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Oui, l’holacratie est parfois complexe, rigide et pas humaine : voici pourquoi !?

OPINION// L’holacratie n’est pas un outil miracle clé en main, ni une méthode pour conduire le changement, c’est un modèle de pouvoir constituant pour inspirer et construire des fondations saines dans l’exercice du pouvoir. C’est en réalité une méta-constitution.

 

Une chose est certaine. L’holacratie a le vent en poupe. Les nombreux dirigeants avec qui j’échange le confirment. Alors qu’ils ont laissé leurs équipes initier une réflexion sur ce qui pourrait être la meilleure organisation pour l’entreprise, le meilleur modèle de gouvernance, celles-ci reviennent en majorité avec l’holacratie. Mais, alors même que l’holacratie est numéro un des propositions faites par les collaborateurs, les retours terrain indiquent souvent que celle-ci est perçue comme complexe, rigide et ne traite pas assez de l’humain. De cette dualité débouche parfois un entre-deux eaux, un « truc inspiré de holacratie ». Il s’agit donc de lever toute ambiguïté quant à ce qu’est et ou n’est pas l’holacratie. L’occasion d’insister sur le fait qu’elle est plus qu’une simple constitution, une méta-constitution.

 

Vers une nouvelle structure de pouvoir

Si l’holacratie a le vent en poupe c’est que le changement d’organisation et de gouvernance ne se décrètent pas. Comme j’ai déjà pu l’écrire, la structure précède et crée la culture. Il ne peut y avoir de changement de culture au sein de l’entreprise sans changer sa structure. Sans quoi, on se condamne invariablement au surplace voire à régresser. Changer de structure de pouvoir, c’est travailler avant tout sur l’émergence d’un environnement sain que j’aime comparer à celui recherché par la permaculture. Avec celle-ci, on s’occupe de la terre, on la soigne pour qu’elle soit saine. Les fruits et légumes récoltés ne sont que la conséquence d’une culture vertueuse de la terre. De la même façon, la nouvelle structure de pouvoir est le préalable à toute velléité de transformation. Et, pour y parvenir, l’adoption d’un pouvoir constitutionnel est une étape fondatrice. Un bon départ, essentiel mais loin d’être suffisant.

 

Holacratie « is not enough »

On l’a vu, beaucoup perçoivent l’holacratie comme étant trop rigide et peu humaine. Et c’est tout à fait normal puisqu’il s’agit d’un corpus de règles explicites, d’une constitution et non d’une méthode d’accompagnement du changement “clé en main” qui offrirait réponses à toutes les questions. Avec elle, si le changement de structure est disruptif, rien n’est dit sur tout ce qui est incrémental. Dans ces conditions, rien de surprenant à ce que certains sujets soient tout bonnement absents de l’holacratie et de sa constitution.
Car celle-ci est une constitution à visée mondiale, globale. À ce titre, elle est très voire trop abstraite puisqu’elle reste le fruit d’expériences et d’un terrain de jeu générique. C’est pour cela que méthodes et outils ont dû voir le jour pour combler ses angles morts, tous ces sujets qui, en toute logique, ne relèvent pas d’elle et en font un système parfois peu humain. C’est le cas, par exemple, des fonctions RH qui sont totalement absentes de la constitution. Une situation somme toute normale puisque les fonctions RH diffèrent d’une entreprise à l’autre. L’holacratie ne traite en réalité que ce qui relève d’un dénominateur commun à toutes les organisations, à toutes les entreprises. Ni plus, ni moins.

 

