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Que se passerait-il si Vladimir Poutine ordonnait une attaque nucléaire en Ukraine ?

RussieVladimir Poutine. | Source : Getty Images

Le président russe Vladimir Poutine vient d’officialiser l’annexion par la Russie des oblasts de Louhansk, Donetsk, Kherson et Zaporijia. Or, mercredi 28 septembre, il avait affirmé être prêt à défendre le territoire russe par tous les moyens nécessaires, y compris en utilisant les armes nucléaires.

 

Bien qu’il soit difficile de prédire avec certitude si Vladimir Poutine va ordonner une frappe nucléaire en Ukraine, de nombreux experts ont déclaré à Forbes que Moscou déploierait très probablement des armes nucléaires tactiques (des dispositifs de courte portée conçus pour être utilisés sur le champ de bataille) contre les troupes ukrainiennes ou pour détruire des centres logistiques.

Les armes nucléaires tactiques sont bien plus petites que les ogives stratégiques à longue portée conçues pour détruire des villes, mais la puissance est relative : les plus grandes armes tactiques peuvent atteindre le 100 kilotonnes (1 kilotonne = 1000 tonnes de TNT). Pour rappel, la bombe que les États-Unis ont lâchée sur Hiroshima était de 15 kilotonnes. Ainsi, Rod Thornton, expert en sécurité au King’s College London, a déclaré à Forbes que les armes nucléaires tactiques pouvaient être dévastatrices.

Il est très peu probable que Vladimir Poutine vise une ville ukrainienne lors d’une première frappe et il éviterait même de faire des victimes, a déclaré Rod Thornton, expliquant qu’une attaque nucléaire serait surtout un signal envoyé par Moscou pour montrer sa détermination.

Il est difficile de prédire les cibles possibles, a ajouté Rod Thornton, mais il évoque notamment l’île des Serpents, un avant-poste ukrainien en mer Noire pris par la Russie au début de la guerre, qui a depuis été repris et est devenu un symbole de la résistance ukrainienne.

Les conséquences d’une frappe nucléaire dépendent beaucoup du type d’arme utilisée, de la manière dont elle est utilisée, de l’endroit ciblée et des conditions à l’instant T. Cependant, même une bombe nucléaire à faible intensité pourrait avoir des conséquences considérables : les radiations de l’explosion pourraient causer des problèmes de santé à long terme aux survivants et les retombées radioactives pourraient contaminer l’environnement et dériver sur l’Europe et l’Asie.

Ainsi, les conséquences d’une frappe nucléaire en Ukraine pourraient se retourner contre la Russie, notamment avec les retombées radioactives qui pourraient dériver au-dessus de la Russie ou unir des nations contre elle, a déclaré Rod Thornton, ajoutant que Moscou utiliserait probablement une arme conçue pour minimiser les retombées radioactives.

« Sur de nombreux fronts, Vladimir Poutine est sous pression », a indiqué Rod Thornton à Forbes, soulignant les pertes russes en Ukraine, les protestations en Russie sur la mobilisation des réservistes et l’opposition internationale continue. « Plus Vladimir Poutine est désespéré, plus il est poussé dans ses derniers retranchements, plus il devient probable que les armes nucléaires soient utilisées », a ajouté l’expert en sécurité. Le choix d’utiliser une arme nucléaire pourrait poser de nouveaux problèmes à Vladimir Poutine au sein de son pays, et peut-être susciter l’opposition de l’armée ou d’autres instances clés peu désireuses d’envenimer la situation et de pousser l’OTAN à soutenir directement l’Ukraine.

Après avoir subi une série de défaites et de lourdes pertes en Ukraine, Vladimir Poutine a ordonné la semaine dernière une « mobilisation partielle » immédiate pour consolider son invasion chancelante. Cette annonce a déclenché un exode de plusieurs milliers d’hommes russes qui ont fui vers des pays voisins comme le Kazakhstan et la Finlande pour échapper à une éventuelle conscription. Vladimir Poutine a également exprimé son soutien à une série de référendums fantoches dans quatre régions occupées : un prétexte évident pour l’annexion et considéré comme illégitime par la communauté internationale. En outre, il a déclaré que Moscou défendrait ses intérêts par tous les moyens, y compris avec les armes nucléaires. Vladimir Poutine, qui a déjà menacé à plusieurs reprises d’utiliser les armes nucléaires en Ukraine, a insisté sur le fait qu’il ne bluffait pas et que les autres nations devaient prendre cet avertissement au sérieux.

Dmitri Medvedev, ancien président russe et actuel vice-président du conseil de sécurité du pays, a déclaré que les États-Unis et leurs alliés de l’OTAN avaient trop peur d’une « apocalypse nucléaire » pour intervenir en Ukraine, même si Moscou utilisait des armes nucléaires. L’on ignore encore comment le reste du monde pourrait réagir. Les déclarations de Vladimir Poutine ont incité l’Inde et la Chine à rompre leur long silence sur la guerre en Ukraine et à exprimer leur inquiétude. Le secrétaire général de l’OTAN, Jens Stoltenberg, a mis en garde contre les « conséquences graves » d’une utilisation des armes nucléaires en Ukraine par la Russie, faisant écho aux avertissements lancés par Washington en privé. Une frappe nucléaire de représailles est possible, mais elle constituerait une escalade dramatique et dangereuse. Une réponse « dévastatrice » de l’OTAN utilisant des armes conventionnelles est plus probable, a déclaré Zbigniew Rau, ministre polonais des Affaires étrangères.

Il est en tout cas peu probable qu’une attaque nucléaire russe prenne l’Occident complètement par surprise, a déclaré Rod Thornton à Forbes. Il y aurait certainement beaucoup de « bruit de fond » et « d’échanges » entre les différentes agences gouvernementales et de défense russes qui seraient captés par les stations d’écoute occidentales si la Russie prévoyait une attaque nucléaire. Si l’Occident détectait des signaux pointant vers une attaque nucléaire, Rod Thornton indique qu’il y aurait une « augmentation massive de la pression diplomatique exercée sur la Russie » pour qu’elle change de cap. Une pression diplomatique importante serait également exercée sur des pays comme la Chine et l’Inde pour qu’ils adoptent une position plus ferme à l’égard de la Russie, ce qui pourrait avoir plus d’influence étant donné que Moscou dépend de ces deux pays pour ses exportations d’énergie.

Au total, la Russie dispose de 5977 ogives nucléaires, selon une estimation de la Federation of American Scientists (FAS). Environ 1500 d’entre elles ont été retirées du service et doivent être démantelées. La plupart des ogives restantes sont stratégiques : des armes plus grandes qui peuvent être utilisées sur de longues distances. Le reste est constitué d’armes tactiques plus petites. On estime que la Russie possède plus d’armes nucléaires que tout autre pays. Elle est suivie par les États-Unis, dont le nombre d’ogives est estimé à 5428, selon la FAS. À eux deux, la Russie et les États-Unis possèdent 90 % de l’ensemble des ogives nucléaires. Sept autres pays possèdent, ou sont soupçonnés de posséder, des armes nucléaires : la Chine (350), la France (290), le Royaume-Uni (225), le Pakistan (165), l’Inde (160), Israël (90) et la Corée du Nord (20).

 

Article traduit de Forbes US – Auteur : Robert Hart

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