Dans l’ambition de proposer une alternative européenne au modèle américain de la restauration rapide, c’est en Belgique que naît Quick en 1971. Reléguée au rang de survivant face aux titans mondiaux du burger, la marque entame en 2025 une renaissance ambitieuse à grand renfort d’ouvertures, d’innovations et de communication audacieuse sous l’égide de son patron Frédéric Levacher.
Fondé par les patrons du groupe de supermarché GB, Quick ouvre ses premiers restaurants en Belgique, avant de s’implanter rapidement en France en 1980. À la différence de ses concurrents américains, ce fast-food se veut plus familial et adapte ses recettes aux goûts européens. Moins sucré, moins salé, plus proche du palais francophone et loin des arômes américains. Le pari est payant et l’enseigne connaît un succès fulgurant.
À la fin des années 1980, elle devient un acteur incontournable de la restauration rapide en France et en Belgique. Mais les années 1990 voient l’intensification de la concurrence. McDonald’s, fort de ses moyens colossaux, étend son emprise au monde entier, et notamment en Europe. Tandis que Quick mise sur l’ancrage local avec des menus adaptés, des campagnes publicitaires audacieuses, et un positionnement parfois plus « fun » que l’image épurée de son rival américain.
La fin pour Quick ?
Mais derrière le succès local, les difficultés financières s’accumulent. Le groupe GB cède l’enseigne, qui passe entre plusieurs mains. En 2007, Quick est nationalisée et devient la propriété de CDC Capital Investissement (groupe Caisse des Dépôts). En 2015, une nouvelle page se tourne lorsque le groupe Bertrand, déjà franchisé McDonald’s et propriétaire de Burger King France, rachète Quick pour 600 millions d’euros. L’objectif est clair, le groupe veut reconquérir le marché français du fast-food avec la marque Burger King, revenue sur le territoire en 2012 après vingt ans d’absence.
La quasi-totalité des Quick français est donc transformée en Burger King. À partir de là, Quick devient essentiellement belge et la marque sort des radars tricolores. « Pour beaucoup de gens, Quick avait disparu parce qu’ils ne voyaient de pub et qu’ils n’avaient plus de restaurant à côté de chez eux », explique Frédéric Levacher. En 2019, seuls quelques établissements subsistaient en France, et la marque semblait condamnée.
Mais si le groupe Bertrand devait fermer tous les restaurants à l’horizon 2020, les réformes au sein de Quick France, qui recentrent le restaurant sur ses produits phares et qui développent leur communication, permet une dynamisation de la croissance de Quick.
« Lorsqu’on rachète l’enseigne, on est convaincus d’un point. Oui, la marque a disparu, mais elle est encore très connue. Il y avait déjà un lien fort avec la clientèle, qui ne demandait qu’à renaître », poursuit Frédéric Levacher.
Un renouveau empreint de pop culture
Quick renaît de ses cendres, et se sert de son histoire pour insuffler un vent de nostalgie pour faire revenir ses clients.
« On s’est appuyé sur l’histoire de Quick pour un côté “revival” et “vintage”. On assume complètement que ce n’est pas une nouvelle marque cool et branchée, mais une marque qui a son histoire », affirme le patron de Quick.
Des burgers noir et blanc « Stormtroopers » en hommage à Star Wars en 2023, des « French Burgers » bleu-blanc-rouge avec Tony Parker à l’occasion des Jeux Olympiques de 2024… Quick innove et mise sur ses menus spéciaux pour revenir dans le cœur des Français.
En 2024, la marque enregistre un chiffre d’affaires record de 515 millions d’euros en France, en hausse de plus de 25 % par rapport à 2023. Elle ouvre 30 nouveaux restaurants sur l’année et compte désormais près d’un million de membres à son programme de fidélité. Un rebond notable, mais à relativiser : Burger King a dépassé 1,7 milliard d’euros de chiffre d’affaires en France la même année avec plus de 500 établissements.
Le marché français du fast-food en chiffres
La restauration rapide représente un poids économique majeur en France, estimé à environ 19,3 milliards de dollars en 2023, soit près de 18 milliards d’euros (Market Research Future, Le Monde). Ce marché est porté par une croissance continue (+4 à +6 % par an), l’essor du click & collect, la livraison, et la popularité des marques internationales.
Une expansion assumée
Quick ne ralentit pas en 2025. Les objectifs sont clairs pour Frédéric Levacher, qui entend ouvrir une trentaine de points de vente supplémentaires d’ici à fin 2025 et atteindre 300 établissements en France à l’horizon 2028. La marque vise en priorité les zones périurbaines et les villes moyennes, où l’offre en fast-food est encore limitée.
« On revient sur des territoires où il y a encore de la place, où Quick a laissé des souvenirs », explique Levacher.
