Une nouvelle législation visant à lutter contre le greenwashing au sein de l’Union européenne (UE) était en phase de négociation avant de se heurter à un mur.
La directive sur les allégations environnementales a été proposée en 2024 afin d’empêcher les entreprises de se présenter comme respectueuses de l’environnement sans en apporter la preuve. Elle était sur le point d’être finalisée lorsque les membres du Parti populaire européen (PPE) au Parlement européen ont menacé de bloquer son adoption. Par conséquent, la Commission européenne a retiré temporairement son soutien. Alors que les dirigeants de la Commission débattent de la suite à donner, l’avenir de la directive reste incertain.
En février 2024, l’UE a adopté la directive visant à donner aux consommateurs les moyens d’agir en faveur de la transition écologique, une législation qui vise spécifiquement les allégations environnementales et climatiques. Cette directive interdit les allégations environnementales génériques « qui ne correspondent pas à une performance environnementale excellente, reconnue, pertinente pour l’allégation ». La directive cite plusieurs exemples de formulations problématiques : « “respectueux de l’environnement”, “respectueux de la nature”, “vert”, “ami de la nature”, “écologique”, “bon pour l’environnement”, “bon pour le climat”, “favorable à l’environnement”, “à faible intensité de carbone”, “économe en énergie”, “biodégradable”, “biosourcé” ou d’autres affirmations similaires qui suggèrent ou donnent l’impression s’une performance environnementale excellente. »
Cette directive est conçue pour agir en complément de celle visant à donner aux consommateurs les moyens d’agir en faveur de la transition écologique « en traitant des aspects et des exigences spécifiques aux allégations environnementales explicites, qui sont des allégations environnementales formulées sous forme écrite ou orale, ainsi que les systèmes d’étiquetage environnemental et les labels environnementaux correspondants en ce qui concerne leur justification, leur communication et leur vérification ».
La directive vise les allégations environnementales explicites, écrites ou orales, et les labels environnementaux que les entreprises utilisent volontairement dans leur markéting. L’objectif est de rendre les allégations environnementales « claires et faciles à comprendre » pour le consommateur.
En juin 2024, le Conseil de l’UE a annoncé sa position en ce qui concerne la directive sur les allégations environnementales. La Commission, le Conseil et le Parlementait étaient entrés dans un « trilogue » pour négocier le texte final. La directive semblait sur le point d’être adoptée, mais elle s’est heurtée à une certaine défiance vis-à-vis des normes environnementales.
Les élections européennes à l’été 2024 ont entraîné un fort recul politique du Pacte vert pour l’Europe. Les membres du PPE ont fait campagne en affirmant que les réglementations environnementales étouffaient les entreprises de l’UE et freinaient l’économie européenne. Les élections ont fait basculer la composition du Parlement européen vers la droite, la gauche et les Verts perdant plusieurs sièges.
Des réformes ont rapidement suivi avec l’introduction du paquet de simplification omnibus, une série de projets de loi visant à réduire les exigences de la directive relative à la publication d’informations en matière de durabilité par les entreprises (CSRD) et de la directive sur le devoir de vigilance des entreprises en matière de durabilité (CS3D). Alors que les modifications de la CSRD et de la CS3D sont en cours de discussion au Parlement, la réaction hostile aux mesures écologiques s’est étendue à la directive sur les allégations environnementales, qui n’a pas encore été adoptée.
Mi-juin, les députés du PPE ont adressé une lettre à Jessika Roswall, commissaire européenne chargée de l’Environnement, de la Résilience en matière d’eau et d’une Économie circulaire compétitive, menaçant de retirer tout soutien à la directive. Le 20 juin, la Commission a annoncé son intention de retirer la proposition, une mesure procédurale qui mettrait fin aux négociations.
Le 23 juin, l’Italie a retiré son soutien au projet au sein de la Commission, éliminant ainsi la majorité des voix en faveur de cette directive et privant la Commission de la possibilité d’engager des négociations. Le même jour, la Commission a annulé la réunion avec le Parlement dans le cadre du trilogue.
La réaction des partis modérés ne s’est pas fait attendre. Ils ont menacé de retirer leur soutien à la présidente de la Commission, Ursula von der Leyen. Dans un système multipartite, où le leadership repose sur des coalitions plutôt que sur la majorité, la perte de soutien pourrait être dévastatrice. Cependant, le 24 juin, la Commission a fait marche arrière. Selon Marianne Gross et Karl Mathiesen de Politico, Ursula von der Leyen maintient sa position et fait pression pour l’adoption de la directive. Les dirigeants de la Commission se sont réunis le 25 juin pour discuter de la directive, mais aucune résolution n’a été annoncée.
La Commission pourrait se retrouver dans le même cas que lors des négociations difficiles sur la CS3D. En février 2024, la CS3D était sur le point d’être adoptée sans difficulté, puis la Commission a modifié ses termes après qu’un accord a été trouvé. Cette décision a contrarié le processus et les militants écologistes. La directive s’est donc retrouvée affaiblie et son champ d’application a été encore réduit avec le paquet omnibus. Il faut s’attendre à ce que la Commission propose une directive sur les allégations environnementales allégée, qui exclura très probablement certaines PME du champ d’application des exigences. Pour l’instant, les négociations sur la législation anti-greenwashing sont au point mort.
Une contribution de Jon McGowan pour Forbes US, traduite par Flora Lucas
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