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L’Influence De Netflix Sur Les Fonds De Venture Capital ?

NetflixPhoto par Guillaume Payen/SOPA Images/LightRocket via Getty Images

Les Golden Globes qui ont eu lieu la semaine dernière ont récompensé les meilleurs films et les meilleures œuvres de fiction télévisuelles. Encore une fois, c’est Netflix qui a capté toute la lumière. Ses victoires aux Golden Globes sont aussi celles de son modèle qui transforme l’industrie du cinéma et qui serviront d’exemple pour l’industrie du Venture Capital.

Les start-up studios qui permettent de mettre sur orbite des futures licornes s’inspirent déjà du modèle Hollywood

Les start-up studios sont des entreprises qui créent des start-up en s’appuyant sur des ressources partagées et multi-disciplinaires (comme le juridique, l’expertise technique, le growth hacking, le développement produit, etc.). Ils identifient une équipe fondatrice et mettent à leur disposition un capital humain et financier qui doit leur permettre de franchir les premiers niveaux de croissance. Parmi les plus connus il y a Rocket Internet à l’origine de Delivery Hero en Europe. En France, on retrouve eFounders, Sparking Partners ou Redpill. Leur nombre explose depuis quelques années. Ils arrivent à démontrer leur pertinence pour mettre sur orbite de jeunes sociétés : grâce à leur connaissance sectorielle (Saas, B2B, Retail, etc.) et leur démarche systématique, ils offrent aux fondateurs un unfair advantage. Leur modèle d’affaires est ainsi assez similaire à celui des studios d’Hollywood qui investissent dans des scripts et des concepts puis recrutent ensuite une équipe dédiée au film. Ces studios internalisent le financement et la distribution pour permettre aux esprits créatifs de se concentrer sur leur métier : tourner des films.

 

Netflix initie la plateformisation de l’industrie du cinéma

Le succès de Netflix s’est construit sur deux piliers. Le premier est technologique : il réside dans son infrastructure technique qui lui permet d’offrir à des millions d’utilisateurs dans le monde un service de streaming fluide. La simplicité du service est une illusion et nécessite des investissements continus. Le deuxième réside dans ses productions originales dans lesquelles la société investit plusieurs milliards de dollars par an. Ce pilier est le fruit d’une décision stratégique de la société en 2013 et s’est consolidé avec les succès de House of Cards ou de Orange Is The New Black. Grâce à ces deux piliers, Netflix rassemble aujourd’hui plus de 130 millions d’abonnés et rien ne semble arrêter son appétit.

Depuis quelques mois, Netflix franchit une nouvelle étape et devient une plateforme biface dans le divertissement (two sided platform). Le fonctionnement des marchés bifaces a été étudié par Jean Tirole, premier chercheur à y développer une théorie complète. Ces marchés se caractérisent par la mise en relation de deux catégories distinctes de clients par l’intermédiaire d’une plateforme ou d’un agent. Le réseau bancaire Visa est un exemple de marché biface.

Ce modèle est particulièrement vertueux puisqu’il induit des effets de réseau. Le premier, c’est qu’en accroissant son parc d’abonnés, Netflix augmente les chances d’attirer les meilleurs talents dans ses futures productions originales. Comme le rappelle Nicolas Colin dans son livre L’Âge de la multitude, devenir une plateforme est la marque de succès d’une société digitale. Elle permet de faire entrer la société dans une dynamique de rendements croissants et, in fine, de pouvoir bâtir un monopole. La sortie du dernier film sur Netflix, Bandersnatch, illustre les possibilités de ce positionnement. L’utilisateur en donnant ses choix dans le scénario (parfois anodins comme celui de la musique que l’on souhaite que le héros écoute), offre des données précieuses à Netflix. Charge à Netflix de vendre ensuite à des marques ces données pour réaliser du placement de produit.

 

Comme Netflix, les fonds de venture capital vont eux aussi devenir des plateformes

Un changement sémantique fait surface depuis plusieurs mois chez les VC français : se présenter non plus comme un fonds mais comme une plateforme. On ne badine pas avec la sémantique.

Avec les volumes investis en venture capital qui explosent partout dans le monde et en particulier en France (en cinq ans la France est ainsi passée de 500 M€ investis à près de 2 Mds€ en 2018), la compétition pour les fonds devient plus rude : il est indispensable de se différencier. Les fonds doivent démontrer leur valeur ajoutée. Le rôle des fonds ne se limite plus à la seule présence du partner au board. Dans cette guerre marketing, les premières manœuvres ont déjà été initiées et une partie substantielle des revenus (management fees) perçus par les fonds est utilisée pour rémunérer des experts sectoriels ou des partenaires opérationnels. Les fonds de venture capital américains comme Andreessen Horowitz ou First Round Capital ont initié la danse il y a près de dix ans, et les fonds français suivent le mouvement depuis quelques années.

Ce mouvement n’est pas fini. Rappelons que Netflix est une plateforme biface, c’est-à-dire qu’elle s’appuie sur des effets de réseau à deux niveaux : celui des abonnés mais aussi celui des producteurs de contenus qui souhaitent être référencés sur la plateforme. Que cela signifie-t-il pour un fonds de venture capital ? Comme Netflix, la réponse est probablement technologique. Développer ou utiliser des outils logiciels au cœur même de leur métier pour se donner un avantage concurrentiel dans la gestion de leur dealflow, de leur workflow et surtout de l’ensemble de leur réseau de partenaires qui participent à la création de valeur au sein du portefeuille. 

Mais certains voient plus loin : la valeur du fonds, aujourd’hui principalement concentrée autour des partners, pourrait être, à l’aide de la technologie blockchain, distribuée auprès de l’ensemble du réseau de partenaires qui soutiennent les sociétés du portefeuille. De la même manière que la valeur de tokens associés à un produit collaboratif augmente avec l’usage de ce produit, des tokens pourraient être distribués à chaque membre actif du réseau. 

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