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Au Nom De L’Efficacité Législative

Les propositions se multiplient depuis quelques mois pour réformer la procédure budgétaire. En cause, un calendrier parlementaire parfaitement inadapté pour permettre à l’Assemblée Nationale et au Sénat d’exercer correctement leur fonction de contrôle des dépenses publiques.

Chaque automne, « c’est l’embouteillage législatif » déplorent Eric Woerth et Gilles Carrez, avec l’examen successif du projet de loi de finance en commission des finances, en commissions élargies, puis dans l’hémicycle, avant d’enchaîner sur l’examen de la loi de finance rectificative.

Au total, 70 jours (et autant de nuits) consacrés à travailler sur le budget, alors qu’au printemps le temps accordé aux représentants de la nation pour contrôler la bonne exécution de l’année précédente (loi de règlement) est, quant à lui, réduit à portion congrue.

Comment mettre un terme à ce déséquilibre si nuisible à l’objectif de bon rapport coût/efficacité de la dépense, qui devrait présider à l’élaboration du budget de l’Etat et celui de la Sécurité sociale ?

Derrière Amélie de Montchalin et Laurent Saint-Martin, les députés LREM se rassemblent pour exiger un nouveau calendrier budgétaire, comportant un premier semestre dévolu à l’évaluation des politiques publiques (avec 30 jours d’évaluation et de contrôle de gestion en commission afin de redonner à la loi de règlement toute sa portée) et une session d’automne restant dédiée à la discussion traditionnelle sur les crédits de l’année à venir.

Ce serait une bonne chose. Mais cela ne résoudra pas tous les problèmes, à commencer par celui – bien plus vaste- de la prolifération législative. Trop de textes condamnent aujourd’hui les parlementaires à examiner dans des délais souvent bien trop courts non seulement la loi de finances, mais aussi les textes de lois « ordinaires ». Chaque année, ce sont plus de 40 textes de loi qui arrivent ainsi sur le bureau des assemblées, dont plus de deux tiers sont d’origine gouvernementale.

D’ores et déjà, au premier semestre 2018, on anticipe que sur la vingtaine de chantiers de réformes sur lesquels planchent actuellement le Premier ministre, Edouard Philippe et les équipes ministérielles, environ la moitié donnera lieu à la rédaction d’un projet de loi. Est-ce bien raisonnable ?

Car autant c’est une excellente nouvelle de voir le rythme des réformes structurelles ne pas faiblir cette année après la très bonne entrée en matière qu’ont constitué les Ordonnances Travail l’an dernier, autant il est légitime de s’interroger sur la capacité du Parlement à arbitrer en un temps record sur des changements qui ont vocation à affecter en profondeur la vie des Français et des entreprises.

D’autant que chaque loi suscite en obligations et contraintes diverses pour les particuliers et les sociétés bien plus que les articles qui la composent. Les Ordonnances Travail ont ainsi généré la bagatelle d’une vingtaine de décrets d’application, tous adoptés avant la fin de l’année 2017.

Cette année, les obligations juridiques vont pleuvoir sur les TPE-PME à la même vitesse que celle qu’un pilote de Formule 1 mobilise pour boucler un tour de circuit : d’ores et déjà, et sans attendre l’impact des réformes du présent quinquennat, les entreprises doivent adapter, avec d’importants coûts à la clé, leurs procédures internes au devoir de vigilance issu de la loi du 27 mars 2017 ou encore au durcissement de la lutte anticorruption visée par la loi Sapin II, entrée en vigueur en milieu d’année dernière.

S’y ajouteront encore toutes les obligations issues des actes I (Ordonnances Travail) et II des réformes sociales (formation professionnelle, apprentissage…) décidées par l’actuel gouvernement. Sans compter l’entrée en vigueur au 25 mai prochain du Règlement européen sur la protection des données personnelles (RGPD) qui se révélera être une extraordinaire machine à gaz.

La coupe sera pleine avec la préparation du prélèvement à la source, applicable au 1er janvier 2019, reposant sur un calendrier très tendu, qui va laisser très peu de temps aux TPE-PME, rarement dotées d’un département juridique, pour bien se préparer.

Nous sommes convaincus que ces nouvelles obligations législatives et réglementaires vont encore réduire le temps au quotidien que nos entreprises pourront consacrer à innover et se développer.

Nous voulons croire aussi qu’il existe des alternatives pour « transformer l’économie et la société » sans passer systématiquement par la voie législative.

Au nom de l’efficacité législative, nous réclamons d’abord plus de frugalité normative

Dans un certain nombre de cas, qu’il nous appartient de répertorier, en référence notamment aux autres pratiques internationales, la « soft law » vaut bien une loi !

Au nom de l’efficacité législative, nous demandons, lorsqu’un texte de loi s’impose en définitive, à ce que le législateur prenne mieux en compte les conséquences économiques et financières de ses actes sur les petites et moyennes entreprises, afin de ne pas faire peser sur celles-ci des charges inutiles.

Au nom de l’efficacité législative et du respect de la fonction de contrôle du gouvernement qui incombe au Parlement, nous proposons que les études d’impact des lois soient conduites de manière (véritablement) indépendante, et en prenant le temps de consulter de manière approfondie et précise les dirigeants d’entreprise. Ce n’est pas le cas aujourd’hui en dépit des obligations qui s’imposent aux administrations depuis la loi organique du 15 avril 2009, qui n’est appliquée qu’en surface.

C’est tout le sens du combat que nous engageons ensemble dans le cadre d’un nouvel organisme que nous venons de créer – « l’Institut Anaxagore ». Nous nous donnons pour objectif dès cette année de conduire plusieurs études d’impact de lois susceptibles d’avoir d’importances incidences sur la vie des entreprises françaises, et donc d’entraver leur développement.

Ce travail objectif et indépendant se fera en pleine coordination avec les entrepreneurs de toutes tailles et de tous secteurs d’activités. Il comportera une phase d’écoute active, numérique et ad hoc, d’eux-mêmes et de leurs représentants au sein des organisations professionnelles.

Notre initiative et ses résultats sont placés au seul service d’une cause qui doit tous nous mobiliser en 2018 : faire grandir les entreprises françaises, en leur offrant un environnement administratif et réglementaire toujours plus favorable.

 

Ecrit par Thibault Lanxade et François Perret 

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