EDUCTECH | Marianne Joly et Ana-Maria Megelea sont co-fondatrices de Corneille. Lancée en 2020, Corneille est une application ludique d’apprentissage de la lecture pour les enfants de 3 à 8 ans proposant un parcours personnalisé d’apprentissage ainsi qu’une large bibliothèque numérique, offrant des titres Corneille, mais également des titres d’éditeurs partenaires (Bayard/Milan). L’application comprend plus de 200 activités de lecture suivant les recommandations de l’Éducation Nationale, plus de 100 histoires à lire ou à écouter dans la bibliothèque numérique.
Le projet Corneille est le fruit de plusieurs mois de travail, de réflexion et d’une nécessité que Ana-Maria Megelea et Marianne Joly ont constatée. Ana-Maria Megelea, maman de deux enfants, polytechnicienne et ingénieur généraliste a ressenti le besoin en tant que maman d’accompagner ses enfants dans l’apprentissage de la lecture. Marianne Joly a fait des études de littérature moderne et s’est spécialisée dans l’édition jeunesse, plus particulièrement les 6-12 ans. « J’ai été salariée dans une maison d’édition pendant sept ans puis en freelance pendant dix ans avec plusieurs maisons d’édition sur le secteur jeunesse sur les premières lectures 6-12 ans », précise-t-elle. De plus, Marianne a enseigné le français langue étrangère aux Etats-Unis en parallèle. « Avec Marianne, on nous appelle souvent les chiffres et les lettres ! On se connaissait auparavant, on a vu ce qu’il y avait sur le marché anglophone et on s’est retrouvé sur des valeurs communes autour de la lecture. Et là, Corneille est née », explique Ana–Maria. En s’associant, les deux femmes ont puisé leur force dans la complémentarité des points de vue. L’aventure entrepreneuriale peut se révéler bien complexe comme en témoigne Marianne : « on donne toujours une vision powerful des entrepreneurs, la vie des entrepreneurs est dur. Mais le fait de construire un projet à deux, c’est essentiel. Pour moi, le faire tout seul relève du miracle. On a eu des moments d’abattements qui n’étaient pas les mêmes, surtout dans des phases de levée de fonds où l’on va au fond du projet ». Les deux femmes ont pu ainsi se soutenir et créer une équipe à leur image avec cinq salariés et cinq freelances aux caractères et compétences très différents. « Ils sont engagés depuis le début, c’est un point très positif, il y a un projet de fond qui relie tout le monde », explique Marianne.
Dès lors, Corneille est devenue leur activité principale. Les deux entrepreneuses, qui confient s’engager à 400 % dans ce projet, se sont renseignées sur les chiffres de l’illettrisme. Des indicateurs les ont notamment alerté sur l’urgence d’apporter un soutien dans l’apprentissage de la lecture.
« Une application qui transforme le temps d’écran en temps de lecture »
Corneille tient compte d’une double cible : les parents et les enfants. L’application va embarquer le parent dans le projet pédagogique et l’enfant dans ses apprentissages par le jeu. Les parents créent un profil de leur enfant, ils découvrent ensuite une partie gratuite qui représente environ une heure d’apprentissage et de jeu. Pour avoir accès à la proposition complète, Corneille propose un passage en abonnement avec sept jours gratuits. À travers leur application, elles ont accès aux parcours des enfants. « On a beaucoup de retours des parents, on développe l’application main dans la main avec certains d’entre eux. Grâce à leurs retours et nos discussions, cela nous permet d’améliorer l’application ». Marianne et Ana-Maria ont eu à cœur de développer une application très calme. On y retrouve un design graphique très épuré et très peu feedback sonores ou visuels. « Quand un enfant rentre en lecture, il a une charge cognitive qui est très lourde parce qu’apprendre à lire lui prend tout son cerveau, on n’a pas envie qu’il soit sur-sollicité par d’autres feedbacks, c’est très important. Tous les professionnels de l’enseignement le disent », précise Marianne. « L’idée était aussi de développer quelque chose pour les apaiser émotionnellement. On est face à des enfants qui sont très jeunes donc on n’a pas envie de leur proposer quelque chose de trop violent. De plus, les enfants restent dans l’application, car ils peuvent créer un lien particulier avec un petit avatar qui est leur compagnon de lecture et qui va les suivre tout au long du parcours, c’est très ludifié. Ils peuvent toujours interagir avec cet avatar et jouer avec lui », ajoute-t-elle. L’un des aspects fondamentaux pour les deux femmes était de concevoir une application qui se détache du système scolaire. Il n’y a pas d’échec dans l’application, l’enfant ne sera jamais bloqué dans une situation d’échec, il pourra toujours progresser. « On va lui donner une clé pour avoir la bonne réponse parce qu’on n’est pas a l’école, on est un produit qui accompagne l’école. On a pas mal d’utilisateurs qui sont des enfants en difficulté d’apprentissage, donc on ne veut surtout pas les remettre dans une situation d’échec. Notre algorithme retient l’échec et re propose le phonème qui a été échoué, mais l’enfant ne vit pas cette situation d’échec dans l’application », explique Marianne.
