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RGDP : Vers Moins De Protection De La Vie Privée En Ligne ? 

Crédit : DR

Le nouveau Règlement général européen sur la protection des données (RGDP), qui entrera en vigueur ce mois-ci, a été largement présenté comme inaugurant une nouvelle ère des droits numériques et de confidentialité pour les citoyens européens, plutôt mis à mal ces derniers mois. Cependant, au beau milieu des éloges et de l’excitation, le RGDP pourrait, par inadvertance, offrir une couverture légale à certaines pratiques controversées – comme la reconnaissance faciale – qui n’étaient jusque-là pas disponibles dans l’Union européenne en raison d’un vide et d’une insécurité juridiques ; élargir et ancrer certaines de ces pratiques que la loi cherche pourtant à éradiquer.

Le RGDP est une législation aussi importante que complexe qui influe sur la manière dont les entreprises axées sur la data font affaires avec les citoyens européens. Sur le papier, de nouvelles règles fourniront des protections et des droits substantiels aux utilisateurs ordinaires d’Internet (comme vous et moi), les plaçant sur un pied d’égalité avec les énormes multinationales et milliardaires qui transforment leur vie quotidienne en archives numériques, pour l’exploitation commerciale. Bien sûr, comme toute législation sur une question aussi litigieuse, de nombreux avantages juridiques vont permettre à la plupart des entreprises de trouver, avec un peu de créativité, comment s’accommoder à ces nouvelles règles, en impactant en minimum leurs activités, et leurs bénéfices. En effet, des entreprises qui possèdent déjà une grosse source de data prévoient d’être très peu touchées par cette nouvelle législation.

Pourtant, un aspect intrigant de l’impact que pourrait avoir le RGDP a été retrouvé dans l’annonce faite par Facebook, le mois dernier, sur les mesures qui vont être entreprises pour se conformer à cette nouvelle loi. Bien caché au milieu des banalités de la réorchestration des options de confidentialité, nous pouvons lire : « Nous avons proposé des produits faisant appel à la reconnaissance faciale à travers le monde depuis plus de six ans. Dans le cadre de cette mise à jour, nous donnons aux citoyens européens et au Canada le choix, ou non, d’activer la reconnaissance faciale ».

Facebook a plusieurs fois noté que ses outils de reconnaissance faciale n’étaient disponibles ni au Canada, ni en Europe, en raison des lois sur la protection de la vie privée en ligne dans ces régions, qui imposent des contrôles beaucoup plus stricts sur l’utilisation de l’information biométrique qu’aux États-Unis, par exemple. Ce paysage juridique n’était favorable à la modélisation biométrique de masse, ni sur le système du réseau social, ni même ailleurs.

Avec les nouvelles exigences du RGDP concernant le consentement de l’utilisateur, tous ces obstacles ont été soudainement nivelés. Loin de restreindre encore davantage la reconnaissance faciale, le RGDP fournit en réalité une couverture légale aux entreprises pour finalement étendre cette technologie, à l’endroit même où l’ancienne infrastructure légale rendait cela trop complexe.

Sous couvert de la vague de formulaires de consentement liés au RGDP auxquels les utilisateurs vont-être confrontés, Facebook a également réussi à tirer de ce déploiement une collecte et une utilisation de ces données plus grandes, en utilisant cette nouvelle loi pour pousser les utilisateurs à approuver et activer chaque aspect de sa machine d’exploration des données.

En regroupant tout ça, le RGDP était censé créer un « nouveau monde » qui protégerait davantage la vie privée en ligne et les données numériques tous les citoyens européens. Mais à la place, son déploiement fait non seulement reculer la protection dont bénéficiaient jusque-là des milliers de personnes, mais enracine aussi, fermement, sous couvert juridique, tous les éléments les plus envahissants de la surveillance numérique.

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