Une tribune écrite par Capucine Roche, PDG de Letsignit.
Depuis plusieurs années, les cycles de croissance et de ralentissement ne se résument plus à des questions de marché. Ils révèlent surtout la maturité des entreprises : leur capacité à s’adapter, à faire des choix lucides et à concentrer leurs ressources sur ce qui compte vraiment.
Optimiser avant de croître
Dans les périodes de tension, la tentation est forte d’aller chercher ailleurs la croissance que l’on n’arrive plus à générer. Pourtant, la valeur la plus durable se trouve souvent dans ce que l’on possède déjà : ses clients, ses produits, ses équipes, ses canaux internes. Optimiser l’existant, c’est renforcer la qualité de ce qui fonctionne : capitaliser sur les clients fidèles, faire évoluer les offres plutôt que de les multiplier, s’appuyer sur des données précises plutôt que sur l’intuition seule.
Et surtout, mobiliser les collaborateurs comme premiers ambassadeurs de la marque.
Ils représentent le canal le plus crédible et le plus durable qu’une entreprise puisse avoir. Quand ils comprennent la vision de l’entreprise, et quand ils sont bien outillés, ils la portent avec authenticité : dans leurs missions, leurs échanges et toutes leurs interactions. C’est ce qu’on appelle une communication incarnée, celle qui ne se décrète pas, mais qui se construit.
Des équipes resserrées, expérimentées et accompagnées
Dans un environnement incertain, les organisations les plus solides sont celles qui restent connectées à la réalité du terrain. Quand le changement est quotidien, il est facile de se réfugier derrière les tableaux de bord ou la hiérarchie. Pourtant, c’est sur le terrain que se trouvent les signaux les plus justes : ceux des clients, des équipes, des usages.
Le management doit lui aussi faire mieux. Il ne s’agit surtout pas d’ajouter des process mais d’être à nouveau créateur de valeur. Les managers ont parfois vu leur rôle de “chef d’orchestre” transformé en intermédiaires. Or, leur valeur se crée au contact du terrain, là où l’action et la compréhension se rejoignent. Ils doivent interagir et apprendre avec leurs équipes plutôt que de simplement orchestrer leurs tâches. C’est ainsi qu’ils redonnent du sens à leur mission et font progresser l’organisation tout entière.
Enfin, apprendre c’est aussi transmettre : former, faire grandir, accompagner la montée en compétences pour construire des structures solides et durables. Les entreprises pourront s’appuyer sur l’intelligence artificielle pour soutenir cette évolution : en automatisant les tâches à faible valeur ajoutée, l’IA libère du temps pour ce qui compte vraiment : le développement des talents et l’apprentissage continu.
Investir franchement et au bon moment
Alors que l’incertitude demeure, il est naturel que les entreprises cherchent à se protéger. Pourtant, la prudence ne doit pas se transformer en inertie. Attendre, c’est souvent laisser passer les bonnes opportunités. Celles qui permettent d’innover, de se repositionner ou simplement de garder un coup d’avance. À contrario, investir permet de se projeter et de garder l’avantage face à une concurrence accrue, à condition d’en faire un acte réfléchi et assumé. Là encore, il s’agit moins de la quantité d’investissement que du bon moment ou des bonnes raisons.
Et cela suppose une vraie discipline budgétaire :
- allouer davantage aux chantiers d’innovation et d’exploration,
- renforcer l’efficacité opérationnelle sur les activités cœur,
- et savoir dire non à ce qui dilue la vision ou l’énergie collective.
La fameuse Rule of 40, qui calcule l’équilibre entre croissance et rentabilité, illustre cette exigence : les entreprises durables ne choisissent pas entre l’un ou l’autre. Elles arbitrent avec discernement.
2026 ne sera ni l’année des grandes promesses ni celle des révolutions forcées. Elle sera l’année de la lucidité quant au cap suivi : optimiser l’existant, miser sur la compétence et la transmission, et investir là où la valeur se crée vraiment. La croissance durable ne viendra pas de la course à la nouveauté mais de la qualité des décisions. Et la vraie performance ne viendra pas du “faire plus” mais du “faire juste”.
À lire également :

Abonnez-vous au magazine papier
et découvrez chaque trimestre :
- Des dossiers et analyses exclusifs sur des stratégies d'entreprises
- Des témoignages et interviews de stars de l'entrepreneuriat
- Nos classements de femmes et hommes d'affaires
- Notre sélection lifestyle
- Et de nombreux autres contenus inédits



