Le marché de l’immobilier donne les signes d’un regain après l’attentisme qui succéda à l’euphorie post-confinement. Parmi les principaux facteurs à l’œuvre, la psychologie des acteurs, certaines localisations désormais plus prisées et de nouvelles préoccupations environnementales.
Par Michael Miguères – Un article issu du numéro 27 – été 2024, de Forbes France
À la sortie de la crise du Covid-19, de 2020 à 2022, l’immobilier n’obéissait plus véritablement aux règles classiques de marché avec des taux d’intérêt anormalement bas et une envie irrépressible d’air et d’espace après des mois de confinement pour de nombreux propriétaires urbains. Les acheteurs pouvaient obtenir facilement des crédits, les vendeurs étaient heureux de pouvoir vendre leur bien plus cher que ce qu’ils espéraient quelques mois auparavant, et les grandes maisons avec jardin loin de Paris partaient par wagons et à des prix inédits !
La nature économique ayant repris ses droits, le taux d’inflation est ensuite revenu à des niveaux plus conformes aux réalités économiques, ce qui a contracté le marché. Côté vendeur, il fallait désormais vendre à un prix de marché plus bas qu’à la sortie du confinement, ce qui n’était pas si facile à accepter, tandis que les acheteurs se faisaient plus rares et dans des conditions d’octroi de crédit plus complexes et avec des envies de maisons secondaires moins élevées. Cette phase de contraction et de stagnation semble arriver à son terme et le marché est en train de repartir, avec un retour de demandes vers les destinations plus centrales. C’est l’analyse de Jean-Claude Annaert, directeur général du groupe Michaël Zingraf International Real Estate : « Comme la demande était très dynamique, les tarifs se sont envolés. Ce phénomène n’a pas seulement touché le marché d’exception de la Côte d’Azur et du bord de mer, car les prix ont atteint des niveaux inconnus jusque-là dans l’arrière-pays, autour de Mougins, Opio ou Valbonne, par exemple. Le phénomène a été similaire dans d’autres régions. Autour de Deauville, de très belles propriétés avec de grands terrains en pleine campagne ont été achetées par des personnes qui cherchaient à s’éloigner des centres-villes urbains pour mener une vie plus tranquille. Cet exode a été particulièrement notable à Paris intra-muros, même dans les beaux quartiers de l’ouest, où davantage de grands appartements familiaux ont été mis en vente. Actuellement, la tendance est en train de s’inverser et nous constatons que davantage d’acquéreurs s’intéressent à nouveau aux logements dans la capitale.. »
Ce retour à un fonctionnement plus classique, avec des taux d’intérêts plus élevés et des prix de bien en baisse, met du temps à rassurer les acheteurs comme les vendeurs. Comme si un retour à l’euphorie était possible. Cependant, le marché, avec des prix en baisse, reste intéressant pour les acheteurs. Comme le dit Marie Miramant, fondatrice de l’agence Marie Miramant, Immobilier d’exception, spécialisée dans le marché haut de gamme et de luxe dans le sud de la France : « Les portefeuilles sont plus étoffés cette année que les années précédentes, avec un choix plus important de biens à la vente et donc l’opportunité pour les acquéreurs de choisir le bien qui correspond le mieux à leurs souhaits. C’est une excellente période pour acheter et il faut savoir en profiter. Si crédit il doit y avoir, les taux ont déjà commencé à baisser et sont toujours susceptibles d’être renégociés. La tendance est à un retour vers des prix plus justifiés et il ne faut pas hésiter à saisir cette opportunité. »
Demandes et offres en hausse
Parmi les nouvelles tendances, il y a d’abord les localisations, que ce soit autour de la capitale ou dans les zones plus estivales. Quelques villes situées à l’ouest de Paris participent notamment au regain avec la mise sur le marché de plusieurs programmes neufs de standing à l’achat. Citons les villes de Clichy, Puteaux ou Suresnes selon Maxime Benhamou, commercial chez Les Comparateurs du neuf, qui note « des programmes assez exceptionnels, en particulier dans leur architecture, qui sont disponibles désormais à l’achat et devraient être livrés d’ici 2027 ». Il estime que la proximité des transports et du centre-ville, avec en projet un prolongement de la ligne 13 « devraient amener ces constructions neuves à un prix au mètre carré autour de 10 000 euros ».
Sur la Côte d’Azur, certaines localités connaissent également une hausse de la demande. Le groupe Michaël Zingraf Real Estate a constaté une hausse de 40 % entre avril 2023 et avril 2024, et vient de procéder à l’ouverture en juin 2024 d’une nouvelle agence Michaël Zingraf Real Estate à Mandelieu-la-Napoule, après l’ouverture ces derniers mois d’une agence à Sainte-Maxime et une autre au Pyla-sur-Mer, notamment dédiées à une clientèle internationale.
