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Le recrutement par les appétences, une innovation managériale pour lutter contre la pénurie de candidats

Le recrutement par les appétences, une innovation managériale pour lutter contre la pénurie de candidats

Selon la dernière enquête de B.M.O. (Besoins en main-d’œuvre), les entreprises françaises ont plus de 3 millions de projets de recrutement en 2022 mais 57,9% de ces recrutements sont jugés difficiles (13 points de plus qu’en 2021) alors que, de l’autre côté, le nombre de demandeurs d’emploi stagne à 7% depuis un an.

Non seulement les entreprises ne parviennent plus à recruter mais elles doivent en parallèle faire face à un important turn-over. Le nombre de ruptures contractuelles à l’initiative des salariés augmente [i] et devient historiquement haut à environ 500.000 démissions par trimestre depuis la fin de l’année 2021[ii].

Dernier point important, entre 255.000 et 390.000 recrutements ont été abandonnés en 2021, faute de candidats adéquats, selon Pôle Emploi[iii].

Comment faire face à ce « casse-tête » ?

 

Parce que toujours plus de la même chose produit les mêmes effets

D’après le baromètre de novembre 2021 de la BPI, 79% des P.M.E. déclarent rencontrer des difficultés de recrutement. Lorsqu’on les questionne sur l’origine de ces difficultés, 70% répondent qu’elles ne reçoivent tout simplement pas de candidatures, 37% que les profils n’ont pas les qualifications requises et 35% que les candidats manquent d’expérience.

Ce constat est corroboré par une enquête présentée par la C.P.M.E. au mois de juillet 2022 qui met en avant que 90% des P.M.E. ne parviennent pas à recruter parce qu’elles ne trouvent pas le « bon profil ».

Il semble donc que la principale difficulté rencontrée repose sur une inadéquation entre les profils des emplois qu’elles proposent et ceux des candidats.

Pour quelles raisons les entreprises accordent-elles autant d’importance aux diplômes puisqu’elles déclarent en parallèle que 42% de leurs postes à pourvoir ne nécessitent aucun diplôme et que 44% requièrent au maximum un brevet des collèges, un C.A.P. ou un B.E.P. ?

Lorsqu’on leur demande ce qu’elles ont entrepris suite à ce constat, 38% déclarent avoir modifié leurs modes de recrutement comme, par exemple, mandater un cabinet de recrutement, diffuser leurs annonces sur les réseaux sociaux ou démarcher chez les concurrents. Autrement dit, elles persévèrent dans l’idée qu’elles doivent absolument trouver des candidatures qui répondent aux exigences de l’emploi.

Quand confinement rime avec changement

Toujours d’après l’étude réalisée par la C.P.M.E., 51% des personnes sondées déclarent vouloir changer de secteur. Que s’est-il passé ?

Bien que certains salariés soient restés en activité, l’anxiété générale provoquée par cette crise sanitaire et le confinement inédit qui, rappelons-le, a duré 149 jours entre mars 2020 et mai 2021, ont été une occasion inédite pour beaucoup de Français de prendre le temps de s’interroger sur leur vie, notamment professionnelle.

De nombreuses études réalisées ces deux dernières années ont mis en exergue les trois principales questions que ce sont posées les salariés durant cette période :

  • « Mon métier fait-il sens pour moi ?»
  • « Mon métier est-il source d’épanouissement ?»
  • « Suis-je en phase avec mon entreprise ?»

Ce sont sans aucun doute les réponses négatives à ces questions qui sont à l’origine de cette vague de démissions et des nouvelles exigences des salariés.

En réaction aux difficultés d’attractivité, de nombreuses entreprises se sont engagées dans des projets d’amélioration de la qualité de vie et des conditions de travail (Q.V.C.T.), la négociation d’accords sur le travail à distance (qui ne concernent, soit dit en passant, que 20% des emplois en France) et d’augmentation des salaires[iv].

Cependant, comme nous le développerons plus bas, l’amélioration des conditions de travail et l’augmentation des salaires n’ont pas d’impact direct sur le sens et encore moins sur l’épanouissement professionnel qui est devenu, depuis le déconfinement, l’attente prioritaire des salariés.

 

Épanouissement professionnel, de quoi parle-t-on ?

Il règne une certaine confusion sur le sujet. Tout le monde n’a pas la même signification de ce mot. Certains parlent de bonheur, d’autres de bien-être, de joie, d’autres de plaisir, de passion ou encore de motivation ou encore de satisfaction.

