Qui est Emmanuel Besnier, le discret patron de Lactalis qui conforte sa place dans le top 5 des milliardaires français ?

Le Mayennais de 54 ans possède un capital de 22,1 milliards d’euros. Son groupe emploie plus de 85 000 personnes et a généré un chiffre d’affaires de près de 30 milliards en 2023.

Le « milliardaire invisible » se hisse dans le top 5. Le très discret Emmanuel Besnier, PDG du groupe Lactalis est la cinquième plus grosse fortune de France selon notre classement annuel. Son capital est estimé à 22,1 milliards d’euros. Soit 1 milliard de moins qu’en 2024, mais 14,5 milliards de plus qu’en 2016. Le Mayennais se positionne juste derrière Bernard Arnault, Françoise Bettencourt-Meyers et les frères Wertheimer, tous issus de l’univers du luxe. À l’échelle mondiale, il occupe la 80e position dans le classement Forbes.

Son groupe emploie actuellement 85 500 personnes réparties dans 51 pays. Le groupe exploite 270 sites de production et a généré en 2023 un chiffre d’affaires supérieur à 29,5 milliards d’euros. La société Lactalis SA est détenue à 50,8 % par la holding BSA, qui possède également les autres entités opérationnelles. Cette holding est elle-même contrôlée par trois structures : Sofina SA (22,4 %), ainsi que les SCI Jema 1 (50,7 %) et Jema 2 (26,6 %), toutes deux appartenant à la fratrie Besnier.

PDG à 29 ans

Petit-fils d’André Besnier, le fondateur de la fromagerie Besnier et surtout fils de Michel Besnier, créateur du géant Lactalis, le jeune Emmanuel suit une scolarité sans encombre dans le privé à Laval. Il intègre ensuite une école de commerce à Paris et s’envole pour les États-Unis où il débute par un stage avant de s’y installer pour s’initier à la production dans l’entreprise familiale. S’ensuit un retour en Europe pour l’Espagne où il se familiarise avec les questions logistiques et commerciales avant de rejoindre sa terre natale.

Direction le siège de Lactalis à Laval. Il n’a que 29 ans lorsqu’il reprend les rênes du géant familial en 2000 après le décès brutal de son père, victime d’une crise cardiaque.

« Emmanuel n’a rien laissé paraître de son chagrin, raconte un haut dirigeant de l’époque auprès de Capital en 2016. Dès le lendemain, il était prêt à reprendre les rênes de l’entreprise. »

Alors qu’il doit, en compagnie de son frère aîné Jean-Michel et de sa sœur Marie, s’acquitter des droits de succession afin d’hériter de la totalité du capital du groupe, Lactalis obtient une faveur de la part du ministère de l’Économie et des finances : un étalement de l’impôt sur dix ans. Cela permet aux trois descendants de garder le contrôle absolu du groupe. En contrepartie, les trois héritiers s’engagent à ne pas vendre d’actions durant toute cette période.

Dur en affaires

Impossible de savoir si cette faveur avait été négociée au préalable par son père, mais l’homme de 54 ans est réputé redoutable en affaires. « Quand il a décidé de vous mettre à genoux, il vous le dit calmement, droit dans les yeux », décrivait un industriel dans Capital. Lors de tractations avec le distributeur Leclerc, le fromager avait décidé d’arrêter soudainement ses livraisons, mécontent des faibles augmentations tarifaires. En 2016, la tension était montée d’un cran avec des agriculteurs, très remontés contre le groupe en raison d’un prix d’achat du lait jugé trop bas.

Sous sa houlette, le groupe n’a cessé de croître, enchaînant les acquisitions. Le Français Célia (Chaussée aux moines, le Marin), le croate Dukat en passant par l’italien Parmalat ont fait les frais de cet appétit d’ogre. Pour autant, le route suivie par le PDG a également été semée d’embûches. En 2017, Lactalis fait face à une grave crise : 12 millions de boîtes de lait infantile contaminé par la salmonelle doivent être retirées du marché dans 83 pays. Quelque temps après, Envoyé Spécial révèle que des cours d’eaux sont pollués par des rejets d’usine Lactalis.

Fidèle à sa discrétion légendaire, Emmanuel Besnier a alors préféré faire le dos rond, attendant que la tempête passe. Une stratégie qui semble avoir porté ses fruits : à la fin de l’année 2022, Lactalis dépasse Danone et devient le premier groupe agroalimentaire français. En 2023, avec une croissance de 4,3 %, il conserve sa 10e place sur la scène mondiale.