Le groupe note des équipements haut de gamme intéressants qui se conjuguent avec la présence de la mer. « Avec ses deux golfs, ses deux ports, son aérodrome dédié à l’aviation privée et la proximité de Cannes, la commune de Mandelieu- la-Napoule profite de son calme et de la sécurité de ses quartiers pour attirer une clientèle de Français et d’étrangers souhaitant acquérir une résidence secondaire. L’immobilier à Mandelieu-la-Napoule fait penser à celui de Cannes il y a dix ans. La commune est en plein développement avec des quartiers appréciés pour les résidences secondaires comme Les Termes, Minelle ou Capitou », souligne Grégory Moulin, le responsable de la nouvelle agence. Un attrait pour la mer Méditerranée, qui reste le critère d’achat numéro un. Il observe ainsi que « les clients de propriétés les pieds dans l’eau sont comparables aux collectionneurs d’œuvres d’art. Ce sont des personnes qui ont un lien particulier avec la mer. Ceux qui souhaitent ce type de bien ne veulent pas autre chose. Ils achètent des pièces uniques. L’émotion est un critère très important, d’autant que la côte y est relativement sauvage, avec par exemple le secteur du Cap Roux qui est désormais protégé ». Des prix de vente qui oscillent entre 3 et 20 millions d’euros.
Des préférences renouvelées
Si la première conséquence de l’envie d’espace post-confinement s’est ressentie sur des biens anciens, les nouvelles constructions se sont également adaptées à cette nouvelle inclination des acheteurs. C’est ainsi que Maxime Benhamou assure devoir s’adapter à la demande persistante d’espace extérieur. Il décrit aussi une appétence pour des appartements « plus écologiques, avec des normes plus durables et une basse consommation. Les acheteurs dans le neuf réclament un bâtiment construit pour l’avenir, faible en émission et économe en charges ». Marie Miramant observe quant à elle un retour important de demandes clés en main dans son secteur : « Les biens avec très peu de travaux ont désormais la préférence. De plus en plus de clients renoncent à effectuer des travaux pour ne pas avoir à gérer des délais et des coûts moins maîtrisables qu’auparavant. Certains souhaitent acheter des biens entièrement meublés et décorés, par gain de temps et pour pouvoir profiter immédiatement de leur achat. » Elle nuance cependant : « Il existera toujours des acheteurs passionnés qui peuvent chercher la perle rare durant des années, pour prendre le temps de restaurer une bâtisse, selon leur goût. »
C’est exactement le défi qu’a souhaité relever le parfumeur Serge Khalifé en rénovant entièrement une propriété selon les tendances contemporaines mêlant l’élégance, le respect de la nature et l’amour de la Méditerranée. La rénovation de ce château datant de 1762, avec une vue panoramique à 180 degrés, rappelle que le prix d’une propriété est aussi lié à son usage. Inspiré par ses week-ends d’enfance passés à se délecter des produits des collines
alentour, ou encore ses visites aux marchés de Beyrouth avec son père pour sélectionner les fruits et légumes locaux, Serge Khalifé a souhaité rétablir une connexion intime avec la nature. Son but était non seulement de trouver une propriété entourée de verdure, mais que celle-ci reprenne aussi ses droits à l’intérieur grâce à un travail exclusivement réalisé avec des matériaux naturels, du minéral et du végétal, même dans les peintures utilisées. La difficulté principale de cette nouvelle tendance est de trouver des artisans qui savent travailler ces matériaux comme le bois naturel ou le bois flotté. Cette propriété deviendra, à terme, son atelier de création de parfum 100 % bio. Elle fera aussi office de lieu de réception de Maison Serge Khalifé dédié aux connaisseurs qui souhaitent avoir leur parfum personnalisé exclusif. Puis, de temps à autre, elle permettra d’associer à ses créations des chefs étoilés, des parfumeurs et des œnologues autour d’ingrédients visant à exprimer la quintessence de la nature.
À lire également : Les Bourses asiatiques en déroute en raison des craintes de récession
Vous avez aimé cet article ? Likez Forbes sur Facebook
Newsletter quotidienne Forbes
Recevez chaque matin l’essentiel de l’actualité business et entrepreneuriat.
Abonnez-vous au magazine papier
et découvrez chaque trimestre :
- Des dossiers et analyses exclusifs sur des stratégies d'entreprises
- Des témoignages et interviews de stars de l'entrepreneuriat
- Nos classements de femmes et hommes d'affaires
- Notre sélection lifestyle
- Et de nombreux autres contenus inédits