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Comment l’administrateur peut-il servir le conseil d’administration plus efficacement ? Quel intérêt a-t-il à se former aux méthodes de coaching ?

Executive coach et administrateur indépendant, deux mondes qui semblent éloignés 

Être coach de dirigeants peut paraître antinomique avec la posture du board member, à deux titres :

  1. Le rôle de coach est tellement galvaudé, qu’il n’est, trop souvent, pas pris au sérieux. Aussi, lorsqu’une personne annonce qu’après une formation d’une dizaine de jours, elle devient coach… encore un(e), parmi tant d’autres. A l’opposé, l’administrateur indépendant semble expérimenté, avec un titre difficile à obtenir, et qui ne lui est reconnu que par ses pairs,
  2. Le coach est un acteur de la maïeutique (celui qui aide le coaché à trouver lui-même sa solution), quand l’administrateur est là pour veiller aux intérêts de l’entreprise.

 

Coachs de dirigeants : quand la redondance des critiques les rendent performatives

Les nombreuses critiques envers les coachs sont parfois très bien documentées, notamment par Julia de Funès, mais la majorité d’entre elles se cristallise sur leur surnombre et leur légitimité ?

 

Le parcours certifiant d’executive coach, notamment dédiés aux administrateurs indépendants, offre des outils facilitant les réponses aux questions qu’ils sont souvent amenés à se poser :

  1. Quelle est ma place et mon rôle au sein du conseil d’administration ?
  2. Est-ce que je vais trop loin dans mes questions au comité de direction ?
  3. Quelle est ma légitimité à intervenir quand je n’ai pas accès à autant d’informations que le dirigeant sur le marché, les clients, l’opérationnel ?
  4. Comment guider sans être opérationnel ?

 

Les méthodes de coaching, des outils nécessaires même quand on ne veut pas en faire son métier 

 

Intérêt n°1 : prendre conscience des rôles et postures de chacun dans les Boards

 

Le conseil d’administration est un groupe, au sein duquel se tissent des relations humaines.

 

L’apport du groupe

Lorsque l’on démarre une formation de coaching, on rejoint un nouveau groupe, ce qui nous amène à repenser notre propre posture vis-à-vis des autres (au-delà de tout lien hiérarchique) et à analyser nos propres réactions comme celle des autres : suis-je plutôt en recul, en leader, dans un rôle de facilitateur ? Et comment les autres réagissent-ils par rapport à ma posture ?

 

L’apport des entraînements et le fait d’être coaché

La certification de coach induit des jeux de rôle : il faut prendre alternativement la posture de coach et de coaché en formation, et s’entraîner avec le groupe. Un travail d’introspection, de réflexion autour de nos besoins profonds, de nos schémas comportementaux est donc nécessaire.

Ces coachings improvisés, même réalisés par des novices, permettent en effet le retour sur soi : « Le dirigeant d’une société, dont je suis administratrice, a exposé son souhait de remplacer son DRH par quelqu’un de plus senior, car il ne l’estimait plus assez compétent, étant donné la croissance de l’entreprise et ses nouvelles problématiques (M&A, transformation…). Pourquoi ai-je voulu donner en premier mon avis au dirigeant ? Je n’avais pas forcément toutes les informations pour formuler un avis pertinent, et pourtant, je l’ai fait. »

 

En tant qu’administrateur indépendant, cette mise à distance permet par exemple d’analyser la réaction possible d’un dirigeant prenant ombrage des questions posées par son conseil, les jugeant intrusives, considérant sûrement que sa légitimité est remise en cause. Elle permet également de comprendre pourquoi le CEO s’est tu face à une injonction apparemment contradictoire du conseil, comme : « Il faut un plan de réduction drastique des coûts, mais pas de licenciement ni d’arrêt de projet stratégique ! »

 

Intérêt n°2 : privilégier le questionnement à la posture de sachant

 

Une des principales critiques faites au coach est qu’il ne doit pas apporter de solutions au coaché. Quel est donc son apport, s’il ne fait que poser des questions ?

