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Exposition Mathias Kiss, Golden Artiste

L’artiste Mathias Kiss brise les lignes droites et casse les corniches. Ses créations et installations détournant les bases des arts décoratifs classiques occupent l’actualité de la scène artistique parisienne et européennes à travers plusieurs expositions simultanées.

Il sourit à la vie. Il se lève à dix heures du matin, goûte et déguste jusqu’à plus soif sa condition d’artiste libre. Il dit aussi qu’il profite de sa retraite. Ce retraité des Compagnons du Devoir excelle à désapprendre tout ce qu’il appris pendant quinze ans dans la restauration des bâtiments historiques. Ou plutôt, il détourne les techniques parfaitement maîtrisées du trompe l’œil, de la dorure à l’or fin, des moulures en stuc du XVIIIème siècle, en créant des œuvres décoratives expérimentales qui parlent d’une schizophrénie parfaitement maîtrisée entre l’artiste et l’artisan. Tout ce qu’il a appris dans la discipline et la parfaite reproduction de gestes séculaires, en réparant les décors du passé pour qu’ils continuent de traverser le temps, il le transpose, le déforme pour en extraire un sens nouveau, questionnant la notion d’époque, de progrès ou d’image. Par exemple, il utilise la dorure à l’or fin ou plutôt l’or, prisonnier de sa représentation ornementale dans les arts décoratifs, pour sa qualité réfléchissante, qui embellit le teint, illumine l’espace, donne de la chaleur. Dans une exposition intitulée Ornementation Brutaliste, en avril 2015, à la Galerie Nextlevel à Paris, il déconstruisait les corniches dorées à l’or fin dans le pur style du Palais de l’Elysée, pour en faire des stalactites sorties du milieu du plafond. Dès lors, brutaliser le matériau et le code esthétique classique en montant la décoration sur le plan vertical, c’est la ressusciter, l’émanciper en lui offrant une place de premier choix : la place d’une oeuvre. De frise discrète qui rase les mur, la moulure devient un « Golden Snake » qui occupe tout l’espace.

L’œuvre qui a créé la rupture ou permis l’affranchissement total de l’artisan, c’est, dit-il, le Miroir Froissé créé en 2008, aboutissement d’un travail sur l’absence d’angles droits. Du miroir, matériau par définition rigide qui renvoie une réflexion, il a fait une sculpture inspirée d’une feuille de papier froissée dans laquelle on cherche son image, son reflet, impossible à fixer. Ce Miroir Froissé l’a propulsé dans le marché de l’art, son prix ayant été multiplié par dix en neuf ans.
Cette pièce déjà culte rejoindra un ensemble de photographies, d’objets de design et d’oeuvres d’art contemporain au sein de l’exposition collective « Miroir Miroir » présentée au Mudac (Musée de design et d’arts appliqués contemporains à Lausanne) du 31 mai au 1er octobre 2017. L’exposition propose de traverser l’intervalle séparant notre image de notre être. Elle sera aussi à l’honneur à la Gallery Elle à Zurich, présentée avec un ensemble d’autres pièces dans l’exposition « Sans 90° » jusqu’au 3 juin, qui signe l’arrêt de mort de l’angle droit.
 
 
En fait, Mathias Kiss adore les surfaces blanches. Les murs de ses appartements sont pour lui des pages blanches sur lesquelles il imagine des installations, telles que dans les nouveaux locaux de son agence, Attilalou, située 2 rue des Francs Bourgeois, dans le Marais.
C’est parce qu’il se sert de l’artisanat d’art et le dépasse que son univers séduit ; de ses installations pour Hermès qui lui donne carte blanche depuis plusieurs années pour la présentation scénographique des collections de chaussures, à sa participation à l’exposition Sur/face Miroir au Musée d’art contemporain de Frankfort où ses œuvres côtoieront à partir du 24 juin celles d’Andy Warhol ou d’Ettore Sottsass, en passant par la Kiss Room, installation artistique, sorte de chambre introspective et méditative recouverte de miroirs attenante au café de La Perle au 78 rue Vieille-du-Temple, ou encore par l’intérieur du Café de la Poste, rue de Turenne à Paris, Mathias Kiss est partout. Et toujours là où on ne l’attend pas.
 
 
Dernière installation en date, dans la Maison-musée d’Auguste Comte à Paris, par exemple, qui s’ouvre pour la première fois à l’art contemporain. Avec Out of Time, une installation occupant toute les pièces de l’appartement resté inchangé depuis 1857, date du décès du philosophe positiviste et adorateur du Progrès scientifique, il mène une nouvelle réflexion sur les codes de l’habitat, et l’utilisation de la dorure en introduisant dans cet intérieur figé, des objets modernes, symboles de « progrès » mais déjà obsolètes, qu’il sacralise en les recouvrant d’or. « Ces objets sont banals, on les abandonne sur les trottoirs parce qu’ils n’ont à nos yeux, plus aucune valeur. J’ai fait les puces, les cash converters, Ebay pour trouver un ordinateur IBM : introuvable. » Il pose un minitel sur la table de travail d’Auguste Comte, un aspirateur sur le parquet, un téléviseur sur le buffet avec sa télécommande, une paire de rollers au pied du lit en guise de pantoufles… créant une sorte d’archéologie du XXème siècle à travers cette collection d’objets « électriques » modernes qui théoriquement ne tombent jamais en panne, mais terriblement obsolètes, fossilisés dans l’or. Des objets symboles de progrès et d’utopie à la durée de vie si courte, en opposition au décor et meubles de l’appartement, vieux, mais immuables. Du coup, l’appartement-musée se mue en espace-temps insolite et interroge notre perception de l’histoire. Auguste Comte aurait a-doré.
 

MIROIR MIROIR 
exposition collective au Mudac à Lausanne (Suisse) du 31-05-2017 au 01-10-2017
http://mudac.ch/expositions/miroir-miroir/

 

SANS 90 DEGRES,
exposition personnelle à la GALLERY ELLE à Zurich du 17 mars au 3 juin
http://galleryelle.com/

 

Francfort Museum Angewandte Kunst, 
du 24 juin au 1er octobre 2017
http://www.museumangewandtekunst.de/de/museum/ausstellungen/surface-spiegel.html

 

Studio de création Attilalou
2 rue des Francs Bourgeois
75003 Paris
www.attilalou.com 

www.mathiaskiss.com

 

Texte et photos par Françoise Spiekermeier pour Plume Voyage Magazine

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