La semaine dernière, Walmart a dévoilé Sparky, un assistant d’achat alimenté par l’IA générative et intégré à l’application de l’entreprise. Bien plus qu’un simple chatbot, Sparky s’inscrit dans une stratégie ambitieuse du géant de la distribution : repenser en profondeur l’expérience d’achat grâce à des agents autonomes capables de transformer les habitudes de consommation.
De l’assistant d’achat à l’agent intelligent
Pour l’heure, Sparky est capable de résumer des avis clients, comparer des produits, proposer des idées d’achats pour des occasions comme un anniversaire ou une journée à la plage, et même répondre à des questions du quotidien, comme indiquer quelles équipes sportives jouent actuellement.
Mais ce n’est qu’un début. Dans les mois à venir, Sparky s’enrichira de nouvelles fonctionnalités : il pourra passer des commandes, programmer des tâches, analyser des images ou des vidéos, et proposer des guides pratiques personnalisés, associant des produits à des besoins concrets — réparer un robinet, préparer un repas, organiser un événement.
Car Sparky ne se limite pas à répondre aux questions. Il agit. Si vous envisagez un barbecue, il ne se contentera pas de vous montrer des grils : il consultera la météo, suggérera un menu, planifiera la livraison. Si vous renouvelez des produits ménagers, il se souviendra de vos préférences, vérifiera la disponibilité en stock et vous proposera les meilleures options d’expédition.
L’ambition de Walmart est claire : éliminer les frictions et faire de la recherche produit une véritable expérience de service fluide, proactive et personnalisée.
Ce que les données de Walmart révèlent sur l’évolution des préférences des consommateurs
Les consommateurs seraient peut-être plus enclins qu’on ne le pensait à adopter les achats assistés par intelligence artificielle. C’est l’un des enseignements clés du dernier rapport de Walmart, Retail Rewired 2025.
Selon cette étude, 27 % des clients déclarent faire confiance à l’IA pour les conseiller dans leurs achats, un chiffre qui dépasse la confiance accordée aux influenceurs des réseaux sociaux (24 %). Une inflexion significative : l’autorité d’achat glisse des individus vers les algorithmes.
Si l’IA séduit, c’est avant tout pour sa rapidité. Près de 7 consommateurs sur 10 (69 %) citent la vitesse comme principal facteur d’adoption. De la recommandation personnalisée aux assistants conversationnels comme Sparky, l’intelligence artificielle s’installe de manière fulgurante au cœur du commerce en ligne.
Mais la confiance a ses limites. Si 47 % des acheteurs se disent prêts à laisser l’IA commander automatiquement des produits de base, ils ne sont que 8 % à envisager de lui confier l’ensemble de leurs courses sans supervision. Près de la moitié (46 %) excluent même cette idée à long terme. Autre signal fort : plus d’un quart des clients souhaitent garder un contrôle total sur l’usage de leurs données.
Face à ces attentes, Walmart affine son approche. Sparky n’a pas vocation à remplacer la décision humaine, mais à soulager l’utilisateur des tâches répétitives tout en demandant confirmation lorsqu’un choix plus complexe ou engageant s’impose. Un équilibre entre autonomie technologique et jugement humain, que le géant américain veut positionner au cœur de l’expérience d’achat de demain.
Pourquoi maintenant ? Le commerce de détail entre dans une nouvelle ère
La course à l’IA dans le retail s’intensifie. Des acteurs comme Amazon, IKEA ou Lowe’s déploient, eux aussi, leurs assistants intelligents. Mais Walmart franchit un cap supplémentaire : au-delà de simples bots conversationnels, l’entreprise construit une véritable architecture d’agents autonomes, conçue pour transformer l’ensemble de la chaîne d’expérience client.
Avec Sparky, la promesse dépasse largement la simple commodité. Là où les anciens moteurs de recommandation se contentaient de corréler les produits aux clics passés, Sparky cherche à comprendre l’intention derrière la demande, dans tout son contexte. Dites « J’ai besoin d’aide pour préparer mes affaires de ski » : Sparky pourra analyser l’altitude de la destination, les conditions météo, les dates de départ, vos achats antérieurs, et même les restrictions de bagages de la compagnie aérienne. Le résultat ? Une suggestion complète et personnalisée : veste, gants, bottes, équipement – tout y est.
