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Céline Cortel, Agricultrice Éco-Responsable 

éco-responsableagroforesterie et alcool à betterave éco-responsable pour les groupes de cosmétiques

Luxe et éco-responsabilité ne sont pas incompatibles. En Picardie, fief incontestable de la betterave sucrière, Céline Corpel, agricultrice, a planté en bordure de champ de ses parcelles 2 209 arbres pour régénérer ses sols et produire de l’alcool de betterave durable. Un projet initié par le groupe Clarins pour leurs parfums (Azzaro, Mugler) qui marque une étape cruciale… celle d’une collaboration autour de valeurs communes, qui favorise lʼinnovation mais aussi un lien social et humain. Rencontre avec une femme inspirante.

Encore expérimental, avec 17 hectares de plantation, ce projet d’agroforesterie de la ferme Rémicourt consiste à puiser dans les arbres qui stockent le carbone et favorisent la biodiversité les ressources pour empêcher l’appauvrissement de la terre. Soutenue par le groupe de cosmétiques Clarins qui souhaite, selon Christian Courtin-Clarins, favoriser « des solutions naturelles face au  grand nombre de matières premières de grande qualité qui sont mises en danger par les dérèglements climatiques et la dégradation des écosystèmes. », Céline Corpel compte creuser plus profondément  son sillon dans le développement durable en généralisant sa production d’alcool de betterave éco-responsable.

Désirée de Lamarzelle : Les femmes agricultrices sont-elles encore rares en France?

Céline Corpel : On est minoritaire mais pas seule. Nous représentons 25 % des responsables de ferme, dont beaucoup sont « filles d’agriculteur » comme moi, puisque j’ai grandi dans cette ferme. Je l’ai quittée pour faire des études parisiennes où j’ai exercé un autre métier pendant quinze ans (conseil en SS2I).

Vous saviez que vous alliez reprendre la ferme familiale ?

C.C.: Non, même si j’avais suivi des études d’ingénieur agronome. Je vivais à Lyon avec mes quatre enfants et je ne pensais pas reprendre les reines de Rémicourt. On me demande très régulièrement pourquoi j’ai fait ce choix alors que j’aurais pu faire plein d’autres choses. Les réponses sont multiples : il fallait quelqu’un pour reprendre le ferme familiale, j’avais envie d’essayer et j’étais également tentée par l’entrepreneuriat.

Quelle est la valeur ajoutée d’avoir exercé un autre métier avant ?

C.C.: J’ai une autre approche avec de nouveaux éclairages sur le métier, mais je suis passée par une vraie phase d’apprentissage pour combler mes lacunes techniques. Il faut rester humble dans ce métier.

Comment avez-vous développé votre conscience écologique ?

C.C.: Cette conscience m’a toujours nourrie, même si elle s’affirme de plus en plus avec les années. Lors de mes études d’agro, j’avais été sensibilisée à l’environnement et à la gestion de biens communs : la qualité de l’eau, du paysage, et de l’air. Tous ces sujets transverses de l’environnement qui pointent la complexité des systèmes vivants m’amènent à penser que l’on ne peut pas réduire la production agricole à quelque chose de trop linéaire. Aujourd’hui avec l’agroforesterie, je m’inspire de la nature pour régénérer mes sols. Si je ne fais rien, mes parcelles vont s’appauvrir et ne plus rien produire. L’attention portée à la conservation des sols est un sujet qui préoccupe de plus en plus les agriculteurs.

 Et comment le passage à l’agroforesterie s’est-il fait ?

C.C.: Il faut utiliser la nature plutôt que lutter contre elle. J’étais persuadée que l’agroforesterie était pertinente avec mes cultures (betteraves, céréales, blé, orge, colza, luzerne, chanvre, épeautre) mais mettre en œuvre ce projet demande du temps. Il faut d’abord comprendre comment fonctionnent nos parcelles, mais aussi l’environnement technique et économique de la région. Il faut connaître les personnes qui achèteront les productions et celles qui vous assisteront techniquement. Quand j’ai rencontré, au Salon Produrable, Tristan Lecomte de Pure Projet, une entreprise qui accompagne les entreprises – dont Clarins qui soutient financièrement mon projet – dans l’intégration de la problématique du climat, cela a été le déclic pour me lancer.

Comment se passe votre collaboration avec Clarins ?

C.C.: Elle est encore expérimentale car il faudrait sept fois une ferme comme la mienne pour fournir en tonnage de betteraves l’alcool nécessaire à tous les parfums chez Clarins. J’ai cette année ma première récolte – deux ans après avoir planté les arbres –  de ma surface de plantation dédiée (17 hectares). Cette première expérience permet d’évaluer l’impact de l’alignement des arbres dans mes champs, mais aussi comment améliorer la chaîne de production entre ma récolte, l’industriel et Clarins, pour développer à plus grande échelle une filière d’alcool responsable et bio.

Quel bilan faites-vous de cette expérience d’agroforesterie en partenariat avec une entreprise ?

C.C.: C’est un succès. Le métier d’agricultrice est parfois dur, et si les fermes céréalières ont longtemps bénéficié de cette image de profitabilité, la réalité est autre avec un marché compliqué ces dernières années. Il faut rester vigilante et se tourner vers l’avenir. Dans ce contexte, le projet avec Clarins était pour moi une source de motivation et même un soutien moral : c’est important de sentir que ce que l’on fait est bénéfique pour la terre et qu’il y a des gens qui nous soutiennent.

Avez-vous d’autres projets ?

C.C.: Je veux continuer à nourrir les hommes tout en régénérant ma terre avec d’autres projets d’agriculture à l’instar des australiens (le keyline design) : planter les arbres en suivant les courbes de niveau qui retiennent l’eau et permet de répondre à la menace de la pénurie d’eau. L’arbre est assez magique il ne demande pas d’énergie et donne beaucoup, c’est un excellent ouvrier autonome !

* ferme de Rémicourt

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