Lorsque l’on évoque la notion d’épanouissement, qui signifie « s’ouvrir », à l’image d’une fleur qui éclot, il est assez fréquent de faire référence à deux principaux ressentis. Celui de « bien-être » (ou bonheur) et celui de « plaisir ». Or ces deux ressentis n’ont rien en commun et surtout ont des origines très différentes.

Pour simplifier, le bien-être (ou bonheur) est un ressenti provoqué par la sérotonine qui est une molécule qui calme et qui apaise. C’est ce que nous ressentons par exemple lorsque nous nous baladons sur une plage et assistons au coucher du soleil.

Différent, le plaisir est un ressenti qui résulte de la production de dopamine, hormone à l’origine de l’excitation. Du XIème siècle et dérivé de « Plaire », cet état survient lorsque l’on satisfait un désir, mais aussi lorsque l’on accomplit quelque chose de gratifiant.

Cela fait plus de 10 ans que les sondages mettent en avant qu’environ 80% des salariés se disent heureux au travail, ce qui n’a rien de surprenant lorsque l’on observe toutes les actions qu’ont mises en œuvre les entreprises pour améliorer les conditions de vie au travail.

Bien que plus rares, les études sur le plaisir professionnel font ressortir que seulement 20% des actifs déclarent que leur travail leur procure du plaisir. C’est peu et c’est sans doute ce qu’attendent à présent les salariés.

Il semble bien que la souffrance, la frustration et la privation de liberté ressenties durant cette année de confinements et de couvre-feux aient fait naitre chez de nombreuses personnes l’envie d’exercer un métier qui soit source de plaisir.

C’est pourquoi le besoin d’épanouissement exprimé par les Français durant le confinement ressemble davantage à une quête de plaisir qu’à une revendication de bien-être.

Si le bonheur au travail est un sujet qui date du début du XXIème siècle, le management du plaisir au travail n’en n’est encore qu’à ses balbutiements.

 

Qu’est-ce qui est à l’origine du plaisir au travail ?

Nous voilà donc au cœur du sujet.

Contrairement à la motivation et au bien-être, il n’existe pas de concepts dédiés au plaisir au travail. Il s’agit donc d’un nouveau champ d’exploration qui nécessite, dans un premier temps, d’identifier ce qui est à l’origine de ce ressenti.

Cela fait plus de 10 ans que nous nous sommes intéressés à ce sujet. Ce que vous allez découvrir est parti d’une simple question que nous avons posée à des milliers de personnes : « Quels sont les 2 facteurs qui vous provoquent le plus de plaisir au travail ? ».

Avant de découvrir les résultats de cette investigation, nous vous invitons à prendre le temps d’y réfléchir et de rédiger sur un support de votre choix vos deux principaux facteurs.

Les réponses formulées par des milliers de salariés, aux statuts et métiers différents, en France et à l’étranger, travaillant au sein de petites entreprises et de multinationales, ont donné naissance à une typologie des 4 principaux facteurs de plaisir au travail.

  1. Les facteurs liés aux conditions de travail : Le lieu, le matériel, le salaire, les horaires, l’organisation.
  2. Les facteurs liés à l’entreprise : La notoriété, la marque, la stratégie, ses projets, ses valeurs, l’offre.
  3. Les facteurs liés à la relation : La convivialité, le soutien affectif et technique, l’entraide, la coopération.
  4. Les facteurs liés à l’activité : La variété et la nature des activités, telles que relever des défis, expérimenter de nouvelles idées, définir une stratégie ou encore faire plaisir aux autres.

L’illustration ci-dessous présente le poids de chaque facteur à l’origine du sentiment de plaisir professionnel :

Les 4 facteurs de plaisir au travail

 

Deux remarques s’imposent à la lecture de ce schéma :

1 – Agir sur l’amélioration des conditions de travail et l’attrait de l’entreprise ne permet pas d’améliorer le plaisir, mais améliore le bien-être ou réduit la souffrance. Les principaux facteurs d’augmentation du plaisir sont donc la relation aux autres et les activités de l’emploi.

C’est pourquoi il ne faut malheureusement pas attendre des récentes mesures prises par les entreprises sur l’amélioration des conditions de travail et l’augmentation des salaires qu’elles augmentent le sentiment d’épanouissement. Rappelons d’ailleurs que la rémunération n’est pas un facteur de motivation mais de démotivation.

