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L’Utilisation D’Un Smartphone Altère Votre Perception Du Temps

©Getty Images

Les smartphones impactent lourdement le fonctionnement de nos cerveaux. Même lorsqu’ils sont bien utilisés, notre perception du temps s’en trouve néanmoins bousculée. Faut-il se priver pour autant de ces petites merveilles de technologie ? Non. Les techniques de méditation permettent de ralentir la flèche du temps.

 

Nous constatons jour après jour que les technologies numériques transforment en profondeur le fonctionnement des entreprises. Elles transforment aussi notre rapport au temps. La réponse instantanée devient une exigence implicite de l’entreprise qui pousse tous ses managers à répondre à un email à toute heure, fussent-il en train de déjeuner ou déjà prêts à se mettre au lit. Là où le bât blesse, c’est que le nombre de ces interruptions comme de ces sollicitations croît dans d’inquiétantes proportions, favorisant une agitation mentale difficile à apaiser naturellement et qui peut conduire à toutes sortes de désordres physiologiques : respiration saccadée, augmentation du rythme cardiaque, augmentation du cortisol dans le sang, etc. Cette agitation mentale, nous la côtoyons aussi dans la vie quotidienne. Avez-vous déjà fait vos courses dans un hypermarché une veille de Noël lorsqu’il y a beaucoup de monde ? Le cerveau doit traiter les milliards d’informations envoyées par cette foule pressée qui se déplace dans tous les directions, tel un mouvement brownien. Nous ressortons de cette épreuve fatigués, le mental agité. Or, c’est ce qui se passe en continu dans la vie des entreprises. Malgré le repos du sommeil, cette surcharge mentale s’installe en permanence comme une machine qui s’emballe. Résultat? Prédomine alors l’impression que tout va trop vite, potentialisant une forte envie de ralentir. En un mot, notre rapport au temps a changé.

Steve Jobs, l’ex-patron d’Apple avait senti ce danger venir insidieusement. Quelques temps avant son décès, il avait décidé de limiter l’accès de ses enfants aux iPhone et iPad, une position exprimée lors de nombreuses interviews. Les enfants sont naturellement attirés par l’état de l’art de ces « jouets » capables de les divertir et de les distraire pendant les vacances scolaires ou sur ​​de longs trajets en voiture lorsque l’attention des parents est ailleurs. L’ex-patron d’Apple était conscient des dommages potentiels que ces technologies peuvent infliger à de jeunes enfants. Il n’était pas seul de cet avis. Chris Anderson, ancien rédacteur en chef du célèbre magazine technologique Wired, fixait aussi des limites de temps strictes à ses enfants quant à l’usage de ces technologies. « J’ai ressenti les dangers, je ne veux pas que mes enfants les ressentent » affirme toujours Chris Anderson. Les recherches confirment ce point de vue. Des chercheurs de l’Université de Californie ont en effet montré qu’il fallait plusieurs jours de privation de tels gadgets électroniques pour que les compétences sociales des enfants reprennent un cours normal. Rappelons qu’un enfant qui vit aux Etats-Unis passe en moyenne sept heures et demie par jour face à des écrans électroniques !

Qu’en est-il dans l’entreprise ?

Employés et managers sont confrontés à un mode de fonctionnement qui équivaut à une accélération du temps. La lettre qui mettait plusieurs jours à parvenir à votre correspondant lui arrive en quelques millisecondes. La réponse aussi vous parvient en quelques millisecondes. Il faut souvent décider dans la seconde avec un mental qui fonctionne de manière superficielle faute de temps. Que faire quand ce rythme s’installe en permanence pour toutes les tâches? Ralentir le temps comme le suggèrent certains ? « Nous devons revoir nos priorités » suggère le journaliste canadien Carl Honoré, auteur du célèbre « Éloge de la lenteur ». Cette figure emblématique du mouvement « slow » privilégie la qualité à la rapidité. Slow food, slow travel, slow management …L’idée n’est pas nouvelle : l’appel à ralentir remonte à la révolution industrielle du XIXe siècle. La tentation de ralentir est d’autant plus grande que nos rythmes naturels sont perturbés, ce qui est le cas depuis l’invasion du numérique dans notre vie. En réaction avec les tendances du moment, ce retour à un rythme plus lent n’est pas une solution. Il va à l’encontre de l’évolution présente du monde de l’entreprise.

Rapport au temps 

L’impact le plus évident de cette accélération est le changement de notre rapport au temps. Lorsque l’esprit est apaisé, notre attention est entièrement focalisée sur le moment présent. Nous portons toute notre attention sur ce que nous faisons. Lorsque le mental est perturbé par une stimulation excessive, ce qui arrive fatalement avec l’invasion des technologies numériques, l’attention se fragmente. Conséquence : nous ne portons attention sur ce que nous faisons que de manière partielle. Une grande partie de nos pensées échappent alors à notre attention. La perception du temps est également fragmentée. Nous sommes à la fois dans le présent, dans le passé et dans le futur. Selon l’étude réalisée par Matthew Killingworth, psychologue à la Harvard University, nous passerions 46,9 % de nos heures éveillées à penser à autre chose que ce que nous faisons. Nous passerions au moins de 30 % du temps à rêvasser au cours de toutes nos activités, sauf pendant l’acte sexuel. Et encore ! La vie mentale semble ainsi marquée par une sorte « non présence » constate le psychologue américain. Les activités où nous serions les plus présents sont l’exercice physique et la conversation. Cette étude rappelle au passage qu’il faut éviter de diviser son attention en menant plusieurs tâches simultanément.

