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Pourquoi Les Entrepreneurs Français Ne Prennent (Quasiment) Pas De Vacances

(AUSTRALIA & NEW ZEALAND OUT) A holiday maker surfs the internet poolside, 19 December 2005. AFR Picture by PHIL CARRICK (Photo by Fairfax Media via Getty Images)

Considérée – à juste titre – comme une « semaine morte », la période de battement entre Noël et le jour de l’an permet-elle aux entrepreneurs de relâcher la pression et de faire un véritable break ? Si pour certains la rupture avec le quotidien est nécessaire et salvatrice, d’autres, en revanche, continuent d’avancer et ne s’accordent que de fugaces moments de répit… mais jamais très loin du travail. Témoignages.

Lors de leur première année d’activité, 90% des entrepreneurs ne prennent aucun jour de repos, trop occupés à ciseler et porter sur les fonts baptismaux un projet dans lequel ils se sont investis corps et âme. Mais même au sortir de leur  « baptême du feu », ils sont près de 89% à reconnaître travailler durant leurs congés, selon une enquête MMA Santé de 2015. Un constat implacable mais peu étonnant  au regard de la « montagne » de travail engendrée par la création d’une nouvelle structure ou le lancement d’un produit sur le marché, véritable « juge de paix » du sacerdoce entrepreneurial. Une étude Vistaprint – consacrée aux vacances d’été, mais l’enseignement est peu ou prou similaire – pousse le curseur encore plus loin et juge que la majorité des entrepreneurs français est psychologiquement et physiquement épuisée. Du reste, 60 % des entrepreneurs trouvent que gérer leur entreprise est émotionnellement épuisant. Les chefs de petites entreprises savent que prendre des vacances est bénéfique pour leur santé et pour leurs performances.  Autre fait notable : la santé mentale est la plus grande victime de l’entrepreneuriat puisque 59 % des entrepreneurs ont déjà fait l’expérience de troubles du sommeil liés à la gestion de leur société et 57 % ont senti une augmentation de leur niveau d’anxiété depuis qu’ils sont leur propre patron. Edifiant.

Un état de stress permanent dont sont victimes plusieurs néo-entrepreneurs, encore davantage lorsqu’ils mettent la dernière main à un projet qui doit voir le jour quelques temps après la trêve des confiseurs. C’est notamment le cas de Justine Chrétien, jeune créatrice, à la tête de la structure prochainement créée et baptisée « Good Old Days », et  qui peaufine sa première collection et ajuste les derniers détails. Une période particulièrement dense émotionnellement parlant. Doux euphémisme. « Au départ, j’avais décidé de prendre quelques jours de vacances (du jeudi 21 décembre au mardi 26) », commence la jeune femme.  Un « vœu pieux » puisque cette doléance s’est finalement heurtée au principe de réalité.« Mais malheureusement, dès jeudi qui était censé être mon premier jour de vacances, j’ai dû me rendre à l’atelier de fabrication le matin avant de bosser toute la journée de vendredi pour faire les retouches photos de nos shootings ».  Seule la journée du dimanche du 24 décembre sera consacrée au repos… avant de « repartir au front » dès le 25 à 13h30. « sans relâche jusqu’à minuit ». Même « l’instant détente » du lendemain, en compagnie de sa mère, sera parasité. « Pendant ce moment qui aurait dû faire office de sas de décompression, l’atelier n’arrêtait pas de m’appeler pour me faire remonter des choses négatives. J’avais la tête complètement ailleurs. Résultat, je suis encore plus stressée que jeudi dernier ! », appuie Justine Chrétien.

Introspection et nouveaux projets

A l’inverse, d’autres essaient justement de renouer avec la sérénité… tout en gardant une partie de leur esprit actif et « connecté » avec leur entreprise. Stéphanie Delpon – dont vous pouvez retrouver le portrait ici -, l’une des deux têtes pensantes de Pictoresq, un duo créatif et artistique «  à visage humain », en est l’exemple parfait. La jeune femme profite de cette fin d’année pour prendre un peu de recul.  « J’essaie de voir ce qui a fonctionné, ce qui a moins marché. Ce qui est perfectible. Et surtout j’écris mes désirs, mes envies pour cette nouvelle année pour Pictoresq ».  Un cahier de doléances dont elle nous livre le modus operandi. « Cette semaine, j’ai pris du beau papier et mon stylo plume et j’ai écrit mes désirs pour 2018. Ce ne sont pas vraiment des résolutions de travail. Mais il s’agit tout simplement de retranscrire tout ce dont j’ai très envie pour cette nouvelle année. Une liste de désirs ». Tout en prenant grand soin de ne pas partir à la conquête de ses souhaits à tombeau ouvert. « Une fois ma liste écrite, je m’efforce de ne pas passer en mode exécution tout de suite. Je laisse mûrir un peu. Et j’attends au moins la semaine prochaine pour m’y atteler ! ».

Si du côté de Stéphanie Delpon le repos est partiel, il est, en revanche, plus prononcé pour Arthur Tutin, instigateur de la « Wine Tech », à savoir l’union des start-up viticoles, mais également à la tête de l’entité TrocWine qui permet le troc de bouteilles entre particuliers. « Pour moi c’est déconnexion totale en Forêt Noire ! Cela me permet de me recentrer sur le principal : une activité physique régulière et de longues lectures inspirantes tout en respirant le bon air… Un regain pour le corps et l’esprit ! » Mais là aussi, en dépit de ce cadre bucolique, le travail peut refaire surface à tout moment. « Mes projets pour la rentrée restent dans un coin de même tête, notre site TrocWine va ainsi faire peau neuve prochainement et je m’attelle également au lancement d’un nouveau magazine ».  Se ressourcer dans des contrées lointaines, loin du stress du quotidien, est également le parti pris de Loïc Le Meur, installé aux Etats-Unis, et qui a marqué les esprits en 2017 avec le succès à Paris de sa conférence Leade.rs, événement destiné à mettre en lumière les talents de demain. « Pour moi, c’est  Kite-surf à Tulum au Mexique avec les enfants ».

Les tâches administratives au menu

Billy Chevallereau, l’un des deux figures de proue des « French Vikings », jeune start-up prometteuse proposant une gamme de mobilier en béton au design soigné et épuré, s’est également accordé un moment de répit après une année surchargée. « On a un peu levé le pied cette semaine pour recharger de la grosse période précédente. On en profite pour passer un peu de temps en famille et sortir la tête du guidon pour réfléchir aux prochains projets de 2018 ». Après avoir lancé une gamme de coffrets pour réaliser ses meubles soi-même, à domicile, l’entrepreneur planche sur une nouvelle mouture de kit à réaliser à la maison. Enfin, pour les entrepreneurs, la fin d’année rime également avec contraintes administratives et moult paperasses à remplir.  C’est le lot de Zineb Zakraoui, maître d’œuvre des chaussures en cuir tatouées BadSeed – prochainement sur le marché -, qui profite de cette semaine d’accalmie pour s’acquitter de ces tâches. « Cette période de battement, bien que dédiée au travail, est peut-être davantage dévolue aux activités plus récréatives, qui ne nécessitent pas une grande mobilisation intellectuelle. J’en profite également pour faire ma planification trimestrielle et répondre aux obligations administratives légales (soldes, tva, inventaires, etc) ».  Toujours sur le qui-vive. « C’est ça la vie d’entrepreneur ! », conclut Justine Chrétien.  Rendez-vous l’année prochaine.

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