2 – Le plaisir est egocentrique, ce qui explique qu’agir sur des facteurs exogènes (conditions de travail et entreprise) n’a que très peu d’impact sur l’épanouissement individuel. Ce constat n’est pas nouveau puisqu’il a déjà été mis en exergue par Frederick Herzberg dans sa théorie des facteurs de motivation dans les années 50.

C’est donc du côté des relations interpersonnelles et du plaisir provoqué par les activités de l’emploi qu’il faut s’orienter, sachant que ce qui intéresse les salariés, suite à la crise, est avant tout d’exercer un métier qui leur plait, la qualité de la relation intervenant dans une seconde étape, ce qui remet au passage en question l’ordre de satisfaction des besoins mis en avant par Abraham Maslow dans sa pyramide.

Cela étant dit, comment savoir si les activités de l’emploi que l’on souhaite pourvoir provoqueront de la dopamine ?

 

De la compétence (savoir-faire) à l’appétence (aimer-faire)

Pour répondre à cette question, il est intéressant d’inventorier ce que les recruteurs ont pour habitude d’évaluer lors du processus de sélection d’un candidat.

Tout d’abord, il y a bien évidemment les diplômes et les compétences. Si c’est ce qui semble être le plus facile à évaluer, il n’y a pas de corrélation systématique entre compétences et plaisir car ce n’est pas parce que l’on sait faire que l’on n’aime faire pour autant. Beaucoup de personnes maitrisent un métier qu’ils n’aiment pas ou plus.

Les autres critères habituellement évalués sont les motivations/besoins (Appartenir à un groupe, sécurité…), les traits de personnalité (Introverti, extraverti…), les valeurs (Respect, justice…) ou encore l’état d’esprit (Ouverture, humilité…), mais aucun de ces critères ne donne une information fiable sur le niveau de plaisir qui pourrait être procuré par l’emploi.

Certains diront qu’il manque les « Soft skills »[v], ces compétences « douces » à l’honneur ces dernières années. Nous ne résistons pas à l’envie d’ouvrir de faire une petite digression sur ce sujet. Qualifier un concept par ce qu’il n’est pas, à savoir des « Hard skills » est de plus assez surprenant.

Par ailleurs, lorsqu’on découvre la liste des Soft skills les plus plébiscités, on se rend assez rapidement compte qu’ils n’ont absolument rien de nouveau. Plus étrange encore, de nombreux Soft skills ne sont pas des compétences mais la manifestation d’un état d’esprit (Confiance, esprit d’équipe, esprit critique…) ou d’un trait de personnalité (Adaptabilité, empathie, curiosité…).

En résumé, les Soft skills ne donnent aucune information sur le niveau de plaisir provoqué par leur mobilisation.

Il fallait donc proposer un nouveau concept, que nous avons intitulé l’appétence[vi].

6 critères d'évaluation recrutement

 

L’appétence est une aptitude qui répond à 4 critères :

  • Elle est naturelle ;
  • Elle est facile à mobiliser pour la personne ;
  • Elle est source de plaisir ;
  • Elle mène au succès.

Et surtout l’appétence est une capacité qui ne s’apprend pas, ce qui la différencie de la compétence. Elle est déjà en nous, consciemment ou inconsciemment. Prenons 3 exemples d’appétences :

  1. L’originalité, dont le plaisir est lié au fait de faire différemment de ce qui existe ;
  2. La serviabilité, dont le plaisir est de faire plaisir aux autres ;
  3. La débrouillardise, dont le plaisir est provoqué par le fait de faire preuve d’astuce, de faire plus avec moins.

 

Connaissez-vous des formations qui apprennent à être débrouillard, original et à faire plaisir aux autres ? En ce qui nous concerne, nous n’en connaissons pas. Et pourtant ces appétences sont essentielles pour l’exercice de certains métiers et très utile par, exemple, pour évoluer dans un environnement V.U.C.A. (Volatile, Incertain, Complexe et Ambigu).

 

Utiliser l’appétence pour aider les personnes à changer de métier

Est-il possible de changer de métier plusieurs fois dans sa vie ?

Sur le principe, tout le monde le pense, mais en pratique c’est une autre affaire et dans notre pays c’est pratiquement mission impossible.

