logo_blanc
Rechercher

La décarbonation planifiée : un véritable propulseur d’une industrie disruptive

carbone

Dans un contexte géopolitique agité où la concurrence internationale est de plus en plus féroce, les industriels sont appelés à participer collaborativement, à l’installation pérenne d’un écosystème favorable à l’émergence d’un modèle productif écologiquement responsable, économiquement viable et socialement soutenable.

Compte tenu de l’influence considérable de la nouvelle donne climatique sur les marchés financiers, il apparaît crucial pour les entreprises industrielles en quête de performance opérationnelle, d’adopter une approche proactive en phase avec la matrice VUCA (Volatility, Uncertainty, Complexity and Ambiguity), aidant à anticiper les risques et à mieux préparer l’avenir.

Nous sommes véritablement à un moment de bascule qui exige une action commune et concertée sur le long terme. C’est à cela que s’attèle un certain nombre d’industriels à l’avant-garde des transformations. Plus spécifiquement, l’industrie lourde fait l’objet de plusieurs mécanismes, qui tendent vers l’évolution technologique des procédés aujourd’hui extrêmement consommateurs des énergies fossiles.

Selon l’Agence Internationale de l’Energie, les émissions de l’acier doivent observer une baisse de 50% pour atteindre la neutralité carbone d’ici 2050. En conformité avec cette ligne directrice, le leader sidérurgiste ArcelorMittal s’active sur tous les aspects pour mener cette bataille et opère un tournant stratégique, en se basant sur une approche multi-cible, qui s’articule autour du développement de l’acier à faible teneur en carbone et entièrement recyclé, l’alimentation progressive de l’outil de production par de l’énergie propre et l’investissement dans la R&D pour verdir les processus industriels, en vue de mettre sur le marché des produits innovants pouvant accompagner la transition énergétique. Quelques voies prometteuses sont expérimentées pour produire de l’acier vert, comme la réduction directe (DRI) ainsi que la capture et la séquestration du carbone (CCUS) concrétisée par le lancement du démonstrateur DMX à Dunkerque en collaboration avec TotalEnergies. Dans une démarche coopérative, l’ONG coréenne Solutions For Our Climate (SFO°C) mène un travail profond de recherche et de plaidoyer pour la transition climatique de l’industrie sidérurgique, appuyé par la plateforme SteelData qui fournit des statistiques et des données inhérentes à une action significative.

De même, l’administration Biden booste le plan « Inflation Réduction Act » par la ratification de la « Bipartisan Infrastructure Law », dotée d’une enveloppe budgétaire de 1200 milliards de dollars. Comme exemple de la traduction opérationnelle de ces deux chantiers gigantesques, un fond de 1,2 milliard de dollars a été mobilisé pour le financement de deux usines au Texas et en Louisiane, dédiées au captage du Carbone dans l’atmosphère (Direct Air Capture). Ces démonstrations grandeur nature émanent d’un vaste plan du Département de l’Energie (DOE), visant à faire émerger un modèle climatique de pointe générateur de forte croissance durable. Il est clair que ces réalisations planifiées et chiffrées, participeront à l’essor d’un secteur industriel prospère, et à la mise en route d’une économie nette zéro d’ici 2050 pour le bénéfice des populations.

En faisant appel à des ressources financières conséquentes, les projets de décarbonation complexes peuvent représenter des risques transversaux. C’est pourquoi, il est désormais incontournable pour les entreprises de se doter d’un comité Risk Management intrinsèquement lié à la stratégie globale, capable de prendre à bras le corps ce défi et d’apporter des mesures d’anticipation appropriées au moment opportun, à l’aide d’une cartographie des risques internes et externes. Comme illustration de ce mode de gouvernance, le Groupe Emirati Taqa, leader visionnaire de l’industrie énergétique, ancre les facteurs ESG dans sa nouvelle stratégie d’entreprise, aiguillée notamment par les Objectifs de Développement Durable (ODD) et l’initiative UN Global Impact. En outre, sa filiale Taqa Morocco planifie la réduction de 25% des émissions de gaz à effet de serre à l’horizon 2030, en projetant la production de 1 gigawatt (GW) d’énergie verte, indispensable à l’efficience des projets de dessalement d’eau de mer envisagés. A cela s’ajoute le développement des Centrales Cycle Combiné Gaz (CCCG), garantissant une flexibilité et un ajustement de la production électrique. D’une certaine manière, ces mesures d’atténuation ont vocation à s’inscrire dans un plan méthodique et pragmatique, nourri par des données réelles, suivant la Stratégie Nationale de Développement Durable (SNDD) et les référentiels internationaux avancés.

