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Chronique d’Effectuation #10 : Merito, Contre La Trime Qui Ne Paie Pas

Par Getty Images

Aujourd’hui, vous êtes gérant d’un grand magasin. La responsabilité d’un bataillon de vendeurs, magasiniers, caissiers et responsables de rayons pèse sur vos épaules. Il est lundi huit heure et le magasin s’éveille. Vos premiers clients trépignent devant les portes et vous êtes pr… Crac ! Quoi ? Non ? Il n’a pas osé ? « Encore ? » Votre fidèle lieutenant du rayon bricolage vous informe que Michel s’est une fois de plus foulé la cheville à son match de football du samedi. A force de se prendre pour Neymar, c’est le magasin qu’il va mettre sur les rotules. « Ah non ! Trop c’est trop ! » Il va encore falloir faire appel à des intérimaires. Vous connaissez la chanson : ils coûtent chers, font semblant de travailler et à peine formés sont déjà partis. Mais que faire ? Ces tronçonneuses ne vont pas se vendre toutes seules… Merito a la solution.

 

 

En deux mots. Job mal acquis ne profite jamais.

Et oui, vous entendez bien ! Il existe une solution : Merito, la start-up parisienne spécialisée dans le recrutement personnalisée de vendeurs pour contrer le turnover et l’absentéisme du personnel. Elle propose aussi une solution software-as-a-service (SaaS) de mobilité temporaire et volontaire des salariés pour une gestion plus efficace du personnel à destination des grands groupes. Avec une levée de fonds de 700 000 euros et un taux de satisfaction de plus de 95%, la start-up fondée en 2016 espère tripler son chiffre d’affaires en 2017.  Son équipe de 13 personnes entend bien capitaliser sur leurs 40 grands groupes-clients. Pierre Maury, l’un des cofondateurs, nous raconte comment Merito compte croître dans un marché « très concurrentiel bientôt en guerre ».

En deux mots. Job mal acquis ne profite jamais.

Turnover, absentéisme, sous-effectif. Trois maux qui touchent les magasins dans la gestion de leur personnel. Malgré une identification répétée, les agences d’intérimaires utilisent toujours les mêmes méthodes. Pierre est bien au fait de ces manquements. Ex-chasseur de tête, il nous confie : « On recrute toujours comme il y a 50 ans, la seule différence c’est qu’au lieu d’envoyer son CV par la poste, on l’envoie par mail ».

Le véritable besoin est dans la création d’un outil fiable de recommandation de profils disponibles pour rapidement prendre la relève. Pour Pierre, il est temps de changer les choses. Mais comment attaquer un marché européen de plus de 17 milliards d’euros tout seul et à partir de rien ?

L’idée. Merito, ça se mérite.

C’est la rencontre avec Marion Nathan qui crée le déclic. Elle est la spécialiste métier dont il avait besoin. Elle a vécu les déboires des équipes de ventes lorsqu’elle était directrice commerciale à Leroy Merlin. Alors quand la rencontre a lieu lors d’un start-up-weekend, c’est le « coup de foudre professionnel ». A ce duo s’ajoute Edouard Baudry, une autre rencontre fortuite mais essentielle car elle leur fournit les capacités techniques à la création de leur plateforme.

Leur idée ? Créer une plateforme basée sur un algorithme de sélection permettant des embauches instantanées pour les magasins en manque de personnel. L’objectif est de jouer les intermédiaires et de ne recommander que les plus méritants. Pour cela, ils emploient un algorithme qui trie non seulement sur la localisation et la disponibilité mais aussi sur les recommandations du précédent manager, l’analyse sémantique de ses évaluations, une vidéo de présentation et l’intérêt pour un univers de marque. La qualité est au cœur de leur projet, c’est même ce qui leur donne leur nom : Merito c’est mérité.

La mise en œuvre. Commercer fort « à la mano » pour arriver à San Francisco.

Mais il faut bien commencer quelque part… On ne peut pas attendre la construction d’une plateforme et se tourner les pouces pendant six mois. L’avenir appartient à ceux qui commencent tôt ! Pierre et Marion démarrent donc leur activité « à la mano ». Pierre démarche les « djeun’s » en mangeant avec eux le midi alors que Marion écume les centres commerciaux afin de mieux cibler les retailers.