Une enquête réalisée par Opinion way en 2018 soulignait déjà cette difficulté. Selon 71% des actifs sondés, changer de métier est jugé difficile. Et lorsqu’on leur a demandé qu’elles en étaient les raisons, 63% ont exprimé qu’ils ne savaient pas à qui s’adresser pour les aider dans cette démarche. L’autre frein, et sans doute le plus important, est le doute que les sondés ont exprimé sur la volonté de leur employeur de les accompagner dans cette démarche et le refus quasi systématique des recruteurs de donner une suite favorable à un candidat inexpérimenté.

Tant que la tendance était favorable aux entreprises, il n’y avait pas de raison qu’elles remettent en question leurs critères de recrutement. Mais face à la pénurie de candidats ou aux exigences de ceux qui ont le profil mais qui posent des conditions qui ne peuvent être satisfaites, de nombreux recruteurs commencent à s’ouvrir à de nouvelles approches et deviennent prêts à donner leur chance à des personnes qui ne disposent pas des compétences requises mais qui pourraient bien en avoir le potentiel.

Comme l’évoque la citation attribuée à Confucius, « Choisis un travail que tu aimes et tu n’auras pas à travailler un seul jour de ta vie ». Si certains ont la chance d’exercer un métier qu’ils aiment, ce n’est pas le cas de tout le monde. C’est la raison pour laquelle l’approche par les appétences a été imaginée pour les aider à le (ou les) trouver, mais cela nécessite de reconsidérer certains paradigmes.  

 

Se questionner sur l’importance du diplôme pour exercer certains métiers

« Nulle part ailleurs dans le monde la question de savoir où vous avez fait vos études ne détermine si profondément votre carrière », estime Peter Gumbel, auteur du livre « Elite Academy » alors que, selon Xavier Niel, fondateur de Free et de l’école 42, « On peut être en échec scolaire, ne pas avoir le bac et devenir le développeur le plus brillant de sa génération ».

Cette prégnance historique pour le diplôme semble bien être une particularité française et tiendrait du fait qu’il aurait été considéré comme un critère méritocratique ainsi que le moyen de lutter contre les inégalités des chances du temps de l’aristocratie.

S’il est évident que les diplômes sont indispensables pour certains métiers qui nécessitent un socle de connaissances et de savoir-faire cognitifs, notamment complexes, ils ne doivent pas constituer un rempart à l’accès à l’emploi pour la majorité des métiers dont la maîtrise repose davantage sur le savoir-faire expérientiel que sur les connaissances théoriques.

Par ailleurs, que penser de la durée d’efficacité des compétences acquises durant les études lorsque l’on sait, comme le souligne l’OCDE, que la durée de vie des compétences techniques est passée de 20 ans en 1970 à 2,5 ans aujourd’hui et qu’elle tombera à 1 an en 2025 ?

La crédibilité technique ne reposera donc plus sur les compétences acquises mais sur les capacités à en acquérir de nouvelles, régulièrement et rapidement, ce qui, comme nous l’évoquerons plus bas, est beaucoup plus facile lorsque l’on aime ce que l’on fait. C’est à ce titre que l’approche par les appétences prend tout son sens.

 

Privilégier l’aimer-faire avant le savoir-faire

Quelle est la réaction habituelle de nos institutions lorsqu’elles doivent gérer une forte pénurie de main d’œuvre de secteurs professionnels en crise ? Elles piochent dans le vivier des demandeurs d’emploi, leur proposent des formations puis les encouragent à postuler.

Cette démarche est extrêmement rationnelle et logique mais elle coûte souvent bien plus cher qu’elle ne rapporte. Selon une étude publiée par Hay Group en 2017, 4% des nouvelles recrues quittent leur job dès le 1er jour et 22% dans les 45 premiers jours et le principal motif de ces départs est le manque d’épanouissement.

D’après l’Insee, le taux de turn-over en France est passé de 13,7% à 15,1% en 10 ans. Bien qu’il soit inférieur au taux moyen mondial, qui est de 23%, il y a fort à parier qu’il augmentera encore, si l’on en croit Pole Emploi qui estime que les jeunes actifs d’aujourd’hui changeront en moyenne 13 à 15 fois d’emploi au cours de leur vie[viii].

Il y a donc urgence à limiter cette gabegie. Former à de nouveaux métiers après avoir évalué le niveau de plaisir qu’ils procureraient permettrait d’éviter de financer des actions de formation pour rien.

L’approche par les appétences repose sur l’idée que, lorsqu’une personne exerce une activité plaisante, elle apprend plus vite et surtout a un niveau d’engagement et de motivation plus élevé et durable.