Holacratie : une complexité source de simplicité

Après une douzaine d’années d’existence, l’holacratie, par le biais d’une multitude d’itérations, fruits de l’expérience et d’expérimentations dans des centaines d’entreprises, s’est beaucoup enrichie et donc complexifiée. Par le biais d’un processus d’abstraction et de distillation, elle en est venue à proposer plus de simplicité grâce à plus de complexité. Conséquence de ce processus, l’holacratie est venue défricher en profondeur le sujet du management et, plus largement, du pouvoir constituant. Parallèlement, ce processus est également venu rendre le design managérial encore plus complexe à appréhender par ceux qui portent le changement au sein des organisations. D’ailleurs, quel patron peut dire aujourd’hui qu’il a réfléchi à cette nouvelle matière qu’est le pouvoir constituant de son entreprise, forme de méta-management ?
Et cette complexité croissante de la matière managériale et, plus largement du pouvoir constituant, n’est pas prête de s’arrêter. La nouvelle version de la constitution de holacratie, la version 5.0, en est une excellente illustration. Alors que jusqu’ici la constitution attribuait un leader de cercle (manager) à chaque cercle de l’organisation, la nouvelle mouture laisse la possibilité d’en avoir plusieurs. C’est la réalité qui a imposé ce changement, même si, de mon expérience, celle-ci ne s’applique qu’à un ou deux pour cent des entreprises que j’ai pu accompagner. Nous sommes donc bien sur plus de complexité pour plus de simplicité.
Conséquence : la constitution et surtout le changement d’organisation voulus n’en sont que plus difficiles à concrétiser. D’autant que, bien souvent, les parties prenantes éprouvent des difficultés à assimiler les concepts et le jargon de l’holacratie. C’est le cas des patrons, des managers et des collaborateurs mais aussi, sans surprise, de la plupart des coaches que je connais. En découle naturellement ce sentiment que l’holacratie est trop rigide, pas assez humaine et, surtout, trop complexe. Pourtant, elle ne cherche pas à tout couvrir. On pourrait même affirmer qu’elle doit se concevoir comme un minimum minimorum, une méta-constitution.
Face à cette complexité et dans l’incompréhension de ce qu’est réellement l’holacratie, à savoir une méta-constitution et non une méthode pour accompagner la transformation, certains choisissent de simplifier en intégrant des “bouts” dans leur approche. Ils s’inspirent de, comme dans le cas de la gouvernance partagée ou encore ils tentent de réduire la complexité en procédant à une adoption modulaire c’est-à-dire article après article de la constitution. Ce faisant, ils passent tous à côté de la puissance d’un pouvoir constituant explicite et au service du vivant.

 

Holacratie est une méta-constitution

L’holacratie ne propose pas une constitution par entreprise. Elle offre en revanche un cadre, des règles explicites qui s’appuient sur ce qui constitue les dénominateurs communs de toutes les entreprises. Elle est une méta-constitution parce que, dans toutes les entreprises qui ont opté pour cet outil, l’holacratie est toujours amendée et complétée d’autres outils. Au niveau de la constitution comme de l’encodage c’est-à-dire de la définition des rôles et des cercles dans le logiciel qui cartographie la structure de la nouvelle organisation. Et aussi dans l’accompagnement incrémental des personnes : des managers vers l’excellence managériale et des collaborateurs vers le self-management.
Dans ces conditions, si on veut vraiment changer l’organisation, il convient de s’appuyer sur l’holacratie pour aller plus loin et plus près de ce qui constitue les spécificités de chaque entreprise. Deux options sont possibles. La première consiste à adopter l’holacratie dans l’entreprise en y greffant les outils qui permettront de combler ses manques, notamment sur les sujets RH. Seconde option : créer directement cette nouvelle constitution. L’enjeu est de taille puisque, comme nous l’avons vu plus haut, le management et le pouvoir constituant  restent des matières mal connues. Pour autant, choisir cette seconde option, en s’appuyant sur l’holacratie et son expérience, son recul, c’est choisir d’aller vers une constitution plus complète, plus pédagogique car conçue sur mesure. C’est aussi pouvoir revoir, ajuster le vocabulaire pour éviter toute forme de jargon excluant ; c’est surtout aller jusqu’au maximum de complexité que cette entreprise est en capacité d’assimiler à un moment donné puis de cheminer au rythme de ceux-ci.
C’est cette dernière voie qui semble l’emporter ces derniers temps. Un pouvoir constitutionnel personnalisé. Car, en partant d’holacratie et de sa méta-constitution, cette disruption constitutionnelle adaptée à chaque organisation permet d’ajouter l’humain et la pédagogie qui faisaient défaut jusqu’ici, et de se placer au niveau de complexité qui lui est accessible. A condition d’avoir les compétences en matière de pouvoir constituant. Elle est alors la possibilité d’un pas de géant !

 

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