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La nouvelle tendance du biohacking décryptée

« Biohacking », derrière ce mot anglais un peu étrange se cache une tendance de plus en plus présente aux USA notamment dans le milieu des entrepreneurs de la Silicon Valley. Composé de deux mots : bio, vie en grec ancien et hacking, piratage en anglais. Ce concept consiste à optimiser les capacités humaines à travers des routines appelés biohacks.

 

Certaines de ces routines sont simples et naturelles comme le jeûne ou la méditation, d’autres font appel à des compléments alimentaires, des substances dites « nootropiques » qui renforcent l’activité cérébrale, voire à la technologie ou la biotechnologie. Certains « biohackers », c’est ainsi que se nomment eux même les adeptes du biohacking, utilisent des objets connectés pour « tracker » leur physiologie dans le but de l’améliorer ou pratiquent des tests génétiques.

 

La santé est un champ vaste allant d’un état moribond à une santé maximale. En tant que médecin anesthésiste réanimateur, mon but était de permettre à mes patients de survivre à un état potentiellement mortel. Le rôle de la médecine conventionnelle est de soigner les maladies qu’elle peut guérir et de stabiliser les maladies chroniques telles l’hypertension artérielle, le diabète de type 2 ou la maladie d’Alzheimer. Le biohacking vise à permettre de passer d’un état de bonne santé à un état d’optimisation des capacités tant physiques que mentales. C’est précisément cela qui m’a conduit à développer le biohacking en France et à écrire le premier livre en français sur le sujet.

Le niveau d’exigence de performance de notre époque est à l’origine de ce regain d’intérêt pour un mode de vie plus sain, surtout après la crise du COVID, le confinement et le stress de toute une population. De plus, bien que l’espérance de vie n’a cessé d’augmenter pendant des siècles, depuis quelques années, le développement des maladies chroniques comme le diabète, l’hypertension artérielle, le cancer ou la maladie d’Alzheimer, change la donne. Déjà, en France, l’espérance de vie a reculé en 2015, une première d’après l’INSEE ! Depuis 1990, les maladies cardiovasculaires ont progressé 5 fois plus vite que la population, le cancer, 4 fois plus vite, le diabète 6 fois plus ! Ces maladies chroniques sont dues en partie à l’alimentation, au mode de vie, à l’environnement. Mais nous savons aujourd’hui qu’une grande partie de ces maladies peuvent être évitées.

Alors qui sont ces biohackers qui veulent reprendre le contrôle de leur vie en maîtrisant leur propre biologie ? Parmi les plus célèbres, Jack Dorsey, cofondateur  de Twitter, fervent supporter du jeûne intermittent qui ne mange qu’un repas par jour et jeûne totalement un jour par semaine. De nombreuses études montrent que le jeûne intermittent augmente l’énergie des cellules, favorise la clarté mentale et allonge la longévité. Par exemple, l’étude de Mark P Mattson en 2017 dans Ageing Research Review conclut que le jeûne est efficace pour la perte de poids et l’amélioration de multiples indicateurs de santé, y compris la résistance à l’insuline et la réduction des facteurs de risque de maladies cardiovasculaires grâce à des mécanismes cellulaires qui répare l’ADN. Le jeûne sans malnutrition est le meilleur moyen de ralentir le vieillissement chez toutes les espèces animales. 

Les biohackers cherchent aussi à optimiser leur sommeil en adoptant des routines simples : s’exposer à la lumière du jour le matin pour recaler leur horloge biologique, éviter le café après 14 heures et surtout éviter après 20 heures les écrans numériques des ordinateurs, smartphones, tablettes… qui sont des sources de lumière bleue. La lumière bleue bloque la synthèse de mélatonine, l’hormone qui induit le sommeil. Au besoin, les biohackers s’équipent de lunettes spéciales « anti lumière bleue”. Certains biohackers s’équipent de trackers sous forme de montres connectées, de bague ou de bandeau autour de la tête pour mieux contrôler leurs ondes cérébrales et la profondeur de leur sommeil.

 

Le biohacking est encore un concept très jeune et les perspectives de développement sont immenses !