Ce postulat est démontré par de nombreux travaux en neuroscience et plus particulièrement ceux relatifs au « Circuit de la récompense ». La dopamine sécrétée par la mobilisation des appétences a un effet sur de nombreuses fonctions cognitives, telles que la mémorisation et l’apprentissage.

Des chercheurs du M.I.T. ont mis en évidence que le plaisir qu’une personne ressent à réaliser certaines activités l’incite à recommencer. La dopamine se propage dans de nombreuses zones du cerveau où elle renforce les connexions neuronales qui ont été mobilisées dans l’action couronnée de succès.

Ces chercheurs ont également découvert que le même résultat obtenu de façon répétée finit par libérer moins de dopamine, ce qui nous pousse à aller plus loin et à nous perfectionner. C’est pour cette raison que l’acquisition de nouvelles compétences et plus facile et rapide lorsque l’on met un salarié dans sa « zone de plaisir ».

Allier l’appétence à la compétence permet d’atteindre, ce que le psychologue Mihaly Csikszentmihalyi, appelle le « Flow », ce moment dans lequel nous perdons littéralement la notion du temps qui passe, où nous avons l’impression d’être à 100% dans ce que nous faisons et éprouvons un plaisir intense à le faire.

Le Flow

 

Le processus idéal de sélection de personnes qui n’ont ni les diplômes, ni l’expérience, ni les compétences requis consiste donc, dans un premier temps, à apprécier l’adéquation entre les appétences de l’emploi et celles du candidat, dans un deuxième temps à évaluer ses aptitudes techniques (à ce titre vous pouvez vous inspirer de la méthode de recrutement par simulation proposée par Pôle Emploi) et enfin à le former.

Si l’approche par les appétences constitue une prise de risque à l’embauche pour l’entreprise elle a pour intérêt de réduire la probabilité de désengagement et de départ.

Comme rien ne peut être garanti, il est indispensable de bien utiliser la période d’essai avant de confirmer l’embauche définitive ou de débuter la relation avec par un contrat à durée déterminée.

Les bases du concept du recrutement par les appétences étant à présent posées, il reste à découvrir comment concrètement l’utiliser.

 

Appétences et compétences d’un emploi, quelles différences ?

Avant de présenter le processus, nous vous invitons à découvrir ce que sont les appétences en en sélectionnant 5 parmi la liste des 30 appétences que l’on retrouve dans plus de 80% des métiers :

autodiagnostic des 30 appetences

 

Le recrutement par les appétences consiste dans un premier temps, pour l’employeur, à identifier les 4 à 6 appétences de l’emploi. Il est préférable que cette sélection soit faite en groupe et plus particulièrement par les titulaires de l’emploi.

 

appetences et culture d'entreprise

 

Comme l’illustre la figure ci-dessus, les appétences, contrairement aux compétences, peuvent être différentes pour un même métier, ce qui donne une information précieuse sur la culture de l’entreprise.

Dans cet exemple, il apparaît clairement que le profil du commercial de l’entreprise A est plutôt de type « empathique » alors que celui de l’entreprise B est plutôt de type « chasseur », si l’on se réfère aux typologies habituellement utilisées pour les métiers de la vente et du commerce.

Disposer d’informations sur la manière dont sont appréhendées les activités est devenu fondamental car un désaccord sur ce sujet est souvent à l’origine de tensions, voire de démissions.

L’appétence apporte donc une information intéressante sur les valeurs de l’entreprise, ce qui est devenu fondamental depuis le confinement si l’on en croit une enquête d’Opinion Way de 2021 qui mentionne que 50% des Français seraient prêts à accepter un salaire moins élevé de 10% pour rejoindre une entreprise qui partage leurs valeurs[ix].

Mais l’aspect innovant de l’appétence est ailleurs. Elle permet, comme l’illustre la figure ci-dessous, de créer des passerelles d’évolution professionnelles entre métiers aux compétences complètement différentes.

 

lien entre appetences et emplois

 

Une personne qui dispose des appétences mises en avant dans l’exemple ci-dessus peut tout à fait prétendre à exercer ces 4 métiers, d’autant que l’acquisition des compétences nécessaires pour réaliser convenablement les activités nécessitera en moyenne entre 3 et 6 mois de formation.