Armé d’un Excel et de bonne volonté, ils réalisent un premier placement dès avril 2016, cela avant même d’avoir créé une entité juridique. Les choses s’enchaînent. En septembre ils signent leur premier contrat payé, puis intègrent l’incubateur d’Unibail-Rodamco, l’UR Link. Ce programme leur a permis « d’être plus percutants commercialement et d’ouvrir des portes ». Un euphémisme quand on pense à la masse de vendeurs des centres commerciaux. Et ce n’est pas fini : Merito entre ensuite dans le monde du luxe en rejoignant l’incubateur des Galeries Lafayette.

La réussite leur sourit et c’est un bon moment pour faire le point. La France achète Merito mais avec les Etats-Unis comme prochaine étape d’internationalisation, leur solution est-elle assez complète pour dépasser les frontières de l’Hexagone ? Il n’y a qu’une seule manière de le savoir : aller tester le terrain. Mais ce n’est pas un choix facile pour cette jeune start-up. « Se séparer si tôt d’un des fondateurs pendant des mois, c’est un coup dur pour les opérations. » Malgré les doutes et les inquiétudes, l’équipe  de Merito décide d’envoyer Pierre à San Francisco dans le programme The Refiners pour mettre à l’épreuve leur projet. « C’est un peu la période où nous sommes devenus adultes », raconte Pierre, « le programme est comme un tremblement de terre. A la fin, ce qui reste debout, c’est du solide ». Après une expérience « violente mais efficace », il revient avec une nouvelle brique de développement : leur service SaaS.

Les difficultés. Pauvre comme Job.

Les difficultés d’une start-up viennent de ses ressources limitées. La faible main-d’œuvre ne peut pas suivre l’ambition du projet. C’est cette difficulté à laquelle fait face Merito : ils voudraient un outil complet. Mais pour convaincre des premiers clients et financer les prochaines fonctionnalités, il faut bien leur donner accès à un produit viable. Surtout que le développement IT est connu pour ses aléas : une fonctionnalité promise dans deux semaines peut souvent n’être opérationnelle que trois mois plus tard. La clé pour résister est une construction anticipée de la stratégie commerciale pour élargir peu à peu les fonctionnalités : d’abord « avoir une truc béton » pour ensuite élargir ses compétences.

Une fois, la traction générée et les premiers clients trouvés, le défi suivant est de recruter les bons profils pour la prochaine étape de croissance. Comme pour trouver ses associés, il n’y a pas de recette toute prête. Pierre nous partage que ses meilleurs recrutements tiennent souvent au hasard : une connexion de connexion sur les réseaux sociaux ou un alternant qu’ils ont pu recruter par la suite. 

 

 

Les finances. Du capital disponible et plus si affinités. 

Rares sont les start-up qui peuvent s’autofinancer. Merito ne fait pas exception à la règle. Leur recherche de fonds commence fin 2016 lorsque la start-up cherche à étoffer leur équipe ainsi qu’à compenser la fin des droits au chômage. Si 5 000€ ont suffi pour commencer en 2015, la suite de l’aventure s’annonce tendue. Alors lorsqu’une offre providentielle en décembre leur est faite, c’est un soulagement… même si Merito passe la main. Mais pourquoi ? Tout simplement parce que l’équipe avait plus d’affinités avec ZTP, le family office de la famille Mulliez. Refuser n’est pas simple. « Nous avons toute suite pensé que nous étions stupides » raconte Pierre. Et pourtant, à la signature du financement avec ZTP en mai 2017 pour 700 000€, leur manœuvre se révèle être stratégique et bien pensée. Au final, ils obtiennent des meilleurs termes avec de meilleurs partenaires.

La suite s’annonce pleine de défis pour Merito. Avec les déconvenues du statut d’autoentrepreneur, ses contrats zéro-heure et ses salaires déguisés, Merito table sur une réorganisation du travail pour des employés plus flexibles, mieux formés et plus intéressés par leurs missions. La start-up pense l’emploi non pas à l’échelle d’entité juridique mais à l’aune de la position géographique. Elle compte ainsi se démarquer dans un marché très « crowded » pour aller très rapidement à l’international et capturer des clients en s’intégrant dans leur système de données. Et qui sait ? Peut-être que par ce biais votre barista Starbuck épanoui sera aussi votre vendeur Petit Bateau dévoué et votre personnal shopper passionné des Galeries Lafayette ?

Chronique co-réalisée avec @Jean Rognetta, Directeur de la rédaction de Forbes France et Benjamin Heyriès d’Estimeo

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