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L’héroïne de « Ratée Sans Avenir » Est l’Ambassadrice De La Génération Y

© Charlotte Barraud

« Ratée sans avenir » – RSA pour les intimes –, c’est une websérie décalée qui brosse avec humour le portrait d’une jeunesse précaire. Dans le premier épisode, Caro fête ses 25 ans et jubile en recevant le RSA pour la première fois. La suite de ses aventures, où elle va forcément déchanter, sera diffusée en septembre prochain. Grâce à une campagne de crowdfunding réussie, les créatrices de la série, la comédienne Caroline Chirache et la scénariste Emilie Contensou, vont financer la première saison. En attendant les nouveaux épisodes, nous avons discuté précarité, RSA et génération Y avec elles.

Pourquoi avoir choisi de réaliser une websérie humoristique sur la précarité des jeunes ?

Caroline Chirache : Nous nous sommes inspirées de nos vies. A la fin de nos études, nous étions, comme la plupart des jeunes, lâchées dans la jungle du RSA, à enchaîner les petits boulots pas franchement épanouissants. En étant toutes les deux au RSA, nous avions réunis pas mal d’anecdotes marrantes sur Pôle emploi et les conseillères qui y travaillent.

Emilie Contensou : Cette période est un moment de désenchantement. La vie étudiante est synonyme d’enrichissement intellectuel et social, mais quand on se retrouve à devoir travailler, les gens se plaignent des horaires, des tâches sans intérêt… Le personnage de notre série a gardé son idéalisme et se heurte au monde du travail.

L’héroïne de la série est-elle représentative de la génération Y ?

E.C. : Elle est un peu l’ambassadrice de cette génération qui est dans une phase d’entre deux. Elle est résignée parce qu’elle n’a pas une grosse motivation à se lancer dans la vie active, mais est même quand obligée de s’engager. Elle incarne cette peur de devenir adulte.

C.C. : Avec ce personnage, nous voulons changer le regard sur les jeunes qui ne travaillent pas. Nous voulons montrer que ce n’est pas par choix ou parce qu’ils se donnent pas assez qu’ils se retrouvent dans cette situation.

Est-ce que cela signifie que pour cette génération être au chômage n’est plus stigmatisant, mais au contraire complètement normal ?

E.C. : C’est un peu devenu la case obligatoire. Je connais très peu de jeunes autour de moi qui ne sont pas passés par cette phase chômage ou RSA. Les gens de l’âge de nos grand-parents nous demandent pourquoi on a toujours pas signé de CDI à presque 30 ans, mais ce n’est plus vraiment comme ça que ça marche. La série montre la pression sociale des générations précédentes à laquelle l’héroïne doit résister. Dans notre société, le travail a une valeur considérable et dès qu’on en a pas, on est catalogué comme un looser.

En France aujourd’hui, les jeunes femmes sont-elles plus susceptibles d’être des « Ratées sans avenir » que leurs homologues masculins ?

E.C. : Les hommes peuvent aussi se reconnaître dans le personnage de Caro. La difficulté pour les femmes apparaît surtout quand elles sont confrontées aux inégalités de salaires. Dans la recherche d’emploi, la seule différence pour les femmes est la question : est-ce que vous prévoyez d’avoir des enfants ?

Nous sommes en pleine campagne présidentielle. Pensez-vous que la thématique de la précarité des jeunes est suffisamment présente dans le débat politique ?

C.C. : Honnêtement, non. Quand j’écoute les candidats, ils parlent de l’éducation au collège, au lycée et à l’université, ils évoquent les demandeurs d’emplois, mais pas les jeunes précaires.

E.C. : C’est un sujet vraiment sous-estimé, alors que c’est extrêmement important : les jeunes sont l’avenir du pays ! C’est un peu étonnant que les candidats ne s’engagent pas plus sur ces sujets-là.

Vous-mêmes, vous appartenez à la génération Y. Une solution pour résoudre le problème de la précarité des jeunes ?

C.C. : Peut-être qu’il faudrait revaloriser un peu les formations universitaires. Quand j’étais au lycée, on nous conseillait de faire une école de commerce pour trouver un travail, or c’est un coût que tout le monde ne peut pas se permettre. À la fac, à part certaines filières comme droit ou médecine, les stages ne sont pas obligatoires et on est déconnecté du monde du travail. Je trouve qu’il y a une petite hypocrisie, parce qu’il y a beaucoup de formations universitaires et finalement tout ce qu’on nous suggère, c’est de devenir prof.

E.C. : Je ne suis pas économiste, mais il me semble qu’un meilleur partage du temps de travail ou le revenu universel que propose Benoît Hamon sont des idées intéressantes. Revaloriser ce que les jeunes font à côté devrait aussi être envisagé. Le fait d’être au RSA nous a permis de développer une websérie, de nous engager dans des associations : de faire des choses qui font avancer la société autrement qu’en travaillant avec un salaire.

 

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