Le psychiatre Christophe André

Le point primordial est que cette étude confirme le credo de nombreuses traditions de méditation qui enseignent que le bonheur se trouve dans l’instant présent. Alors, méditons ! En fait, chaque technique de méditation a sa propre façon de ramener l’attention vers le présent. Ainsi, la méditation de la pleine conscience, tout comme les méditations bouddhistes dont elle s’inspire, invitent le manager qui la pratique à ramener son attention sur le moment présent en se servant notamment de l’observation de la respiration. L’esprit est alors focalisé sur un objet qui l’éloigne de la zone du vagabondage mental. C’est la clé pour accéder au fameux état de « pleine conscience ». Cette technique, occidentalisée par le professeur de médecine Jon Kabat-Zinn, a été médiatisée en France par Christophe André, psychiatre à l’hôpital Sainte-Anne. Cette pratique n’est pas limitée à la session de méditation proprement dite. Il est recommandé d’observer en permanence la respiration, pendant le repas, pendant la marche… ainsi que toute autre activité afin de rester le plus possible dans l’instant présent. Cette technique développe la capacité d’attention dans la vie quotidienne ainsi que le montre l’activation de la zone occipitale du cerveau, mais au prix d’efforts que certaines ‘applis’ sur smartphone tentent d’accompagner pas à pas. Pour le manager, pris dans le flot ininterrompu des sollicitations du numérique, revenir le plus souvent possible vers l’instant présent n’est pas évident. La technique permet néanmoins d’apaiser, du moins jusqu’à un certain degré, la respiration ainsi que l’agitation mentale. La démarche nécessite en tous cas de sérieux efforts car elle oblige à lutter contre la tendance du mental à vagabonder.

Le psychiatre Norman Rosenthal

Pour sa part, la méditation transcendantale met à profit la tendance naturelle de l’esprit à se tourner vers l’intérieur, ce qui explique l’extrême simplicité de la technique. Elle utilise pour cela un mantra, un son dénué de signification, en tant que simple véhicule de l’attention qui se tourne vers l’intérieur. Ce qui permet d’accéder à des niveaux de plus en plus apaisés de l’esprit et se traduit automatiquement et sans effort par un ralentissement de la respiration jusqu’au moment de sa suspension. Cette expérience, appelée transcendance, est automatique. Le temps est alors comme suspendu, ce qui – notamment, et dans le contexte qui nous intéresse ici – contribue à contrebalancer l’accélération du temps résultant des activités numériques. Lorsque la session de méditation prend fin, le manager revient spontanément dans l’instant présent avec une attention rafraîchie et réintégrée. Lors d’un forum organisé sur le thème de la méditation à New York en février dernier, le Dr Norman Rosenthal, psychiatre et auteur du livre « Transcendance », a rappelé que, comparée à la méditation de la pleine conscience, la méditation transcendantale est une technique facile, simple et naturelle. Elle est pratiquée deux fois 20 minutes par jour, confortablement assis les yeux fermés. Elle réduit considérablement le stress, l’anxiété et la fatigue. Favorisant un développement intégré et cohérent du cerveau dans toutes les gammes de fréquence des EEG, elle modifie en profondeur la relation au temps, favorisant entre autre la prise de meilleures décisions, la créativité, etc.

Parallèlement, l’Ayurvéda recommande plusieurs techniques complémentaires simples afin de ralentir le temps et diminuer l’agitation mentale, à commencer par une organisation du travail respectant les cycles de la nature. L’agitation mentale, résultat du déséquilibre du dosha Vata, touche en priorité les managers dont la constitution est dominée par les doshas Vata ou Pitta. Pour le manager dominé par Vata, le repos doit devenir la priorité numéro un. Contrairement à l’apparente évidence, se reposer en allant se coucher au lieu de travailler en cas d’agitation mentale n’est pas une perte de temps. Le travail laissé en suspens n’est pas un problème, car, la perception de ce qui restera à faire aura changé après quelques heures de repos ou de sieste. Pour le Pitta, il est conseillé de ne pas sacrifier son temps de loisir. Aller au cinéma en cas de surcharge mentale est aussi recommandé. Il sera plus facile de poursuivre son travail avec plus d’efficacité lorsque l’esprit sera plus apaisé par un spectacle ou une longue promenade en forêt. Pour ces deux constitutions, il est recommandé en outre de faire de l’exercice modéré quotidiennement et de boire un ou deux grands verres d’eau tiédie en cas d’agitation, cela aidera à retrouver plus rapidement le calme intérieur. Afin de stabiliser les bons résultats acquis par ces différentes techniques complémentaires, le manager qui veut aller plus loin peut adopter un régime pacifiant son dosha principal et prendre l’habitude régulière d’aller dans un centre ayurvédique pour un massage complet à l’huile de sésame et un « shirodhara ». Cette technique, qui consiste à faire couler en continu un filet d’huile tiède sur le front,  n’a pas son pareil pour apaiser rapidement l’agitation du mental.

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