Le coach, par un jeu de questions adaptées, aide l’administrateur à prendre conscience de ses schémas de pensée, ses automatismes de résistance ou d’acquiescement trop spontanés, et ainsi à adapter ses réponses : la mobilisation d’un administrateur est d’autant plus forte lorsqu’il a lui-même trouver des solutions, tout en restant à l’écoute des autres expressions.

 

Poser des questions avant de donner son avis peut s’avérer difficile pour l’administrateur indépendant. Après tout, il a été recruté sur la base de son expérience et de son expertise ! Il doit donc tout savoir. Erreur ! Le Board n’a pas accès à autant d’informations que le Codir. On lui demande surtout de challenger, d’orienter, de structurer la prise de décision, mais pas de donner la solution. Il donne un avis parmi d’autres. Ce qui peut aussi être source de soulagement pour lui ! Tout ne repose pas sur ses épaules.

Le questionnement s’avère incontournable. Elle permet de détecter les signaux faibles, les contradictions, éventuellement annonciateurs de changements, de risques ou d’opportunités pour l’entreprise. Poursuivons l’exemple du changement de DAF : à la proposition du dirigeant, il vaut mieux commencer par l’interroger, après avoir reformulé sa réponse : « La Société est en train de faire de la croissance externe et va doubler son chiffre d’affaires. Cette dynamique va demander de nouvelles compétences au Directeur Commercial ». Au lieu d’acquiescer « oui, c’est évident, son rôle va changer, donc cherchons quelqu’un de plus cappé, qui connait l’export », il vaut mieux demander au dirigeant : « Penses-tu que les compétences de M. Commercial ne seront pas suffisantes » ? En as-tu parlé avec lui ? Penses-tu qu’une formation soit envisageable… ? » Cela permet de challenger le dirigeant tout en étant dans la construction. 

 

Intérêt n°3 : gérer l’absence de consensus

 

A la différence des conflits ouverts, il arrive fréquemment que l’on arrive à un consensus mou du conseil, ou que des divergences de points de vue se terminent en statu quo.

Dans un coaching d’équipe, le coach tente de comprendre les zones d’achoppement, les zones où les besoins relationnels ne sont pas satisfaits. Il essaie avant tout de s’appuyer sur les zones de convergences, les objectifs communs pour recréer une cohésion.

A l’instar du coach, l’administrateur indépendant doit se poser en garde de fou de ceux qui auraient des prises de position trop tranchées, comme : « Pas question d’ouvrir le capital », ou « L’intelligence artificielle, c’est dangereux, nous n’en ferons pas ! ». Chaque membre du Conseil doit au contraire écouter attentivement les interventions des autres administrateurs et celles du dirigeant. Prendre le soin de reformuler ce qui a été dit, avant de présenter un nouvel argument. Il doit également éviter de formuler des critiques, en montrant qu’il a compris les autres points de vue, mais qu’il a éventuellement un autre angle de compréhension.

 

Intérêt n°4 : gérer les tensions, les conflits de personnes, le mépris et l’humiliation affichés entre membres du Board, nuisibles à son efficience

L’expérience du coaching facilite la compréhension des humains qui composent un Board et les tensions liées à des conflits de personnalités : veiller à la bonne marche de l’entreprise ne peut se faire sans une attention empathique, ou au moins d’écoute, envers les individualités réunies autour de la table du CA.

 

Les fonctions de coachs et d’administrateurs sont évidemment différentes. Cependant les membres d’un conseil d’administration peuvent se nourrir des approches issues du coaching : ils doivent suffisamment attentifs et humbles pour remettre en question toute affirmation trop rapide et orienter le débat.

 

Stéphanie Le Beuze

Stéphanie est dirigeante d’entreprise, administratrice indépendance et coach certifiée

 

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