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Eric Hazan (McKinsey & Company) : « Le métaverse attire surtout aujourd’hui le grand public, mais nous sommes en voie d’une adoption plus large »

Eric Hazan, Senior Partner chez McKinsey & Company.Eric Hazan, Senior Partner chez McKinsey & Company.

Eric Hazan occupe depuis plus de 14 ans le poste de Directeur Associé Senior (Senior Partner) chez McKinsey & Company au bureau de Paris et est l’un des chefs de file à l’échelle européenne des activités McKinsey Digital et Advanced Analytics. À l’occasion de la dernière édition du salon de Vivatech, ce dernier a présenté un rapport sur la création de valeur dans le métaverse.

 

Après avoir présenté aux éditions précédentes de Vivatech des rapports sur l’état de la digitalisation en Europe ou encore sur l’intelligence artificielle, pourquoi avoir choisi cette année de vous focaliser sur le métaverse ?

Eric Hazan : Il faut déjà préciser que les principaux éléments qui constituent le métaverse aujourd’hui existent depuis plusieurs années. Le gaming en fait partie et réunit des communautés très impliquées. Fortnite compte par exemple plus de 20 millions d’utilisateurs actifs. Associés au métaverse, les NFTs représentent d’ailleurs aujourd’hui une valeur économique réelle jusqu’à 250 millions de dollars.

À mon sens, nous venons tout juste de passer le stade du buzz avec un métaverse qui attire des investissements non négligeables : depuis le début de l’année, entreprises, sociétés de capital-risque et fonds de capital-investissement ont investi plus de 120 milliards de dollars dans le métaverse, c’est trois fois plus que ce qui avait été investi dans l’intelligence artificielle en 2016.

On a le droit d’être sceptique mais le montant d’investissement est tel qu’on ne peut juste pas passer à côté. Et c’est ce qui nous a poussé à mener cette étude auprès de 450 dirigeants d’entreprises et 3400 consommateurs. Tout comme nous avions pressenti la disruption en cours causée par l’intelligence artificielle à ses débuts.

Capture du rapport de McKinsey & Company sur le métaverse.
Capture du rapport de McKinsey & Company sur le métaverse.

Quels sont les principaux enseignements de votre nouvelle étude ?

Notre étude révèle dans un premier temps que 59% des consommateurs sont excités à l’idée d’une transition de leurs activités quotidiennes vers le métaverse. De la même manière, 57% des entreprises sensibles à cette nouvelle technologie se disent prêtes à l’adopter.

Le métaverse est d’abord destiné à attirer le grand public – notamment par le jeu et le divertissement – mais nous sommes en voie d’une démocratisation plus large. À l’avenir, il existera plusieurs points d’entrée à mesure que l’interopérabilité gagnera en maturité. Si bien que de nouveaux cas d’usage vont émerger notamment dans le cadre professionnel ou encore l’e-learning.

 


Eric Hazan : Dans un contexte d’émergence d’une nouvelle technologie, nous assistons toujours à une phase de “hype”, puis de rationalisation et enfin de décollage. Certains usages vont exploser quand d’autres vont probablement s’éteindre


 

Défendez-vous un idéal de décentralisation pour parvenir à cette forme d’interopérabilité ?

Nous ne sommes pas là pour prendre parti mais il est vrai que l’interopérabilité nous permettrait de mieux analyser le phénomène. Meta va investir plus de 10 milliards de dollars dans les prochaines années mais cela reste toujours moins de 10% de ce qui a déjà été investi dans le secteur au premier semestre 2022. De manière générale, de nombreuses entreprises s’y intéressent : 57% d’entre elles testent déjà des cas d’usage dans le métaverse et 25% estiment que cela représentera 15% de leur chiffre d’affaires d’ici 5 ans.

Est-ce que le métaverse signe pour vous la fin des canaux physiques de vente ?

Je ne pense pas que cela signe la fin du canal physique de vente et c’était déjà ce qu’annonçait la révolution e-commerce. En revanche, cela permettra sans aucun doute de délivrer une expérience plus fluide et de manière omnicanale. Je crois que le métaverse sera davantage placé sous le signe de l’hybridation, à l’image des lunettes connectées qui nous permettront de voir à la fois le réel et le virtuel.

Il s’agira d’un canal complémentaire de vente, de communication ou de marketing et je pense que la majeure partie du public le considère comme une opportunité plutôt qu’une menace. Nous sommes déjà dans un monde où le digital existe et a un impact dans le monde physique. Ces deux mondes resteront toujours complémentaires.

Bernard Arnault a récemment déclaré : « Nous ne sommes pas intéressés à vendre des baskets virtuelles à 10 euros. Nous ne sommes pas là pour ça », tout en faisant référence aux déboires spéculatifs qui ont contribué à l’éclatement de la bulle internet des années 2000. Qu’en pensez-vous ?

Dans un contexte d’émergence d’une nouvelle technologie, nous assistons toujours à une phase de “hype”, puis de rationalisation et enfin de décollage. Certains usages vont exploser quand d’autres vont probablement s’éteindre. Encore une fois, il est tout à fait admis d’être sceptique mais à mon sens être réticent à l’idée de tester, c’est ne pas être sur la ligne de départ au même niveau que les autres.

Je pense que le point de basculement arrivera d’ici deux ou trois ans car nous sommes encore en phase de test. Mais de toute manière, il faut bien garder en tête qu’au moment de la bulle Internet, beaucoup s’en sont détournés et ceux qui ont continué d’y croire ont effectivement mieux résisté à la vague Web 1.0 notamment en matière d’e-commerce.

Il existe encore plein d’usages qu’on imagine pas : des constructeurs d’avion sont en train de tester de la maintenance dans le métaverse et même les acteurs du bâtiment s’y mettent aussi pour optimiser leurs propres processus. Tout cela ressemble grandement aux cas d’usage imaginés au début de l’intelligence artificielle et mon conseil aux entreprises est de se lancer dès maintenant pour se préparer aux évolutions à venir.

 

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