Quick est aujourd’hui présent dans 4 pays (France, Belgique, Luxembourg, Maroc) et vise un chiffre d’affaires global de 800 millions d’euros en 2025. Mais la concurrence reste rude : McDonald’s à lui seul réalise près de 6 milliards d’euros de chiffre d’affaires en France, avec plus de 1 500 restaurants. Le marché français du fast-food est l’un des plus saturés d’Europe, et l’accès aux emplacements reste un combat permanent pour les nouveaux entrants.
Le Giant, Soprano et… le facteur émotionnel
Quick surfe sur un registre créatif et populaire. En début d’année, la marque a lancé le « Lucky Luke Burger », servi dans un pain en forme d’étoile de shérif, en hommage au héros de la BD, à l’occasion du Festival international de la BD d’Angoulême. Le Giant, best-seller historique, revient en force dans des versions spicy et Saint Valentin, cumulant 3 millions d’unités vendues en un mois. De plus, des recettes revisitées comme les Suprêmes Boursin et La Vache qui rit tiennent leur place avec brio.
Quick met le paquet pour rebooster son image. Le rappeur Soprano devient égérie de la marque, évoquant ses souvenirs personnels chez Quick et promettant des surprises musicales. On note déjà la présence régulière d’autres célèbres visages : Éric et Ramzy, Tony Parker, et les chefs Norbert Tarayre et Alexia Duchêne.
« On a beaucoup innové avec ces collaborations, avec des goûts inédits et des formats inédits parce qu’on est dans un marché très concurrentiel. Nous n’avons pas encore les moyens marketing de nos concurrents, donc pour émerger, il fallait envoyer l’artillerie lourde », explique Frédéric Levacher.
Une stratégie efficace pour exister médiatiquement, mais qui repose fortement sur l’émotionnel et la nostalgie des années 90-2000.
Emplois, inclusion… et ancrage local
Dans cette optique de reconquête, Quick appuie sur son identité tricolore, dans sa stratégie marketing comme dans ses opérations de recrutement. Selon son patron, l’entreprise prévoit de recruter pas moins de 1500 personnes en 2025.
« C’est un business français avec des clients français et des employés français. On s’est dit que l’on avait un rôle citoyen sociétal à jouer autour de ce retour à l’emploi des populations éloignées », explique-t-il.
Quick renforce donc son engagement local et sociétal à travers son partenariat avec la Fondation FACE, présidée par Jean Castex, pour favoriser l’inclusion dans les territoires. Au-delà de l’Hexagone, Quick regarde à nouveau vers l’Europe. Des projets seraient en cours pour s’implanter dans de nouveaux pays comme l’Allemagne ou le Portugal, mais rien n’a été concrétisé à ce jour. Sur un marché européen estimé à 168 milliards de dollars en 2025, la marque veut capitaliser sur son identité franco-belge.
Après un long passage à vide, Quick revient dans le jeu. Avec ses recettes vintage, son humour marketing et ses références culturelles, la marque retrouve une voix… et des clients. Mais elle doit encore transformer l’essai, trouver sa place entre des géants comme McDonald’s et Burger King, et prouver qu’elle peut être plus qu’un souvenir remis au goût du jour.
« Ce succès du retour de Quick montre qu’il y a de la place face aux autres marques de fast-food, mais l’accueil des Français a été encore plus encourageant que prévu. On est sur la bonne voie. », conclut Frédéric Levacher.
Classement des principales chaînes de fast-food en France (2023–2025)
Rang Enseigne Restaurants en France 🇫🇷 CA estimé en France Remarques 1️⃣ McDonald’s 1 600+ (2025) ~6 Mds € (2023) Leader incontesté, +80 % de notoriété 2️⃣ Burger King ~520 ~577 M€ (2023) En forte croissance depuis 2013 3️⃣ KFC ~360 (estimation 2024) ~825 M€ (estimation) Position stable, peu de croissance récente 4️⃣ Domino’s Pizza ~480 ~310 M€ Présent dans plus de 90 % des grandes villes 5️⃣ O’Tacos ~270 ~310 M€ (non consolidé) Fort chez les jeunes, en région 6️⃣ Subway ~315 (estimation 2023) ~193 M€ Recul depuis un pic en 2017 7️⃣ Quick ~135 ~415 M€ (2023) En relance, objectif 300 d’ici 2028 8️⃣ Pizza Hut ~270 ~80 M€ (estimation) Poids faible mais marque reconnue
À lire aussi : Jean-Pierre Nadir : « L’époque a changé, on passe d’un modèle d’abondance à un modèle de raison, voire de frugalité »

Abonnez-vous au magazine papier
et découvrez chaque trimestre :
- Des dossiers et analyses exclusifs sur des stratégies d'entreprises
- Des témoignages et interviews de stars de l'entrepreneuriat
- Nos classements de femmes et hommes d'affaires
- Notre sélection lifestyle
- Et de nombreux autres contenus inédits