Selon le rapport 2025 de l’Union nationale des propriétaires immobiliers (UNPI), les valeurs locatives cadastrales – base de calcul de la taxe foncière – ont grimpé de 23,5 % entre 2014 et 2024. Cette revalorisation, indexée en partie sur l’inflation, explique une bonne part de cette envolée. À cela s’ajoutent les hausses de taux décidées par les communes, intercommunalités et syndicats, qui portent la progression totale à 37,3 %. En ce qui concerne les 50 plus grandes villes de France, la moyenne dépasse même 44 %, selon les données de l’organisation.
« Cette augmentation, sur une décennie, c’est deux fois plus que l’inflation », déplore Sylvain Grataloup, président de l’UNPI, auprès du Parisien.
Selon l’Insee, l’inflation cumulée entre 2014 et 2024 s’établit à environ 19 %, ce qui confirme l’ampleur du décalage.
Des disparités territoriales
La taxe foncière est l’un des impôts les plus inégalitaires de la sphère fiscale française. En 2024, les écarts sont considérables : on relève notamment +106,9 % à Sallèles-d’Aude (Aude) contre seulement +5,3 % à Montreuil-sur-Auge (Calvados). Ces différences reflètent non seulement les choix fiscaux locaux, mais aussi les héritages de taux départementaux et les contributions obligatoires à des syndicats intercommunaux, selon le rapport.
Certaines communes ont cependant réussi à limiter la hausse, comme Caen, qui affiche +20,6 % en dix ans – un record parmi les grandes villes, dû à une baisse du taux communal non compensée par une hausse intercommunale. Le Havre (+23,4 %) et Amiens (+23,9 %) ont suivi la même logique de modération. À l’inverse, Paris (+87,9 %), Strasbourg (+56,5 %) et Limoges (+55,9 %) ont connu les flambées les plus fortes. Dans ces métropoles, les décisions locales ont amplifié la hausse nationale, souvent pour compenser des besoins budgétaires croissants [liés notamment à la transition écologique, la rénovation des bâtiments publics ou l’entretien du patrimoine urbain].
Un pilier budgétaire pour les communes
L’explosion de la taxe foncière est intimement liée à la disparition progressive de la taxe d’habitation, remplacée par une compensation de l’État figée depuis 2017. La taxe foncière est désormais le principal levier fiscal des maires pour financer les infrastructures communales et les services publics.
« C’est le seul levier fiscal que nous ayons », affirme Emmanuel Sallaberry, maire de Talence (Gironde) et coprésident de la commission des finances de l’Association des maires de France, déplorant toutefois que « depuis 2007, en supprimant la taxe professionnelle et la taxe d’habitation et en réduisant les subventions, l’État nous prive d’environ 70 milliards d’euros ».
À cette fiscalité déjà lourde s’ajoute, dans deux tiers des communes, une taxe spéciale d’équipement destinée à financer des projets d’infrastructures. En Île-de-France, elle soutient notamment le développement du supermétro Grand Paris Express. Dans le Sud-Ouest, elle participe au financement de la future ligne ferroviaire Bordeaux–Toulouse.
Face à l’impopularité croissante de cet impôt marqué par les inégalités, nombreux sont ceux qui s’insurgent pour une refonte en profondeur du système fiscal local, plaidant pour une « contribution de résidence » incluant locataires et propriétaires, et une meilleure lisibilité des dépenses publiques locales. À l’approche des élections municipales de 2026, la taxe foncière pourrait bien devenir un thème central du débat politique, tant elle est devenue un symbole de la fracture fiscale entre territoires et propriétaires.
À lire aussi : Portugal, Irlande, Croatie… ces bons élèves européens qui ont réussi à redresser leurs comptes publics

Abonnez-vous au magazine papier
et découvrez chaque trimestre :
- Des dossiers et analyses exclusifs sur des stratégies d'entreprises
- Des témoignages et interviews de stars de l'entrepreneuriat
- Nos classements de femmes et hommes d'affaires
- Notre sélection lifestyle
- Et de nombreux autres contenus inédits