Dans les milieux économiques, financiers et commerciaux, beaucoup scrutent encore les effets attendus de la stratégie tarifaire de l’administration Trump, censée provoquer un regain d’inflation. Cette semaine, les chiffres de l’indice des prix à la consommation ont été publiés : l’inflation annuelle atteint 2,7 %, un niveau conforme aux prévisions médianes des économistes sondés par l’agence Dow Jones.
Les droits de douane ont-ils déjà produit tous leurs effets ? Probablement pas. Une grande partie de leur impact reste à venir, même si certains signaux commencent à émerger. Mais avant d’y revenir, arrêtons-nous un instant sur les dernières données de l’Indice des prix à la consommation (IPC).
Décryptage de l’IPC et du choc tarifaire
La hausse globale de l’indice des prix à la consommation (IPC) sur un an s’est établie à 2,7 % en juin, contre 2,4 % en mai. À cela s’ajoute l’IPC de base (qui exclut les prix de l’alimentation et de l’énergie en raison de leur forte volatilité), une variation soudaine dans l’un ou l’autre de ces postes peut fausser la moyenne générale. En juin 2025, par exemple, le prix de l’essence avait chuté de 8,3 % sur un an, ce qui a un impact significatif.
Dans une note, Oxford Economics souligne que les hausses tarifaires commencent à se faire sentir. Une analyse qui paraît logique, même si elle ne fait pas encore l’unanimité.
Selon le Bureau of Labor Statistics, l’élément principal de la hausse des prix reste le logement. L’indice y a progressé de 0,2 % sur un mois (corrigé des variations saisonnières) et de 3,8 % sur un an (non corrigé). Un facteur plus décisif, pour l’instant, que les effets directs des droits de douane.
À première vue, les chiffres surprennent. Comment expliquer que la baisse marquée des prix de l’essence ait moins pesé que la hausse du logement ; un poste qui inclut à la fois les loyers et l’équivalent loyer des logements occupés par leurs propriétaires ? La réponse tient à la méthode de calcul de l’indice des prix à la consommation (IPC) utilisée par le gouvernement américain. Chaque mois, des agents à travers le pays relèvent les prix d’un panier fixe de biens et services, répartis selon une pondération précise.
Or, le logement représente à lui seul environ un tiers de la valeur totale de ce panier. Une variation, même modérée, dans cette catégorie pèse donc lourdement dans l’évolution globale de l’indice.
Mais là encore, la réalité est plus nuancée. Les données sur le logement (notamment les loyers) mettent du temps à refléter les changements du marché. Dans certaines villes, la multiplication des constructions d’appartements a fini par faire baisser les loyers, mais ces baisses tardent à apparaître dans les statistiques officielles. Autrement dit, l’inflation réelle pourrait être légèrement inférieure à ce qu’indique l’IPC.
Qu’en est-il de l’IPP et du choc tarifaire ?
Le mercredi 16 juin 2025, les derniers chiffres de l’indice des prix à la production (IPP) pour la demande finale ont été publiés. Résultat : tant l’indice global que l’indice de base sont restés inchangés entre mai et juin. Il s’agit d’un outil qui permet de suivre les variations de prix entre entreprises, ce qui aide à anticiper d’éventuelles hausses de prix pour le grand public.
Alors que les économistes anticipaient une hausse mensuelle de 0,2 % (en données corrigées des variations saisonnières), les prix sont finalement restés stables. Sur un an, l’IPP non ajusté s’affiche à +2,3 %, contre +2,7 % en mai. L’IPP de base, qui exclut les éléments les plus volatils comme l’alimentation et l’énergie, a quant à lui progressé de 2,5 % en glissement annuel, en recul par rapport aux 2,8 % du mois précédent.
Pour Oxford Economics, il s’agit de la deuxième baisse enregistrée en trois mois. Mais attention à ne pas y voir trop vite un signal lié aux droits de douane. Ernie Tedeschi, ancien économiste en chef au sein du Conseil des conseillers économiques de la Maison Blanche, aujourd’hui à la tête du Budget Lab de Yale, a tenu à rappeler sur les réseaux sociaux un point essentiel : « Contrairement à l’IPC, l’indice des prix à la production ne tient pas compte des importations », a-t-il écrit. En d’autres termes, les tarifs douaniers ne se répercutent sur l’IPP que de manière indirecte, par le biais des chaînes de production.
Selon Ernie Tedeschi, les dernières données sur l’indice des prix à la consommation montrent des signes plus nets de l’impact des droits de douane sur certains biens importés. Il cite notamment des hausses de prix sur des produits traditionnellement sensibles aux échanges internationaux : +0,4 % pour l’habillement en juin, après deux mois de stagnation, +1 % pour les meubles, et +1,1 % pour l’électronique audio et vidéo.
Il souligne également que l’écart entre les hausses de prix observées et les prévisions de la Réserve fédérale provient en grande partie de ces produits de base, les plus vulnérables aux tarifs douaniers.
L’effet des nouvelles barrières commerciales semble donc commencer à se faire sentir, mais il faudra sans doute encore du temps pour mesurer pleinement l’ampleur du choc tarifaire.
Une contribution de Erik Sherman pour Forbes US – traduit par Lisa Delefoterie
À lire également : L’UE face à l’ultimatum tarifaire américain : vers un compromis à 10 % ?

Abonnez-vous au magazine papier
et découvrez chaque trimestre :
- Des dossiers et analyses exclusifs sur des stratégies d'entreprises
- Des témoignages et interviews de stars de l'entrepreneuriat
- Nos classements de femmes et hommes d'affaires
- Notre sélection lifestyle
- Et de nombreux autres contenus inédits