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Chimie européenne : Bruxelles sort l’artillerie lourde pour sauver un secteur stratégique

La chimie constitue le socle de toutes les industries — de l’automobile aux batteries — et sa défaillance menace la souveraineté industrielle européenne.
La chimie constitue le socle de toutes les industries — de l’automobile aux batteries — et sa défaillance menace la souveraineté industrielle européenne.

Présenté le mardi 8 juillet, le plan prévoit une série de mesures pour soutenir la production et protéger l’industrie face à la concurrence déloyale, entre autres.

 

Ce qu’il faut retenir

Face à l’érosion rapide de son industrie chimique — qui représente 1,2 million d’emplois dans l’Union européenne et a vu la fermeture de plus de 20 sites industriels en deux ans —, la Commission européenne dévoile un plan de soutien ambitieux. Baptisé Chemical Industry Package, ce plan prévoit :

  • la création, d’ici fin 2025, d’une Alliance européenne des produits chimiques critiques, visant à sécuriser les approvisionnements stratégiques en molécules essentielles (comme le méthanol, importé à 80 %) ;

  • des mesures commerciales renforcées pour contrer les pratiques déloyales, notamment via l’instrument de réciprocité et les enquêtes anti-subventions (18 enquêtes déjà lancées depuis janvier 2024) ;

  • un soutien accru à la décarbonation et à la modernisation industrielle, via des aides d’État et une simplification des procédures d’autorisation ;

  • un allègement ciblé de la charge réglementaire, concernant l’étiquetage, les dérogations pour certains cosmétiques et fertilisants, ou encore la réduction des délais administratifs.

Le plan prévoit également un recours accru à l’hydrogène bas carbone, au recyclage chimique et aux biotechnologies pour diversifier les approvisionnements et réduire la dépendance aux matières premières importées.

 

Pourquoi c’est important à suivre

La chimie constitue le socle de nombreuses chaînes de valeur industrielles — de l’automobile aux batteries, en passant par l’agroalimentaire ou la santé. Sa fragilisation, alimentée par des coûts énergétiques élevés, des infrastructures vieillissantes, et la concurrence exacerbée des États-Unis (via l’Inflation Reduction Act) et de la Chine, menace directement la souveraineté industrielle européenne.

Ce plan est donc perçu par les industriels comme une bouée de sauvetage stratégique. Il ambitionne à la fois de réindustrialiser l’Europe, de la rendre plus compétitive, et de sécuriser l’accès aux molécules clés.

Mais les critiques ne manquent pas : certaines ONG et eurodéputés tirent la sonnette d’alarme sur les risques de santé publique, dénonçant la création de dérogations réglementaires qui pourraient faciliter l’usage de substances dangereuses, en contradiction avec les ambitions du Pacte vert européen.

 

Citations principales

« L’industrie chimique, c’est l’industrie de l’industrie », a expliqué  Stéphane Séjourné, vice‑président exécutif de la Commission. 

« Depuis janvier 2024, nous avons déclenché plus de 18 enquêtes sur des importations de produits chimiques au titre des instruments de défense commerciale »,a souligné Stéphane Séjourné, illustrant la fermeté de Bruxelles face aux distorsions de concurrence.

 

Le chiffre à retenir

363 millions d’euros par an : c’est l’économie attendue grâce à la simplification réglementaire (étiquetage, cosmétiques, engrais) introduite par le plan.

 

À surveiller

Le parcours législatif de ce paquet sera décisif. Il doit encore être débattu par les États membres et le Parlement européen, notamment sur les volets concernant les aides d’État et la mise en œuvre de l’alliance des produits critiques.

Il faudra également suivre de près :

  • l’impact sur les coûts énergétiques des industriels, via les compensations ETS ;

  • la délivrance accélérée de permis pour moderniser les infrastructures ;

  • les réactions des ONG et des eurodéputés, préoccupés par les potentielles dérogations aux règles sanitaires ou environnementales ;

  • l’ouverture des marchés publics aux fournisseurs européens, selon un principe de « préférence continentale », qui sera un test clé de l’efficacité du plan.

 


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