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Royaume-Uni : la nationalisation de l’énergie sous les projecteurs alors que les prix de l’électricité s’envolent

Royaume-UniPanneau solaire installé à la campagne le 14 mai 2022 à Upper Arley, au Royaume-Uni. Getty Images

Le Royaume-Uni traverse une crise économique depuis près de six mois, sous l’effet de la flambée des prix de l’énergie. Bientôt, il connaîtra aussi une crise humanitaire. Selon les analystes, plus de 50 % des Britanniques – résidents de la cinquième nation la plus riche du monde – seront en situation de précarité énergétique d’ici octobre, et d’ici janvier, deux tiers auront du mal à payer leurs factures.

 

Il ne fait aucun doute que le gouvernement doit agir. La question est de savoir comment. Une idée qui fait son chemin est la nationalisation des compagnies d’électricité – au moins temporairement – afin de maîtriser les prix avant l’arrivée des pires intempéries de l’hiver.

Il s’agit d’une stratégie réservée à l’extrême-gauche depuis la privatisation massive du marché de l’énergie sous Margaret Thatcher. Mais avec des factures qui augmentent de 80 % pour atteindre une moyenne annuelle de 3 549 livres sterling (4 146 euros) à partir d’octobre, l’orthodoxie politique s’envole.

Selon un sondage publié cette semaine, près de la moitié des électeurs conservateurs sont favorables au retour des compagnies d’énergie dans le giron public. Une étude antérieure avait avancé le chiffre de 72 %.

Jetez un coup d’œil à la carte électorale du Royaume-Uni, et il n’est pas difficile de comprendre pourquoi. De larges pans du nord de l’Angleterre et des Midlands – régions qui ont voté pour les conservateurs lors des dernières élections – souffrent de manière disproportionnée des inégalités économiques et de la pauvreté. Moins bien loties financièrement, ce sont ces communautés que l’urgence du coût de l’énergie touchera le plus durement.

Mais la gravité de la crise est telle que les régions de « l’Angleterre moyenne », qui ont traditionnellement voté pour les conservateurs, risquent également de passer un hiver difficile en raison de la flambée des factures, selon une nouvelle analyse. Faisant écho à ces craintes, le chancelier Nadhim Zahawi a averti que les travailleurs aisés – ceux qui gagnent 45 000 livres sterling (52 570 euros) par an – pourraient également avoir besoin d’aide.

Cette aide devrait-elle prendre la forme d’une nationalisation ? Certains poids lourds de la politique le pensent.

Gordon Brown, l’ancien premier ministre, a demandé que le plafond des prix de l’énergie en Grande-Bretagne soit annulé pendant que le gouvernement négocie des prix plus bas avec les compagnies d’électricité. Les entreprises énergétiques qui ne parviennent pas à réduire leurs factures devraient être temporairement placées sous le contrôle de l’État, affirme Gordon Brown, ce qui permettrait aux ministres de faire baisser les coûts de manière unilatérale. Plus de 100 000 personnes ont signé une pétition en faveur de ces mesures.

Combien cela coûterait-il ? Selon le Trades Union Congress (TUC), la nationalisation coûterait 2,85 milliards de livres (3,3 milliards d’euros), soit environ le même montant que celui dépensé par le gouvernement pour renflouer les compagnies d’électricité au cours des douze derniers mois. D’autres études, cependant, estiment que le prix est beaucoup, beaucoup plus élevé.

C’est en partie pour cette raison que le leader du parti travailliste Keir Starmer ne souscrit pas à la promesse de nationalisation. Il souhaite plutôt dépenser environ 30 milliards de livres (35 milliards d’euros) pour geler les factures à leur niveau actuel, les fonds étant injectés dans les entreprises d’énergie pour combler le déficit.

Les détracteurs de la politique de propriété publique affirment également que la nationalisation ne tient pas compte des nuances de la crise.

Il y a une différence cruciale entre les détaillants en énergie, comme E.ON et EDF, qui fournissent de l’énergie aux foyers et aux bâtiments, et les producteurs d’énergie, comme BP et Shell, qui extraient le carburant, décident des prix et font de gros bénéfices. Cela signifie que, sans subventions parallèles sur l’électricité – comme celles suggérées par Keir Starmer – la nationalisation des détaillants en énergie n’est pas susceptible d’aboutir à grand-chose.

Dans cette optique, les deux candidats en lice pour devenir le prochain premier ministre du Royaume-Uni ont rejeté l’idée d’une propriété publique. Liz Truss, la favorite, refuse obstinément de présenter son plan avant la fin de la compétition, bien que des réductions d’impôts soient largement attendues. Rishi Sunak privilégie une approche différente, plus directe, pour soutenir les ménages britanniques les plus vulnérables.

Quel que soit le vainqueur du 5 septembre, la nécessité d’une action urgente au Royaume-Uni ne fera que s’intensifier – et comme les prix de l’énergie devraient rester élevés pendant au moins les 18 prochains mois, il en sera de même pour le débat sur la nationalisation.

 

Article traduit de Forbes US – Auteur : Alasdair Lane

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