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La facture électronique, une révolution à coproduire

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À partir du 1er juillet 2024, la facture électronique va peu à peu se généraliser en France jusqu’à ce que, le 1er janvier 2026, la totalité des quelque 2,5 milliards de factures que s’échangent chaque année les entreprises françaises soit émise sous cette forme. Pour une réforme d’une telle magnitude, c’est un calendrier pour le moins ambitieux, et qui sera d’autant plus difficile à tenir que le dispositif a été, comme souvent, conçu loin de la réalité du terrain.

 

La facture électronique présente de réels avantages pour les entreprises, et l’État ne manque pas d’en faire l’éloge, mais il n’en a pas moins élaboré cette réforme dans son propre – et légitime – intérêt de lutter contre la fraude et de sécuriser ses rentrées fiscales. Les difficultés à s’accorder sur des standards nationaux et européens, et la quantité d’informations désormais réclamées dans une facture, soulignent assez bien combien les besoins et les contraintes des entreprises ont été peu pris en compte.

 

Certes, les grandes entreprises ont l’habitude de s’adapter à toutes sortes d’exigences réglementaires, et elles disposent des ressources nécessaires pour mener à bien un tel projet. Mais on parle ici de toutes les entreprises, y compris les artisans et les commerçants, y compris les indépendants, y compris aussi les professionnels de la gestion comme les experts comptables, et on sous-estime certainement l’ampleur des défis à relever en si peu de temps. Tous devront s’outiller afin de pouvoir émettre, recevoir et traiter des factures électroniques, et, si possible, en tirer quelque avantage en termes de facilité de gestion. Qui, sinon, voudra changer le fonctionnement bien rôdé d’un processus purement administratif ? Si l’on n’offre pas la perspective d’une bascule indolore et créatrice de valeur, on aura du mal à tenir le calendrier, avec le risque que se développent des flux parallèles, à l’opposé même des objectifs visés.

 

Pour que la révolution de la facture électronique se réalise, l’État aura besoin d’acteurs privés capables  d’accompagner ces changements. D’une certaine façon, cette coproduction a déjà été prévue dans l’architecture du dispositif avec la création des PDP, les plateformes de dématérialisation partenaires. Pour éviter un engorgement administratif, l’État va en effet déléguer l’enregistrement, la transmission et le suivi des factures électroniques à un certain nombre de plateformes immatriculées. Celles-ci seront essentielles à la réussite de la réforme car ce sont elles qui vont lui apporter le sens pratique qui manque à sa conception.

 

Pour obtenir l’agrément public, les PDP devront satisfaire à des obligations de sécurité (certification ISO 27001, conformité SecNumCloud…), de service (plus que de simples portails de dépôt des factures, elles devront apporter diverses fonctionnalités de suivi et de traitement) et d’interopérabilité (pour se connecter entre elles, à des outils tiers et aux systèmes de l’État). Toutefois, ce cahier des charges constitue un minimum et le succès des PDP – donc celui de la réforme – se jouera sur quatre points. Premièrement, et par-dessus tout, la confiance qu’elles sauront inspirer aux entreprises pour les convaincre d’échanger par leur intermédiaire des informations sensibles. Deuxièmement, la simplicité avec laquelle elles s’intégreront aux outils existants pour éviter de lourds et inutiles bouleversements. Troisièmement, l’innovation dont elles sauront faire preuve pour continuer à enrichir leur panoplie de connecteurs et de services. Quatrièmement, enfin, leur capacité à faciliter la mise en œuvre de nouveaux cas d’usage.

 

Ce dernier point est capital car c’est cette capacité à transformer une obligation réglementaire peu enthousiasmante en investissement profitable qui fera toute la différence. Passer à la facture électronique devra permettre à toutes les entreprises, quelle que soit leur taille ou leur secteur d’activité, d’accélérer leurs processus de gestion, d’en réduire les coûts, de réduire les litiges et les retards de paiement, d’avoir une meilleure visibilité sur leur trésorerie, ou de tirer profit du caractère désormais officiel de leurs factures.

 

Il est important que la réforme de la facture électronique réussisse car les enjeux sont majeurs pour l’État comme pour les entreprises françaises. Dans un passé récent, la directive sur les services de paiement DSP2 et le RGPD a cependant rappelé qu’il y avait toujours deux façons de mettre en œuvre de nouvelles obligations réglementaires : la façon complexe, qui rebute les utilisateurs et finit par pénaliser l’entreprise, et la façon pratique, qui, en améliorant l’expérience, favorise l’adoption et donc la généralisation du dispositif au bénéfice de tous. Aux PDP d’apporter cette praticité et aux entreprises de choisir celles qui le leur proposeront.

 

Pierre Dutaret, CEO et co-fondateur de Libeo

 

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