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Nonhlanhla Joye, L’Entrepreneure Qui Combat La Faim Dans Les Townships Sud-Africains

©Erwan Floch

Jeudi soir à Paris, elle était en concurrence avec huit autres entrepreneures du monde entier. Lors de la sixième édition d’Impact², aussi appelé le Davos de la nouvelle économie, Nonhlanhla Joye a remporté l’award de la femme entrepreneure de l’année. Ancienne herboriste, elle a mis au point un système permettant de cultiver des légumes bio dans les bidonvilles sud-africains. Rencontre avec une militante déterminée à éradiquer la faim.

Sur scène, elle n’a pas feint la surprise quand son nom a été prononcé et que Muhammad Yunus s’est avancé vers elle avec son trophée. Dans la somptueuse salle de l’Hôtel de ville, face à un public enthousiaste applaudissant à tout rompre, Nonhlanhla Joye a savouré l’instant. Après une accolade appuyée au Prix Nobel de la Paix, elle a saisi le micro : « C’est le moment le plus important de ma vie. Je ne parle pas pour moi, mais pour les huit millions d’estomacs vides qui pourraient être remplis simplement avec un petit jardin. Je ne sais pas quoi dire à part : merci. »

Un jardin devenu business

Quelques instants plus tard, en coulisses, Nonhlanhla Joye est encore ébranlée par sa consécration. Comme beaucoup d’entrepreneurs à succès, l’histoire de son entreprise, Umgibe, est intimement liée à son histoire personnelle. Aujourd’hui âgée de 51 ans, cette sud-africaine n’a pas appris à cultiver son jardin par hasard. Il y a deux ans, alors mère de deux enfants et jeune grand-mère, elle découvre qu’elle est atteinte d’un cancer. « Je suivais mon traitement de chimiothérapie et je n’avais aucun revenu. Comme il fallait que je mange sainement et que je mette de la nourriture sur la table pour ma famille, j’ai décidé de faire pousser des légumes. J’ai fait des plantations dans mon jardin, mais les poulets mangeaient absolument tout. J’étais dévastée », explique-t-elle. C’est alors qu’une idée émerge : faire des plantations dans des sacs en plastique suspendus et remplis de terreau. Le principe est simple, mais fonctionne. Rapidement, Nonhlanhla Joyce récolte bien plus que ce dont elle a besoin, et transforme son mode de plantation en business. « J’ai vite réalisé que c’était un moyen de gagner de l’argent. J’ai commencé à emballer mes légumes, j’ai fourni des restaurants, l’hôpital… Mais je savais que je n’avais pas les capacités de faire ça seule et j’ai sollicité mes voisins. » Aujourd’hui, près de 400 familles réunies au sein de coopératives cultivent des légumes grâce à ce système. Pour étendre sa production, l’entrepreneure est également à la tête d’une plantation de huit hectares dans la région de Richmond.

« Je ne fais pas de la charité »

Si l’entreprise Umgibe vient en aide aux habitants des townships, Nonhlanhla Joyce insiste sur un point : « Je ne fais pas de la charité. » Sa démarche est bien plus pragmatique. « Je forme des entrepreneurs qui cultivent des légumes, les transforment si besoin et les vendent. Nous retirons collectivement les bénéfices de cette démarche », détaille-t-elle. Si elle permet à chaque personne de gérer son business, le label Umgibe garantit une production bio et locale de qualité. Au-delà des townships d’Afrique du Sud, Nonhlanhla Joyce veut éradiquer la faim dans le monde. « Si j’avais plus d’argent, j’installerais ces structures dans tous les quartiers pauvres. J’ai une certitude : la faim n’a pas de couleur, elle ne discrimine personne. La sécurité alimentaire est la chose la plus importante au monde », assure-t-elle, avant de poursuivre avec force : « Si je pouvais voir les habitants de tous les foyers, surtout les bébés, s’endormir avec quelque chose dans l’estomac, ce serait un monde parfait pour moi. » Ce jeudi soir, en recevant un prix des mains de Muhammad Yunus, véritable source d’inspiration, elle s’est un peu plus rapprochée de son rêve. Celle qui a déjà connu et vaincu la faim puis le cancer, se passionne pour sa nouvelle bataille : faire progresser la sécurité alimentaire à l’échelle de la planète.

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