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PORTRAIT | Clara Chappaz, nouvelle patronne de la mission French Tech

Annoncée fin septembre, la nomination de Clara Chappaz à la tête de la Mission French Tech a été accueillie avec enthousiasme par le monde entrepreneurial. Pour succéder à Kat Borlongan, le secrétaire d’État en charge de la Transition numérique et des Communications électroniques, Cédric O, a choisi un visage bien connu de l’écosystème de la vente en ligne, et plus particulièrement de la mode. Portrait.


 

Depuis 2019, celle qui a été successivement Chief Growth Officer puis Chief Business Officer de Vestiaire Collective affiche un parcours sans faute. Entrepreneuriat, expériences à l’international, fine connaissance des start-up comme des scale-up, la jeune femme de 32 ans coche toutes les cases. Et pour cause, celle qui a grandi dans un univers familial bercé par l’excellence, entre une mère professeure de classes préparatoires et un père entrepreneur (Pierre Chappaz, fondateur de Kelkoo, Wikio et de Teads), reconnaît que son environnement lui a permis d’extraire le meilleur des deux univers, celui du public comme du privé. « Ma mère, ma tante mais aussi mes grands-parents sont ou ont été professeurs. Ils m’ont sûrement transmis cette soif d’apprendre et la satisfaction que j’en tire. Grâce à mon père, j’ai pu grandir en ayant une fenêtre ouverte sur le monde de l’entrepreneuriat et ce qu’il signifie. »

Après une classe préparatoire au lycée Saint- Louis à Paris, Clara Chappaz intègre l’Essec, qui lui ouvre les portes de l’international. Passionnée par le Japon et sa culture, elle y suit des cours de japonais. Un atout qui lui permettra de décrocher son premier stage dans l’hôtellerie. « J’ai passé quatre mois en tant que doorman dans un hôtel à Okinawa, une île située au sud du Japon. Je ne pouvais pas prétendre à plus car mon japonais était encore balbutiant, mais cette expérience m’a confirmée dans mon souhait de retourner en Asie, cette fois côté entreprise. » L’aventure se poursuit à Hong Kong dans le cadre d’un VIE chez Pernod Ricard. Là, elle croise la route de Jose Ojeda, alors en charge de lancer Zalora en Thaïlande, déclinaison asiatique de Zalando. « Zalora fait partie de mes expériences structurantes, dans le sens où elle m’a permis d’observer de près le bond technologique du pays. Lorsque nous avons débuté en 2012, seuls 2 millions d’habitants sur les 60 millions que comptait le pays avaient une carte bancaire. En quelques années, de nouveaux usages sont apparus, notamment celui du paiement mobile, une innovation qui est arrivée bien plus tard en Europe ou aux États-Unis. » Durant trois ans, Clara Chappaz occupe divers postes de responsabilité pour le marché thaïlandais, avant d’en devenir directrice marketplace pour l’Asie du Sud-Est. Elle apprend même à coder, comme l’explique Jose Ojeda, depuis cofondateur de 011H : « Alors que je travaillais pour Zalora, nous avons eu un problème de performance avec l’une de nos campagnes e-mailing, pour lequel aucun ingénieur logiciel n’était disponible. Clara a appris à coder dans l’urgence pour résoudre le problème en quelques jours ! »

 

La plateforme Lullaby

Un souvenir qui en dit long sur sa capacité d’apprentissage et son caractère résilient. La jeune femme réfléchit ensuite à mettre le cap vers les États-Unis, un pays où elle n’est allée qu’une seule fois, et qui incarne à ses yeux l’eldorado des entrepreneurs. Encouragée par Jose Ojeda, devenu un de ses mentors, elle postule au MBA de la prestigieuse université de Harvard. Ce qui l’a décidée à sauter le pas ? La soif d’apprendre encore, et celle de se confronter à des personnalités d’horizons différents. « Dans ma classe de 900 élèves, il y avait près de 40 nationalités différentes : des avocats, des médecins, ou encore des entrepreneurs. » En deuxième année de MBA, Clara Chappaz se lance dans l’entrepreneuriat et cofonde avec une de ses camarades de classe la plateforme Lullaby, consacrée aux produits d’occasion pour enfants. « Je crois beaucoup à l’économie circulaire, et Lullaby en est un bon exemple. À l’instar de Vestiaire Collective, ce sont des modèles économiques qui demandent une certaine verticalité, de par la relation de confiance qu’il faut instaurer auprès des acheteurs. » Son MBA en poche, l’entrepreneure s’installe à Londres, où elle rejoint Jose Ojeda chez Lyst, le principal moteur de recherche de mode, en tant que vice-présidente en charge de l’international.

