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« Si j’étais candidat, je proposerais… »  | Pierre-Antoine Dusoulier « Une baisse des charges patronales de 10 à 15% sur les emplois qualifiés »

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Comme c’est le cas tous les cinq ans, plusieurs candidats proposent une augmentation du SMIC. Mais le ruissellement à l’envers ne fonctionne pas. L’augmentation des plus bas salaires n’a jamais entraîné les autres à la hausse. En revanche, baisser les charges sociales sur le travail qualifié pourrait y parvenir.

 

Les gouvernements successifs ont allégé les charges sociales sur les bas salaires ces dernières années (pacte de responsabilité et de solidarité en 2014, nouveau dispositif relais à partir de 2019, par exemple). Le principal mérite de cette mesure est de faire baisser le nombre de demandeurs d’emplois les moins qualifiés. Cela explique en partie la chute observée du taux de chômage en France. Celui-ci s’établissait à 8,1 % au troisième trimestre 2021. Une telle baisse était inenvisageable il y a quelques années de cela. Nous pensions être condamnés à un taux de chômage proche ou supérieur à 10 % alors que celui-ci ne cessait de diminuer chez nos voisins européens.

Après les bas salaires, il faut maintenant se concentrer sur les emplois qualifiés. C’est un tabou dans le débat public français. Aucun candidat à l’élection présidentielle de 2022 ne prend position sur ce sujet, même pas les candidats qu’on classe parmi les libéraux. Pourtant, c’est une nécessité. Les charges patronales doivent baisser en priorité, de l’ordre de 10 % à 15 % au moins. Ce sont elles qui pénalisent le plus la dynamique économique. Elles sont deux fois supérieures à celles s’appliquant en Allemagne pour un salaire de 4.000 euros brut par mois. Et le différentiel s’accentue plus on monte dans la grille des salaires. Il est trois fois supérieur pour un salaire de 8.000 euros par mois, par exemple. C’est intenable.

 

Un double avantage

L’allègement des charges pour les plus qualifiés ne va pas faire baisser leur taux de chômage. Il est déjà beaucoup plus faible que celui des non-qualifiés. En revanche, cela aura deux effets bénéfiques principaux pour l’économie française. Premièrement, cela va permettre de retenir et, potentiellement, de faire revenir nos talents grâce à la hausse des salaires nets qui en résultera. La France manque d’emplois qualifiés, c’est un fait. Selon le manifeste des startups françaises publié par France Digitale, 64% des startups ont des difficultés à recruter des talents, ce qui nuit à leur développement. Et la situation va s’empirer. Il pourrait manquer jusqu’à 1,5 million d’emplois qualifiés d’ici à 2030 selon une étude du cabinet de conseil américain Korn Kerry. Cela s’explique à la fois par l’inadéquation de notre système éducatif avec la réalité du marché du travail et par le poids des charges pesant sur le travail qualifié. Ne nous voilons pas la face, beaucoup de Français partent et restent à l’étranger parce que les conditions de travail sont plus attractives. Cela inclut les conditions salariales. L’écart de salaire net entre Paris et les autres grandes capitales occidentales peut atteindre jusqu’à 25 % pour nos jeunes diplômés de grandes écoles. Pour les ingénieurs, les programmateurs et développeurs dont nous avons tant besoin pour établir les bases de l’économie de demain, l’écart est encore plus important. Les salaires peuvent varier du simple au triple sur certains postes hautement qualifiés entre la France et les Etats-Unis.

Deuxièmement, cela va permettre de positionner notre économie davantage sur le haut de gamme, d’accélérer la transformation numérique en capitalisant sur notre dynamique écosystème startup, et de réindustrialiser. La France a un problème de compétitivité évident qui s’est accentué avec la crise de la pandémie. En témoigne la dégradation de notre balance commerciale. Le déficit de la balance des biens atteint un niveau record, à -4,6 % du PIB. Du jamais vu depuis 1982 ! Nous avons fait le choix d’une croissance basée sur les services marchands et semblons avoir définitivement abandonné l’industrie. A tort. Si la France veut compter dans le concert des Nations demain, elle doit avoir une industrie forte, qui s’appuie sur nos startups innovantes, et soit capable de développer des filières qui dynamisent les territoires. La baisse des charges sur le travail qualifié, couplée avec le crédit impôt-recherche, sera un levier décisif afin de relocaliser nos talents, reconstituer notre industrie et soutenir le développement des pépites de la « startup nation ». C’est une décision politiquement difficile, mais économiquement nécessaire.

 

Par Pierre-Antoine Dusoulier, CEO d’iBanFirst

 

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