Conforté dans sa position de premier acteur de l’éolien en Afrique, le Groupe Nareva, filiale d’Al Mada, s’allie à Engie et met le paquet pour la maximisation du potentiel en énergies renouvelables, en multipliant les opérations à fort impact comme le projet hybride de dessalement d’eau de mer à Dakhla, soutenu techniquement par le chinois Envision et qui sera alimenté à 100% par l’énergie éolienne. Parallèlement, la région de Guelmim – Oued Noun agit en faveur d’une planification écologique territoriale, en accordant une place particulière à la croissance des énergies propres dans son nouveau Plan de Développement Régional (PDR), et en structurant la plateforme GON H2 Valley couvrant toute la chaîne de valeur de l’hydrogène vert. Dans ce cadre, le Cluster GreenH2 fédère les acteurs industriels œuvrant au développement de la filière hydrogène et contribue à la solidification de l’écosystème global.

Dans un récent rapport, la Banque mondiale alerte sur le manque d’investissement dans les projets d’hydrogène vert qui peinent à se concrétiser. D’ailleurs, l’institution financière estime le besoin annuel de financement à 200 milliards de dollars à l’échelle mondiale, dont 100 milliards de dollars qui doivent être destinés aux pays du sud représentant un potentiel majeur sur ce marché titanesque. Dans ce sens, certaines nations s’impliquent résolument et se distinguent, à l’image du Maroc qui ambitionne de devenir une véritable plaque tournante de l’hydrogène vert, grâce à une forte impulsion du Roi Mohammed VI, qui veille personnellement à l’élaboration d’une Offre visant à clarifier le cadre incitatif, à renforcer les capacités infrastructurelles et à simplifier le parcours des investisseurs.

Considérée comme une priorité stratégique, la sécurité énergétique est davantage renforcée par plusieurs pays européens, à l’exemple de l’Allemagne qui a scellé un accord avec le Canada, pour importer de l’hydrogène vert et établir progressivement une chaîne d’approvisionnement transatlantique. Dans la perspective de bâtir un écosystème européen robuste de la transition bas carbone, le couple franco-allemand donne le la à travers la construction de projets de grande envergure bénéficiant de financements climatiques innovants, à l’instar de l’alliance Air Liquide et Siemens Energy, qui mise sur la production d’électrolyseurs pour démocratiser l’accès à l’hydrogène décarboné et les technologies de rupture y afférents. Air Liquide exporte également son savoir-faire en construisant un partenariat avec Maghreb Steel, qui vise à produire de l’hydrogène vert et à favoriser in fine la fabrication d’acier à basse émission de CO2.

En harmonie avec son objectif zéro émission nette aligné sur la Science Based Target Initiative (SBTi), le Groupe Danone entreprend aussi des actions solides pour la mise en application de sa feuille de route décarbonation. Cet engagement est matérialisé par le lancement d’une Green Factory dans la ville de Méknès, considérée comme une vitrine de l’excellence environnementale, en raison de la diversification des solutions innovantes déployées, à l’instar des modes de construction durable retenus, l’intégration d’unité de méthanisation produisant du biogaz, l’installation d’une station biomasse fabriquant du biométhane et la mise en place d’une station d’épuration des eaux usées.

Dans la logique de son décollage économique, la région Fès-Meknès prépare également son écosystème à la constitution de nouvelles filières industrielles vertes, en capacité d’inventer des solutions locales décarbonantes, à l’image des Pompes à Chaleur captant des investissements à forte valeur ajoutée. Pour accompagner la dynamique de la décarbonation à grande échelle, les aménageurs et gestionnaires de parcs comme MedZ, intègrent de plus en plus les dimensions du développement durable dans la conception de nouvelles zones industrielles, dans le but de cibler de nouveaux segments et de répondre aux exigences réglementaires.

Tout l’enjeu est de mettre le levier de la décarbonation du tissu industriel au profit de l’apparition de nouveaux modèles d’affaires. Cette refonte nécessite la mobilisation de l’ingéniosité du secteur privé par le biais de partenariats multipartites utiles à la progression d’une industrie disruptive, et le renforcement du soutien financier particulièrement en direction des TPME qui se heurtent à de grandes complexités.

Vous avez aimé cet article ? Likez Forbes sur Facebook

Newsletter quotidienne Forbes

Recevez chaque matin l’essentiel de l’actualité business et entrepreneuriat.

Abonnez-vous au magazine papier

et découvrez chaque trimestre :

1 an, 4 numéros : 30 € TTC au lieu de 36 € TTC