Pour lutter contre le stress, la maladie du siècle, les biohackers sont souvent adeptes de la méditation dite de pleine conscience. Cette méditation est inspirée des méditations orientales mais en retirant le côté spirituel. Développée dans les années 80 par Jon Kabat-Zin, professeur au MIT (Massachusetts Institute of Technology), cette méthode est très prisée depuis les années 2010, même dans les entreprises comme Google. En 2007, un ingénieur de Google, Chade-Meng Tan, a créé une méthode développée in situ associant méditation, neurosciences, intelligence émotionnelle et leadership. Le but de Chade-Meng Tan est d’augmenter la productivité, la créativité et le bonheur au sein de l’entreprise. 

La méditation peut être libre, c’est-à-dire en se concentrant sur sa respiration naturelle ou en suivant un rythme particulier dont les effets peuvent être mesurés par des capteurs connectés aux smartphones. Ces capteurs mesurent la variabilité de la fréquence cardiaque, une des techniques phares des biohackers.

Toutes ces routines, appelées biohacks, ne sont pas que des effets de mode. Elles sont soutenues par des études réalisées par des chercheurs indépendants et surtout sans conflit d’intérêt. Même un biohack aussi simple et étrange que de mettre de l’huile et/ou du beurre dans son café pour ressentir plus d’énergie, a une base scientifique. Cela permet d’accélérer le métabolisme et de “forcer” le corps à puiser dans les graisses. Ce biohack a fait la célébrité et la fortune de Dave Asprey, un entrepreneur qui a développé ce café sous le nom Bulletproof coffee et qui est considéré comme le père du biohacking aux Etats-Unis. Dave Asprey a dépensé plusieurs dizaines de milliers de dollars en auto-expérimentation et espère ainsi vivre 180 ans !

Le biohacking cherche aussi à personnaliser les prises en charge de la santé en tenant compte de l’individualité de chacun. Par exemple, la nutrigénomique permet à partir d’analyses biologiques simples de déterminer la nutrition la plus adaptée d’un individu. Les analyses ADN, pas encore autorisées en France mais en pleine expansion aux USA, permettent de déterminer les prédispositions génétiques aux maladies et même à la résistance au stress. Aux USA, il est facile de commander un test permettant de déterminer ses propres caractéristiques génétiques à partir d’un simple échantillon de salive.

Le biohacking est encore un concept très jeune et les perspectives de développement sont immenses ! C’est un domaine en pleine expansion mêlant des routines du quotidien qui peuvent être optimisées par les biotechnologies, les nanotechnologies, la robotique…. Le marché est en pleine expansion. Initialement cantonné aux entrepreneurs de la Sillicon Valley, le biohacking se développe dans le monde entier et séduit non seulement les entrepreneurs mais également tous ceux qui cherchent à optimiser leur vie quotidienne et leur potentiel. En 2016, Elon Musk a créé la société Neuralink dont le but est d’augmenter les capacités du cerveau grâce à des capteurs implantés. Il n’est pas nécessaire de faire appel à la technologie pour améliorer le cerveau. Un film, Limitless sorti en 2011 avec Bradley Cooper, met en scène un homme qui voit ses capacités cérébrales décuplées par une substance fictive: le NZT. Même si le NZT n’existe pas, le détournement de médicaments tels le Piracétam utilisé dans la maladie d’Alzheimer ou le Modafinil utilisé pour la narcolepsie, permet d’augmenter les capacités de concentration et de mémoire. 

Mais qu’en est-il de l’éthique ? Le biohacking n’est pas le transhumanisme, doctrine qui voudrait vaincre la mort. L’idée du biohacking est plus de donner de la vie aux années plutôt que de donner des années à la vie. Augmenter la qualité de la vie plus que la quantité. La clé de voûte est de maîtriser sa biologie pour maîtriser sa vie.

Une anecdote personnelle à ce sujet. Ma mère a vécu plus longtemps que mon père, mais dans quel état ? Elle souffrait de pertes de mémoire constantes. Alors à quoi bon vivre plus longtemps si c’est pour mal vieillir et souffrir au quotidien ? Le biohacking permet justement d’allonger la durée de vie sans pour autant sacrifier son bien-être. Affaire à suivre… 

Aux Etats-Unis, les biohackers visent la performance à tout prix et la productivité. Les Français, attachés à leur art de vivre, trouveront dans le biohacking un moyen d’augmenter leur efficience, c’est-à-dire une productivité et une efficacité maximale mais respectueuse de la qualité de vie. 

 

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