Un tel niveau d’assistance nécessite une IA multimodale, capable de comprendre texte, images, vidéos et sons. Imaginez : vous photographiez une charnière cassée sur votre meuble, et l’assistant identifie la pièce, vous propose un tutoriel vidéo et organise la livraison dans la journée. C’est exactement la direction prise par Sparky.
Pour atteindre ce niveau de sophistication, Walmart ne se repose pas uniquement sur les solutions d’OpenAI ou de Google Gemini. L’entreprise développe ses propres modèles d’IA, spécifiquement formés sur ses données internes. Selon Hari Vasudev, directeur technique, cette approche permet d’assurer une meilleure précision, une adaptation fine aux spécificités du commerce de détail, et un contrôle renforcé face aux risques d’hallucination.
L’IA agentique, futur chef d’orchestre du commerce du détail
Si l’automatisation s’est imposée dans les entrepôts et la logistique, l’utilisation d’agents d’IA pour interagir directement avec les consommateurs reste un terrain largement inexploré.
Sparky pourrait bien être la première preuve de concept accessible au grand public. Mais c’est surtout son architecture qui marque une vraie rupture : un réseau d’agents spécialisés, chacun dédié à une tâche précise, qui collaborent en continu tout au long du parcours client, pour répondre à la complexité du commerce de détail à grande échelle.
C’est un modèle que d’autres entreprises voudront étudier, voire copier.
Quelles sont les limites et les risques ?
Plus d’autonomie implique aussi plus de risques. Sparky pourrait-il recommander un produit incompatible avec une allergie ? Ou mal interpréter une photo et expédier une pièce de rechange erronée ?
Pour anticiper ces situations, Walmart mise sur des garde-fous solides : une validation humaine intégrée, la demande d’accord des utilisateurs pour les actions sensibles, et une transparence renforcée sur l’utilisation des données.
Le véritable défi reste cependant à venir. Ce sera la performance de Sparky dans la vie quotidienne des consommateurs — plus que son lancement médiatique — qui déterminera si la confiance s’installe, et si l’assistant devient un acteur incontournable de leurs achats.
L’engagement de Walmart dans l’intelligence artificielle s’inscrit dans une dynamique de transformation plus globale. Parmi ses initiatives récentes, le géant américain s’est associé à Wing pour déployer la livraison par drone dans la région de Dallas-Fort Worth, avec l’ambition de couvrir jusqu’à 75 % des clients locaux en moins de 30 minutes.
En interne, Walmart a également lancé Wally, un outil intuitif qui permet aux commerçants de gérer leurs listes de produits et d’organiser des promotions via un langage simple, sans nécessiter de compétences techniques.
Parallèlement, l’entreprise a procédé au licenciement de 1 500 techniciens et employés administratifs, un signe clair que l’automatisation est déjà en train de remodeler ses équipes.
Ces évolutions ne sont pas isolées : elles traduisent une volonté profonde de réinventer les opérations quotidiennes autour de systèmes pilotés par l’IA.
Dans ce contexte, Sparky représente le pari le plus ambitieux de Walmart sur les agents numériques autonomes. Si aujourd’hui la confiance accordée à l’IA rivalise déjà avec celle portée aux influenceurs, cet écart ne fera que se creuser dans les années à venir.
Sparky accompagne les consommateurs dans leurs achats, Wally assiste les commerçants, tandis que d’autres systèmes internes soutiennent les collaborateurs en magasin. C’est un déploiement d’intelligence artificielle à l’échelle de toute l’entreprise, de haut en bas.
La conséquence sous-jacente est majeure : les interfaces traditionnelles du commerce électronique sont en passe de disparaître. Fini les clics et les filtres, place à une expérience d’achat pensée comme un véritable dialogue entre l’utilisateur et l’IA.
Une contribution de Ron Schmelzer pour Forbes US – traduit par Lisa Deleforterie
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