Lors de la Journée de la fierté de la neurodiversité (Neurodiversity Pride Day), Havas n’a pas simplement rejoint le débat sur l’inclusion ; il en a redéfini les enjeux. Avec sa campagne mondiale « Beyond the Brief », lancée en direct lors du Festival international de la créativité 2025, l’agence ne se contente pas de mettre en lumière les talents neurodivergents à titre symbolique, mais les affirme comme un pilier incontournable de l’avenir de l’industrie créative.
Sous la direction de Donna Murphy, PDG mondiale de Havas Creative Network et Havas Health Network, la campagne s’appuie sur les bases posées par Neuroverse: Powered by Havas, qui vise à révolutionner la manière dont l’industrie repère et développe le potentiel créatif.
« Nous vivons un tournant majeur dans la transformation de l’industrie créative, porté par l’essor de l’IA et l’arrivée de nouveaux outils et idées », souligne Mme Murphy. « Pourtant, un fossé persiste. Chez Havas, nous sommes convaincus que ce déficit peut être comblé en valorisant pleinement le formidable potentiel des talents créatifs neurodivergents. »
Le message est clair : l’industrie créative ne se contente pas de bénéficier des esprits neurodivergents, elle dépend d’eux pour assurer son avenir.
Se démarquer plutôt que de se conformer
Le 16 juin, le panel principal de la campagne, intitulé « Neurodivergent Minds: They Don’t Need Advertising. Advertising Needs Them », s’est tenu au Grand Auditorium Louis Lumière. Animée par Michael Barbaro du journal The Daily, cette discussion réunissait Donna Murphy, Renee Connolly de Merck KGaA, ainsi que la chanteuse et compositrice britannique Lola Young, dont la sincérité et l’authenticité ont marqué les esprits.
Lola Young n’a pas tourné autour du pot en parlant de sa place dans le monde créatif : « Je ne suis pas là pour correspondre à l’idée que l’on se fait de la créativité. Mon art est connecté précisément grâce à la manière unique dont mon esprit fonctionne », a-t-elle affirmé. Diagnostiquée avec un TDAH, elle a insisté sur le fait que ce diagnostic n’est pas une faiblesse, mais une force. « Le TDAH n’est pas un frein, c’est un moteur. »
Cette vision a résonné tout au long de la présence de la campagne à Cannes. Quelques jours avant son lancement officiel, des écrans numériques anonymes ont surgi le long de la Croisette, posant des questions percutantes comme : « Et si l’avenir de la créativité ne ressemblait pas au passé ? » Chaque écran comportait un QR code dirigeant vers un microsite dédié, proposant un programme complet d’événements axés sur la neurodiversité : panels, ressources téléchargeables, rencontres organisées par Havas.
L’ensemble de cette démarche délivrait un message clair et fort : ce n’est pas un simple événement ponctuel, mais un véritable mouvement.
Quand les données rejoignent l’expérience vécue
Au-delà des témoignages, ce sont des chiffres concrets qui soulignent l’urgence du changement. Une étude de 2025, réalisée par Understood.org et l’Ad Council, révèle que 69 % des professionnels neurodivergents estiment que leur manière de penser est un véritable atout créatif, alors que seulement 19 % se sentent réellement soutenus sur leur lieu de travail. C’est précisément ce fossé entre potentiel et reconnaissance que la campagne Beyond the Brief entend combler.
La campagne rappelle aussi que les personnes neurodivergentes ne sont pas seulement des créateurs d’idées, mais représentent également un segment de consommateurs majeur. Lors d’une session au Havas Café, intitulée « The New Creative Alchemy: Neurodivergent Minds & AI as Industry Catalysts » (La nouvelle alchimie créative : les esprits neurodivergents et l’IA comme moteurs de l’industrie), les intervenants ont présenté une feuille de route pour aider marques et agences à mieux accompagner ces talents et à concevoir des produits et campagnes en phase avec leurs expériences.
« Avec Beyond the Brief, notre ambition est de faire entendre ces voix et de pousser l’industrie à repenser ses modèles », a insisté Donna Murphy. En lançant cette initiative lors du plus grand festival créatif au monde, elle a affirmé haut et fort qu’il ne s’agissait pas d’une simple démarche de responsabilité sociale, mais d’une refonte profonde de l’écosystème de la créativité.
Réécrire les règles, pas seulement les CV
Trop souvent, les candidats neurodivergents sont écartés, non pas par manque de talent, mais parce que les processus de recrutement ne sont pas conçus pour eux. Des descriptions de poste truffées de termes vagues, des entretiens qui valorisent le contact visuel et des codes sociaux neurotypiques, ou encore des portfolios créatifs peu clairs ou peu accessibles : autant d’obstacles qui freinent ces profils.
La campagne d’Havas vient bousculer ces pratiques. Son microsite propose un rapport détaillé téléchargeable, accompagné de recommandations concrètes sur des thématiques variées, allant de recrutements plus inclusifs à la création d’environnements de travail adaptés aux sensibilités spécifiques. L’objectif est clair : lever les barrières qui ont trop longtemps empêché les esprits divergents et brillants d’intégrer pleinement le monde professionnel.
« Cette campagne appelle tous les acteurs du secteur à participer à la construction d’un avenir créatif plus riche et puissant que jamais », souligne Donna Murphy. Un avenir qui exigera des actions volontaires et concrètes, loin des simples applaudissements de façade.
Les esprits neurodivergents sont innovants
Pendant longtemps, l’industrie publicitaire a célébré la pensée « hors des sentiers battus ». Mais comme l’ont clairement souligné Lola Young et d’autres intervenants, les créatifs neurodivergents ne pensent pas comme tout le monde : leur esprit fonctionne selon des rythmes, des connexions et des signaux différents. Une différence qui fait leur force.
Faire abstraction de cette réalité, c’est ignorer une tendance déjà bien ancrée dans l’innovation.
Les panels présentés au Festival international de la créativité n’étaient pas relégués dans des sessions secondaires ou des cases à cocher. Ils ont été au cœur de l’événement, appelant l’industrie à repenser non seulement qui elle recrute, mais aussi la définition même de la créativité à l’ère de l’intelligence artificielle, des crises mondiales et du changement des valeurs sociétales.
Construire un avenir qui reflète chaque esprit
Nous sommes à l’aube d’un monde où les esprits neurodivergents ne se contentent pas d’être tolérés, mais véritablement célébrés. Il ne suffit plus d’admirer leur talent, il faut repenser nos systèmes pour les intégrer pleinement dès le départ.
Murphy, Young, Connolly et l’équipe de Havas dessinent les contours de cet avenir : un futur où l’industrie ne voit plus les personnes neurodivergentes comme un défi à surmonter, mais comme un atout stratégique.
Une contribution de Jennifer Jay Palumbo pour Forbes US – traduit par Lisa Deleforterie
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