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Renaud Capuçon : L’Audace C’est De Jouer Sans Être Tétanisé Du Schubert Et Du Brahms

Renaud Capuçon© Mat Hennek to Virgin Classics

Renaud Capuçon est une grande figure. Violoniste hors-pair, il conserve cette attention, ce lien aux autres et un sens du partage. Le musicien nous invite dans son univers à la rencontre de l’enseignement et de la littérature. Interview.

Mathilde Aubinaud : Vous dirigez le Festival de Pâques d’Aix-en-Provence et les Sommets musicaux de Gstaad. Quelle est votre vision du leadership ?

Renaud Capuçon : J’ai commencé à programmer, vers 15 ans, quand j’étais au conservatoire. Je réunissais alors des amis pour faire de la musique de chambre. J’ai créé un festival à Chambéry dans ma ville natale à 19 ans et ensuite le festival de Deauville puis celui d’Aix-en-Provence. Programmer est, pour moi, très important. Je ne pourrai me passer de mettre les gens en synergie. Qui peut jouer avec qui ? Qui peut jouer quoi ?  Etre musicien, pour moi,  c’est jouer du violon, enseigner et programmer des festivals.

« Etre musicien, pour moi,  c’est jouer du violon, enseigner et programmer des festivals. »

Justement, que signifie « enseigner » pour vous ?  

C’est extraordinaire : non seulement on voit les élèves grandir et s’épanouir mais on retravaille aussi soi-même. En cherchant des solutions, on reformule ce que l’on a nous-même appris. On retravaille au moment présent, on se réapproprie ce que les professeurs nous ont appris avec la sensibilité et la maturité d’aujourd’hui.

A l’image de la littérature, le lecteur, joue un rôle dans l’actualisation du texte…

Oui, c’est une deuxième lecture avec un prisme très différent. J’explique à mes élèves que depuis que je travaille, avec eux, je progresse.

De nouvelles grilles de lectures sont proposées. Ce n’est donc pas figé ?

Jamais. J’encourage les musiciens à enseigner le plus tôt possible. Enseigner, c’est ne jamais arrêter d’apprendre.

« Enseigner, c’est ne jamais arrêter d’apprendre. »

En quoi l’audace est-elle une valeur importante dans l’interprétation ?

L’audace est essentielle. Tout musicien doit être audacieux sinon il est routinier. Si je n’avais pas eu d’audace, je n’aurais jamais créé le festival de Pâques d’Aix-en-Provence. Il est né d’une idée. L’audace c’est avoir une idée et essayer d’aller au bout.

L’audace c’est d’être capable, sans être tétanisé, de jouer du Mozart, du Schubert et du Brahms. C’est imposer sa marque et sa griffe. Un interprète est capable de recréer l’œuvre.

« Tout musicien doit être audacieux sinon il est routinier. »

C’est s’autoriser à se repenser ?

La vie d’un musicien est sans fin. Je suis au début de ma quête d’absolu et de ma quête d’apprentissage.  A partir du moment où vous avez envie d’apprendre, c’est sans fin. J’ai beaucoup appris de Claudio Abbado et de Jacques Chancel. Avec lui, c’était des heures de discussions sur la politique, le sport, la société.

 

© Darmigny

« La vie d’un musicien est sans fin. »

Votre actualité ?

J’ai des festivals en juillet puis je me remets à jouer mi-août.  J’ai un disque de musique de chambre de Debussy qui sort à la fin de l’année. Je vais faire des concerts, en Europe, en Israël, aux Etats-Unis et au Japon.

L’endroit où vous vous sentez le mieux pour jouer ?

En Autriche, en Allemagne et en Suisse, la musique fait partie des gènes. Il y a un degré de connaissance et une vraie tradition.

Les livres qui vont ont façonnés ?

J’ai été très marqué quand j’ai découvert Stefan Zweig à une vingtaine d’années. On pourrait mettre en corrélation la musique de Richard Strauss avec Sweig au-delà de leurs correspondances. Il y a une forme de romantisme dans leurs œuvres. J’ai été aussi influencé par Albert Camus et Jean-Paul Sartre. Si je devais retenir un auteur, ce serait Paul Eluard, j’ai besoin de me replonger régulièrement dans la poésie. C’est peut-être la forme d’art écrit qui me touche le plus. J’ai l’impression que c’est de la musique. Je suis passionné par le courant surréaliste comme André Breton ou René Char.

« On pourrait mettre en corrélation la musique de Richard Strauss avec Sweig au-delà de leurs correspondances. »

Le mot de la fin ?

J’ai la chance de faire un métier exceptionnel. Je me réveille chaque matin avec une découverte.

Propos recueillis par Mathilde Aubinaud

Retrouvez plus d’informations sur le site de Renaud Capuçon : www.renaudcapucon.com/fr/

 

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