devrait générer plus de 20 millions de dollars grâce aux sponsors et à la billetterie/hospitalité.

Federer pourrait d’ailleurs engranger une nouvelle victoire hors des courts. En 2021, il a participé à une levée de fonds de série D de 235 millions de dollars pour NotCo, une start-up chilienne spécialisée dans les aliments à base de plantes. Ce tour de table, auquel ont également contribué Lewis Hamilton et Questlove, valorisait l’entreprise à 1,5 milliard de dollars. L’année suivante, NotCo a levé 70 millions supplémentaires en créant une unité B2B destinée à concéder sous licence ses outils d’intelligence artificielle à d’autres acteurs de l’agroalimentaire.

Federer peut se permettre de prendre son temps en matière d’investissements en capital. Il continue en effet de collaborer avec une quinzaine de partenaires historiques de sa carrière de joueur, parmi lesquels l’opérateur de jets privés NetJets, la marque de lunettes Oliver Peoples ou encore la banque UBS (qui a absorbé son ancien sponsor Credit Suisse en 2023).

Atout majeur auprès des annonceurs : sa popularité demeure intacte. Avec 43,5 millions d’abonnés sur Facebook, Instagram et X (ex-Twitter), il se classe juste derrière Rafael Nadal (51,6 millions), selon l’agence de marketing Two Circles. Son influence se traduit aussi par un taux d’engagement remarquable de 2,3 % sur les trois dernières années, soit près du double de celui de Novak Djokovic (1,2 %) et plus de quatre fois celui de Nadal (0,5 %). « Je pense que c’est durable », estime Lisa Delpy Neirotti, professeure à l’université George Washington, au sujet de la valeur de Federer comme ambassadeur de marque. « Federer devrait être capable de maintenir ce niveau. »

 

Avec la contribution de Brett Knight et Matt Craig.

Un article de Justin Birnbaum pour Forbes US – traduit par Lisa Deleforterie


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