Corneille a récemment levé 500 000 euros pour enrichir le contenu existant, développer sa stratégie marketing et se déployer à l’international, notamment auprès des écoles françaises à l’étranger notamment aux États-Unis et au Canada. Alors que la lecture a été déclarée Grande Cause Nationale 2022 et que le secteur de la edtech connaît une forte croissance depuis la crise sanitaire, la plateforme Corneille a annoncé la finalisation de sa première levée de fonds pre-seed. Corneille est soutenue dans son envol par trois réseaux de business angels : WeLikeAngels-Investessor, BADGE et Arts et Métiers Business Angels, mais aussi par Bpi France. Ces fonds seront employés pour accélérer la croissance de l’application. « Nos investisseurs nous soutiennent et pensent la même chose que nous. On a deux femmes dans le Conseil de surveillance qui viennent du réseau de We like Angels. Ils sont très sensibles au niveau graphique, à ce que l’on peut proposer, et puis ils nous aident dans la partie ingénierie financière. L’idée est de chercher quelle typologie de parents adhère au projet pédagogique. Derrière, nous voulons faire une deuxième levée, une série A d’ici 18 mois », annoncent-elles. « Pour les trois réseaux, c’était important d’investir dans un projet autour de la lecture, de l’éducation et portée par deux femmes. On est une entreprise avec un message où l’on croit très fort à l’importance de la lecture. C’est un véritable enjeu de société ».
Pour les deux mamans, la période du Covid-19 a été plutôt bénéfique à leur business. Elles ont lancé la première version après le confinement. Marianne et Ana-Maria avaient déjà un discours de dédiabolisation des écrans. « On trouvait que les écrans étaient très décriés avant le confinement et nous avions déjà à cœur de dire que le problème venait plutôt du contenu. Après le confinement, pour les parents comme pour l’Éducation nationale, il y a eu un vrai revirement de situation, l’école s’est faite à distance et tout le monde s’est rendu compte de cette nécessité. Il y a eu ce changement de posture qui est hyper important pour nous, nous voulons avec Corneille offrir du contenu intelligent pour les enfants. Nous voulons transformer le temps d’écrans en temps de lecture », expriment-elles. À l’avenir, les fondatrices de Corneille souhaiteraient avoir un million et demi d’utilisateurs dans les trois ans, une base d’abonnés solide et avoir un impact aussi bien national qu’international.
<<< À lire également : La revolution proptech sonne t-elle le glas des agences traditionnelles ? >>>
Vous avez aimé cet article ? Likez Forbes sur Facebook
Newsletter quotidienne Forbes
Recevez chaque matin l’essentiel de l’actualité business et entrepreneuriat.
Abonnez-vous au magazine papier
et découvrez chaque trimestre :
- Des dossiers et analyses exclusifs sur des stratégies d'entreprises
- Des témoignages et interviews de stars de l'entrepreneuriat
- Nos classements de femmes et hommes d'affaires
- Notre sélection lifestyle
- Et de nombreux autres contenus inédits