Comment la présidence de Trump a profité à ses enfants

Le père du président américain, Fred Trump, s’est enrichi en construisant 20 000 appartements à New York. Donald Trump, quant à lui, a rejoint l’entreprise en 1968. Dès le départ, il s’est montré ambitieux et sans pitié. En 1982, lorsque lui et son père sont apparus ensemble dans le classement inaugural Forbes 400, leur fortune combinée s’élevait à 200 millions de dollars (l’équivalent de 660 millions aujourd’hui). Il affirmait alors : « L’homme est le plus féroce de tous les animaux, et la vie n’est qu’une série de combats s’achevant soit par une victoire, soit par une défaite. » Quelques décennies plus tard, avec Trump à la Maison-Blanche, sa famille tire profit de ces instincts de prédateur d’une manière inédite.

Les Trump ne sont pas les premiers à tirer profit de la présidence. Le frère de Jimmy Carter, Billy, a fait la promotion de la bière Billy Beer et a accepté de l’argent des Libyens. Richard Nixon a fait mettre le téléphone de son frère Donald sur écoute en raison de soupçons concernant des transactions commerciales. Hunter Biden a reçu plus d’un million de dollars pour des œuvres d’art de qualité douteuse. Mais jamais une première famille n’a autant exploité la fonction présidentielle pour s’enrichir que celle de Donald Trump.

La cryptomonnaie constitue la principale source d’enrichissement, mais des revenus supplémentaires proviennent du conseil auprès d’entreprises américaines conservatrices ainsi que de partenariats avec des sociétés étrangères disposant de vastes liquidités, en particulier au Moyen-Orient. Les membres de la famille qui ne possédaient jusqu’alors pas de fortune significative — Eric, Don Jr., Barron et Melania — ont vu leur patrimoine grimper en flèche, atteignant d’abord des dizaines, puis des centaines de millions de dollars. Au total, la famille, incluant le gendre du président Jared Kushner, pèse désormais près de 10 milliards de dollars, soit presque le double de sa valeur nette depuis l’élection de l’an dernier.

Donald et Melania Trump

Valeur nette : 7,3 milliards de dollars ; plus de 20 millions de dollars en liquidités

En un an, la fortune de Donald Trump a bondi de 3 milliards de dollars, soit une hausse de 70 %, lui permettant de gagner 118 places au classement Forbes 400 et de se hisser cette année au 201ᵉ rang. Son immersion dans l’univers des cryptomonnaies représente à elle seule 2 milliards de dollars, répartis à parts quasi égales entre World Liberty Financial et une memecoin. Un tribunal d’appel new-yorkais lui a par ailleurs offert un répit financier de 500 millions de dollars en annulant sa condamnation pour fraude civile, tandis que 400 millions supplémentaires proviennent du boom de son activité internationale de licences.

Melania, de son côté, a engrangé des revenus par des moyens classiques pour une Première dame — livres, conférences, documentaire — mais aussi de façon résolument « trumpienne », en lançant sa propre memecoin, dont la capitalisation boursière actuelle tourne autour de 200 millions de dollars.

Jared Kushner et Ivanka Trump

Valeurs nettes : 1 milliard de dollars ; 100 millions de dollars

En janvier 2021, le mois même où son beau-père quittait pour la première fois la Maison-Blanche, Jared Kushner a fondé la société de capital-investissement Affinity Partners. Tirant parti des relations nouées durant son rôle de conseiller présidentiel, il a levé 4,6 milliards de dollars auprès d’investisseurs au Qatar, en Arabie saoudite et aux Émirats arabes unis, et a déjà placé plus de 2 milliards dans 22 entreprises. La société est aujourd’hui estimée à 215 millions de dollars. Grâce en partie à la puissance financière d’Affinity, mais aussi à sa participation de 20 % dans Kushner Companies — la société immobilière familiale — valorisée à 560 millions de dollars, Kushner a franchi le seuil du milliard. Leur résidence sur l’exclusive Indian Creek Island, à Miami — où leurs voisins comptent Jeff Bezos — a également vu sa valeur plus que tripler depuis son achat en 2020, atteignant aujourd’hui environ 105 millions de dollars.

Eric Trump

Valeur nette : 750 millions de dollars

Deuxième fils du président, Eric Trump (dont la fortune ne valait encore qu’environ 40 millions l’an dernier) est celui qui a le plus profité de la cryptomonnaie. La majorité de sa fortune provient d’American Bitcoin, une société de minage de crypto qu’il a cofondée en mars et introduite en bourse début septembre, faisant brièvement de lui un milliardaire. Si l’euphorie s’est quelque peu calmée, sa participation de 7,5 % vaut encore près de 500 millions de dollars. Il a également touché environ 10 % des ventes de jetons de World Liberty Financial. Avec son frère aîné, Don Jr., il s’est rendu au Moyen-Orient en mai, où ils ont signé notamment un contrat de licence pour utiliser le nom Trump sur un complexe de golf au Qatar. Depuis juillet 2024, les deux frères se partagent apparemment 20 % des bénéfices issus de certains accords de licence.

Donald Trump Jr.

Valeur nette : 500 millions de dollars

Don Jr. détient une participation plus modeste dans American Bitcoin et occupe un rôle de cofondateur de World Liberty. Avec Eric, il a créé en août une société d’acquisition à vocation spécifique (SPAC) destinée à rechercher des cibles de fusion dans la tech, la santé ou la logistique. Très actif dans l’« économie anti-woke », il s’est associé à la société de capital-risque 1789 Capital, se revendiquant « anti-ESG », et siège aux conseils d’administration de Public Square (place de marché en ligne anti-woke et anti-avortement), du distributeur d’armes en ligne GrabAGun, ainsi que de la maison mère de Truth Social. Sa fortune est passée de quelque 50 millions de dollars l’an dernier à 500 millions aujourd’hui.

Barron Trump

Valeur nette : 150 millions de dollars

Le plus jeune fils du président s’est plongé dans l’univers des cryptomonnaies bien avant son père, et a même contribué à convaincre la famille de cofonder World Liberty Financial. « Il a quatre portefeuilles ou quelque chose comme ça, et moi je lui disais : “C’est quoi un portefeuille ?” », plaisantait Trump lors du lancement de World Liberty en septembre dernier. Jusqu’ici, le jeune étudiant de 19 ans à l’université de New-York (NYU) a déjà empoché environ 80 millions de dollars grâce aux ventes de jetons, et détient encore près de 2,3 milliards de tokens bloqués — des actifs que Forbes dévalorise fortement car ils ne peuvent pas jetons être échangés. Si le cours actuel se maintient jusqu’à leur déblocage, Barron pourrait les revendre pour environ 525 millions de dollars.

Avec la contribution de Monica Hunter-Hart, Giacomo Tognini, Zach Everson et Thomas Gallagher.

Un article de Dan Alexander et Kyle Khan-Mullins pour Forbes US – traduit par Lisa Deleforterie