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Gouvernance mondiale : les 3 leçons du Forum économique de Davos

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La grand-messe de l’économie et de la politique mondialisée a livré une édition inédite en 2023, à un moment où le monde retient son souffle sur fond de crise en Europe. Malgré les critiques récurrentes, la cristallisation pendant quatre jours de grands patrons, de chefs d’États et de gouvernements ainsi que de penseurs de tous bords et d’activistes confère toujours à cette agora une place particulière dans la marche du monde. Voilà pourquoi.

Surtout ne pas tomber sur le macadam givré ! Telle était l’obsession des quelque 3000 participants au Forum de Davos triés sur le volet à l’heure où le village suisse affichait des températures négatives record pour cette édition 2023. Mais une fois le palais des congrès atteint, une véritable ruche est à l’œuvre avec pas moins de 500 sessions, panels, réunions, déjeuners et dîners de travail réunissant les trois communautés de penseurs, d’acteurs et de commentateurs de premier plan qui ont planché sur les grands thèmes du moment : fragmentation, transition écologique et nouvel impact social. Rien de nouveau sous le soleil diront les détracteurs, tant ces sujets occupent la une de l’actualité mondiale. Pourtant, le Forum a démontré à la fois sa pertinence et sa centralité en permettant de renouveler le genre en accordant une place particulière à la substance et en incluant de nouvelles voix dans le débat. Trois leçons peuvent être tirées de cette dynamique.

 

La première leçon est immatérielle : le multilatéralisme a besoin de présentiel. Pendant la pandémie, beaucoup ont annoncé la fin des grands forums et des rencontres, au profit des sessions à distance et des visio-conférences. Or, le monde n’a jamais eu autant besoin que des protagonistes aux visions du monde parfois radicalement différentes puissent se rencontrer physiquement, parfois par hasard, au détour d’un café, d’un trajet en bus, où d’un dîner imprévu. Pour cet animal social qu’est l’homme, pouvoir plonger ses yeux dans ceux de son interlocuteur, déceler un sourire, repérer une incohérence, trouver une passion où une détestation commune est vital. Sans ce subtil croisement entre le hasard et la providence, impossible de trouver ce dénominateur commun qui ouvre la voie aux résolutions de conflits. Cela, le fondateur du Forum, Klaus Schwab l’a compris depuis longtemps, dès le moment où lui vint cette idée folle d’organiser cette conférence sur les hauteurs suisses au début des années 70. Elle était alors uniquement réservée aux Européens, puis elle connut le succès que l’on sait.

 

La seconde leçon est politiquement incorrecte : sans une implication plus importante des puissances politiques et économiques, rien de déterminant ne pourra être fait pour réussir les transitions écologiques, économiques et sociales indispensables. L’on peut tempêter, protester, appeler à la démondialisation à cor et à cri, les détenteurs des positions dominantes ont accumulé trop de capital, de savoir, de technologie pour qu’une nouvelle gouvernance mondiale et une plus juste répartition des richesses ne se fasse sans leur participation active. Peut-être est-ce là l’un des mérites essentiels du Forum de Davos qui organise la confrontation des points de vues entre le sommet et le bas de la pyramide. Pour cette édition 2023, la voix des « sans-voix » s’est clairement fait entendre, instillant un sentiment d’urgence parmi les participants, notamment sur les questions écologiques pour lesquelles plusieurs engagements substantiels ont été pris.

 

La troisième leçon nous interpelle tous : les solutions pour assurer une transition équitable existent, il suffit de résoudre l’équation de la réduction des écarts d’opportunité. Par exemple, il existe un fossé béant dans la production de connaissance entre le nord et le sud, ce qui maintient les pays émergents et les plus pauvres dans un état de précarité intellectuelle. Ce dernier les empêche de dessiner leur futur sur le plan de la doctrine scientifique, économique, sociale ou encore environnementale, et les oblige à avoir recours à de l’expertise externe pour conceptualiser leurs plans de développement. Ladite expertise externe se situant évidemment… au nord, et est aggravée par la fuite des cerveaux.  Les raisons de cet écart béant sont connues : la recherche a besoin de moyens et de débouchés. Le sud ne dispose ni de l’un ni de l’autre. Il faut donc réorienter les efforts de transfert de capital en direction de la connaissance afin de réduire l’écart.

Davos aura donc permis cette année de démontrer qu’il est indispensable de combiner présence, implication et répartition pour adresser les formidables défis qui se dressent devant nous. Le chemin est encore long, mais l’espoir est permis.

 

 Tribune rédigée par Abdelmalek Alaoui, économiste, Président de Guepard Group

 

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