Peut-être avez-vous sélectionné des appétences qui sont celles de ces 4 métiers, auquel cas vous avez découvert des métiers qui pourraient vous épanouir, même si à ce jour vous n’en n’avez pas les compétences.

 

Sélectionner par les appétences, comment faire ?

Les appétences peuvent être utilisées par les entreprises dans le cadre de leur recrutement mais aussi dans le cadre de manifestations à plus grande échelle.

C’est ainsi qu’en mai 2019, sous l ‘impulsion de la CCI Seine Estuaire, cette région cette mobilisée pour organiser un événement intitulé « Les rencontres sans C.V. » basé sur deux promesses :

  • Pour les candidats, « Vous allez peut-être découvrir un métier qui vous plaira et auquel vous n’aviez pas pensé»
  • Pour les entreprises, « Vous allez peut-être rencontrer un candidat à fort potentiel que vous n’auriez jamais croisé autrement».

Comme vous pourrez le découvrir dans la vidéo ci-dessous, les 2.000 candidats sont allés à la rencontre des 150 entreprises qui proposaient 350 postes à pourvoir uniquement sur la base de leurs appétences, sans connaître le nom de l’entreprise, ni l’emploi proposé.

 

Fort de ce succès (environ 30% des entretiens en mode « Speed dating » ont débouché sur un contrat), le Club Innovons pour l’emploi de l’Ile de la Réunion a organisé un événement similaire au mois de juin 2022 afin de se faire rencontrer 1.500 demandeurs d’emploi et 120 entreprises.

Journee du recrutement innovant il de la reunion

 

Ces deux évènements ont réuni plus de 3.500 candidats et 470 entreprises. La réussite de ces évènements ne tient pas qu’au concept des appétences mais surtout à la mobilisation conjointe des principaux acteurs du marché de l’emploi, à savoir la Dreets, Pôle Emploi, les OPCO, les organisations patronales, les entreprises et bien sur les personnes en recherche d’emploi.

L’autre particularité de ces rencontres et qu’elles se sont déroulées sans pression et en toute convivialité puisque l’objectif est avant tout la découverte.

Pour que l’échange ne se limite pas à une « Discussion de comptoir » l’appréciation du niveau de plaisir et de capacité d’apprentissage a été facilité par l’utilisation de la matrice ci-dessous.

Les candidats ont été invités à exprimer, pour chacune des missions de l’emploi, le niveau de plaisir qu’ils auraient à les réaliser ainsi que le niveau « présupposé » de facilité et de rapidité d’acquisition des compétences.

 

matrice savoir-faire aimer-faire

 

Cet outil peut par ailleurs être utilisé dans le cadre des entretiens annuels ainsi que des entretiens professionnels.

 

A contexte nouveau, nouvelles approches

Nul ne peut contester suite à cette crise que le monde a changé. Il ne ressemble pas à celui d’hier et ne ressemblera pas à celui de demain.

Les habitudes ont la vie dure, surtout en management qui évolue à la vitesse d’un escargot par rapport à beaucoup d’autres domaines. Si les habitudes ont pour vocation de nous rassurer, elles sont aussi un énorme frein à l’innovation dont on doit faire preuve pour s’adapter à l’évolution de plus en plus rapide de notre environnement.

Parce que les entreprises ne sont pas imperméables à la société dans laquelle elles évoluent, elles ont à présent deux choix en matière de recrutement.

Le premier consiste à s’entêter à vouloir trouver des candidats qui répondent en tous points aux profils souhaités. Vous l’avez compris, elles risquent fort d’attendre longtemps.

Le second consiste à prendre le risque de se réinventer et d’expérimenter de nouvelles approches. Nous avons écrit cet article à cet effet, en espérant qu’il permettra aux entreprises et candidats qui se ressemblent de se trouver.

 

 

[i] Source : Insee 2ème trimestre 2022

[ii] Source : « La vie publique » du 23 août 2022

[iii] Source : Article Les Echos du 10 février 2022

[iv] Source : Analyse de la Dares d’août 2022

[v] Les « soft skills » sont définies comme toutes les compétences qui ne sont pas « hard » (techniques)

[vi] Livre « Le plaisir au travail, de l’aimer-faire au savoir-faire », de Francis Boyer, Éditions Eyrolles, juin 2018

[vii] Source : Note flash du ministère de l’Enseignement supérieur de sept. 2021

[viii] Source : Rapport Pôle Emploi de 2019

[ix] Source : Sondage Opinion Way 2021

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