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Le Diable S’Habille-T-Il Toujours En Prada ? Ou Les Dessous De La Mode Et Des Instagirls

Photo by Peter White/Getty Images

Hier, les mannequins étaient traités comme des princesses, les coiffeurs, photographes, retoucheurs, stylistes juniors et assistants percevaient eux, lors des défilés ou Fashion Weeks des rémunérations motivantes. Mais aujourd’hui, il arrive de plus en plus souvent que le mannequin ait à payer son billet d’avion pour se rendre à un shooting, et que lesdits stylistes ou coiffeurs vivent dans la précarité. La mode couture et prêt-à-porter, une profession ou le luxe et la pauvreté se côtoient en permanence.  

Comment cette profession a-t-elle évolué depuis son apparition chez Worth ?

Le secteur de la mode et du luxe est en pleine croissance. C’est le secteur de l’image,  des précurseurs du « Dress for Success », alors qu’il n’y a jamais autant eu d’asymétrie et de précarité dans cette activité opaque et surexposée, activité censée créer du désir. Jamais eu autant de décalage entre le prix des vêtements promus et celles/ceux qui les portent, entre les lieux où elles/ils évoluent professionnellement et les lieux où elles/ils vivent avec difficultés leurs vies privées.

Pourquoi accepten-elles/ils ces conditions ?

Avoir la chance de travailler dans la mode, même gratuitement, permet d’améliorer son image et son statut social, car malheureusement, on envie tous, nous amoureux des marques, celles/ceux qui travaillent dans ce secteur. La plupart des acteurs de cette industrie pensent eux s’émanciper alors qu’ils s’assujettissent souvent à la précarité. Un secteur d’activité où toute objectivité a disparu, ou ce sont des jugements humiliants permanents, le produit, le mannequin, qui était cool, peut devenir du jour au lendemain moche ; ce qui était désirable hier ne l’est plus aujourd’hui.

Évolution marquante de ce secteur  

Ce secteur qui s’adresse aux nouvelles élites de la mondialisation est entré assez récemment dans l’ère des « fashion editors ». Elles/ils sont devenus les personnages clefs. On citera bien sûr l’ex-rédactrice en chef de Vogue Paris, Carine Roitfeld. Aujourd’hui, ce sont eux/elles les pros de la communication, qui aident à positionner les brands, qui composent les looks, qui valident ou pas le style, et supervisent l’ensemble.

En fait les « fashion editors » sont aujourd’hui devenus indispensables à la profession. Eux seuls ont été capables d’instituer une connivence entre la mode et les médias. Médias qui font vendre la mode et les très profitables accessoires,  et, cela depuis que la couture, pour survivre, s’est attachée dans les années 70 à développer son prêt-à-porter. Depuis l’apparition de ces « fashion editors » le génial créateur dit inspiré est juste devenu le chef d’orchestre, le people, le faire valoir médiatique.

Aujourd’hui tout est devenu médiatisation acharnée, influence, Instagram et instagirls. Tout est entré dans la sphère de ces « fashion editors » grands gourous des contenus, de l’engagement, des followers, du buzz et de l’image. Tout se résume à du « trading d’influences », d’où les rémunérations faramineuses des stars influencers, instagirls d’Instagram.  

Ces « fashion editors » ont souvent quitté le média qui leur avait assuré la notoriété pour créer leurs propres publications de luxe. Elles/ils sont de plus en plus nombreux ; on citera l’Irlandais Alastair McKimm (Supreme) , la Britannique Katie Grand (Marc Jacobs) , la Russe Lotta Volkova (Balenciaga) ou l’Américaine Sarah Richardson.

Que va-t-il se passer dans ce microcosme ?

L’affaire Weinstein qui n’a d’abord touché que le monde du cinéma a donné des idées aux « acteurs » de la mode. Monde où les humiliations, le harcèlement sexuel, l’opacité, et la maltraitance y sont assez communs.

Un monde où les mannequins, ou poupées de son « inanimées », sont traitées comme des cintres. Elles doivent souvent se changer nues devant leurs collègues, et ne disposent pas de siège pour se reposer, un monde aux horaires très élastiques.

Un monde où la présence en boîtes de nuit après le show est fortement recommandée sous peine de se faire remplacer pour une/un « new face » de 15 ans. Un(e) new face faisant du 32 chez les femmes ou du 42 chez les hommes, cela après 48 ou 72 heures de jeûne bien sûr.  

Très récemment et donc à cause de cette affaire Weinstein, les mannequins stars  – se sont enfin emparées de ce sujet « maltraitances » . Elles furent ensuite relayées par le Boston Globe

Et les choses ont enfin bougé, des normes sont en train d’être rédigées.  Celles-ci définiront âge et rémunérations minima, encadrerons tout ce qui touche à la nudité, aux positions suggestives, aux relations entre intervenants. Des tables rondes et formations sont désormais planifiées dans la plupart des organisations et agences.

Les entreprises du secteur semblent avoir enfin compris que le respect des mannequins est fondamental. Seule question : coiffeurs, maquilleurs assistant(e)s ou retoucheurs seront-elles/ils associés à cette évolution positive ?

 

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