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Pourquoi La « Fièvre Bitcoin » Est (Fortement) Retombée

© Getty Images

Après avoir fait tourner les têtes à la fin de l’année dernière, tout un chacun se sentant l’âme d’un investisseur, le Bitcoin est brutalement rentré dans le rang début 2018 et poursuit, depuis, sa décrue dans l’ombre, les « opérateurs en herbe » ayant finalement fait voguer leur attention vers d’autres contrées. La « bulle Bitcoin » a-t-elle explosée ? Tristan Colombet, CEO de DomRaider et maître d’œuvre de l’une des premières « ICO » en France, décrypte, pour Forbes, cette séquence moins flamboyante.   

Après une montée en puissance qui a atteint son point culminant fin 2017, diriez-vous que l’engouement suscité par le Bitcoin auprès du grand public est largement retombé ?

C’est certain. Comme vous le mentionnez, nous avons atteint un pic d’intérêt du grand public en décembre 2017 qui, depuis, s’est largement tassé.  Lorsque l’on examine de près les volumes ou les occurrences sur les moteurs de recherche, on constate une inflexion très nette.  Plus qu’une mode ou une tendance, je dirais que cet « intérêt moindre » est le résultat d’une correction naturelle de ce qui était, à la fin de l’année 2017, une bulle spéculative.  Nous avions atteint des records de valorisation que je jugeais, déjà, extrêmes à l’époque et tout cela avait drainé une population non experte du secteur et pas du tout initiée aux arcanes des cryptomonnaies. La correction brutale du début de l’année et la correction progressive intervenue depuis a clairement fait retombée la « fièvre » autour du secteur.

Outre le Bitcoin, considéré comme le roi des cryptomonnaies », certaines autres devises ont-elles néanmoins conservées un certain attrait auprès du grand public ?

Tous les médias ont effectivement focalisé leur attention sur le Bitcoin. Seuls quelques connaisseurs des rouages de la blockchain et des cryptomonnaies avaient une compétence et une approche plus affûtée sur la compréhension des autres devises, même les plus marginales. Cette tendance n’a pas vraiment évolué, même si nous assistons, tout de même, à une érosion progressive de la suprématie du Bitcoin au profit de ses principaux concurrents. Mais cela reste un mouvement très progressif. Je n’ai pas senti une accentuation prononcée de ce phénomène.  Pour répondre plus précisément à votre question, l’Ethereum reste le « challenger » principal du Bitcoin, consolide sa seconde place et a, selon moi, de sérieux arguments à faire valoir pour la suite.  Il est également intéressant de noter une progression, relative certes, des unités qui commencent à avoir un véritable usage. Ceux qui correspondent à une véritable force de développement : je pense notamment à Steem ou encore à EOS.

Finalement, malgré cette incursion « sous les projecteurs », le Bitcoin et consorts n’ont-ils pas vocation à demeurer dans l’ombre ?

Aujourd’hui, les seules cryptomonnaies dont nous avons entendu parler jusqu’à présent  sont des devises non régulées.  Bitcoin, Ethereum, Ripple et autres ne sont guère issues d’une autorité centrale. Et je ne crois pas que ce dispositif ait un grand avenir devant lui car je ne vois pas le Français moyen acheter sa baguette avec des Ether.  Cela me semble très difficilement envisageable. Qu’elles puissent accéder à un statut de crypto-actif ou d’actions, pourquoi pas ? Mais pas davantage. En revanche, je pense qu’il existe de véritables opportunités concernant les cryptomonnaies régulées. Citons l’exemple de la Russie qui a lancé une première expérimentation autour du crypto-rouble. Cela engendrerait la capacité de générer du mouvement financier de pair à pair, le tout dans un cadre parfaitement bordé et régulé par les Etats. Ce qui constituerait une véritable évolution pour la technologie.

N’est-on pas également passé « à l’étape supérieure » avec la mise en place d’un cadre juridique autour de ces cryptomonnaies et autres ICO ? Des questions réglementaires et résolument techniques qui, justement, intéressent moins ce grand public ?

Maintenant que cette fièvre spéculative est derrière nous, nous sommes en effet dans une séquence réglementaire qui attire moins la lumière. Pour  ceux, comme nous chez DomRaider, qui ont déjà procédé à levées de fonds en cryptomonnaies, nous sommes dans le temps du développement  des usages. Tandis que le législateur a ouvert, depuis quelques mois, l’étape de la réflexion et de la régulation. Diverses thématiques qui, évidemment, ne soulèvent pas vraiment les foules.

Justement, en tant que précurseur des ICO en France, de quels atouts notre pays dispose-t-il pour devenir une place forte du secteur ?

J’ai moi-même participé à la mission d’information autour des cryptomonnaies menée par Eric Woerth (président de la Commission des Finances de l’Assemblée nationale, ndlr). Et en effet, la France a véritablement sa carte à jouer en la matière. Nous avons une expertise et de vraies compétences sur le sujet. En outre, le législateur et les principales autorités, je pense notamment à l’AMF (Autorité des Marchés Financiers), ont un regard bienveillant et une véritable compréhension de ces sujets afin d’aider le secteur et lui offrir l’opportunité de véritablement compter sur le marché. Autre atout, et non des moindres, l’image de marque de la France qui est excellente vue de l’extérieure.  La dynamique actuelle de notre pays est particulièrement positive en termes d’attractivité, de visibilité, dans le monde de la Tech, grâce à l’influence d’Emmanuel Macron.  La loi PACTE va également accentuer ce mouvement, ce qui permettrait à la France d’être l’un des premiers pays à disposer d’un cadre réglementaire officiel autorisé par l’Autorité des Marchés Financiers. La France serait à l’avant-garde et ferait office de véritable « plaque tournante » dans toute l’Europe.

Et les points à améliorer ?

Nous sommes, peut-être, un peu plus faibles sur la question de la gestion des flux financiers. Certains établissements bancaires, par exemple, sont toujours aussi réfractaires à l’endroit des sociétés désireuses de lancer des ICO. De ce point de vue, il ne faut guère négliger la concurrence  en provenance de Suisse notamment, mais également de Malte qui cherche à se positionner sur la question et  à tirer son épingle du jeu.  

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