 

L’expérience structurante de Vestiaire Collective

En 2019, Clara Chappaz rejoint Vestiaire Collective auprès de Maximilian Bittner, le nouveau CEO. « Nous avons fait connaissance en Asie, lorsque j’étais chez Zalora, et lui à la tête de Lazada, une entreprise singapourienne de commerce en ligne. En huit ans, Maximilian a vu sa start-up devenir une scale-up avant de la vendre au géant Ali Baba pour 3,8 milliards de dollars. Autant de raisons qui m’ont poussée à rejoindre ses équipes pour relever le challenge de l’internationalisation de Vestiaire Collective. » Sous l’impulsion du nouveau dirigeant, l’entreprise française se transforme à vitesse grand V. « Le plus gros challenge a été de faire évoluer le business model en introduisant l’envoi direct entre les acheteurs et les vendeurs, une innovation qui permet de diminuer considérablement la pression sur les coûts opérationnels, et donc sur nos commissions. Une étape indispensable pour une plateforme comme Vestiaire, qui se doit de toujours rester attractive auprès des vendeurs. » Clara Chappaz se voit ensuite confier un second projet de croissance aux États-Unis. Avec ses équipes, elle met en place une stratégie de développement d’un catalogue spécifique, constitué à la fois des grandes marques de luxe et de celles prisées par les acheteurs américains, tout en introduisant l’envoi direct pour favoriser la constitution d’un réseau local. Un succès, puisque le pays, qui pesait peu au lancement, figure en tête des marchés les plus importants de Vestiaire Collective.

Nommée ensuite Chief Business Officer, Clara Chappaz supervise toutes les régions de la plateforme (Europe, États-Unis, Asie) ainsi que le pôle marketing/marque. Interrogé sur sa collaboration avec Clara Chappaz, Maximilian Bittner ne tarit pas d’éloges sur son ancienne collaboratrice : « Ce qui rend Clara unique, c’est l’étendue de l’expérience de gestion qu’elle a acquise en travaillant dans l’univers tech et mode en Asie, en Europe mais aussi en étudiant aux États-Unis. Clara a pris le risque de ne pas suivre une route toute tracée, ce qui lui permet d’avoir une expérience beaucoup plus large que la plupart des personnes de son âge. Elle a connu les hauts et les bas, a été obligée de prendre des décisions difficiles, ce qui est un élément clé dans la gestion d’une entreprise. C’est ce qui lui permet aujourd’hui de démontrer une grande maturité ainsi qu’une approche très créative. »

 

Le challenge de la French Tech

Après presque trois ans passés chez Vestiaire Collective, la jeune femme se met en quête d’un nouveau challenge. La nouvelle du départ de Kat Borlongan l’incite à tenter sa chance auprès de la Mission French Tech. Première étape du processus de recrutement, un oral devant un grand jury composé des figures de l’écosystème, à l’instar de Thomas Courbe, le directeur général des entreprises, et de Jean-Charles Samuelian-Werve, fondateur d’Alan, avant d’être reçue en entretien par le secrétaire d’État au Numérique, Cédric O. Ce qui lui a plu dans ce nouveau défi ? « L’opportunité de servir mon pays, celle de créer un impact à l’échelle internationale, mais aussi d’apprendre les codes d’un nouveau monde. De par mon expérience, j’ai toujours évolué dans des entreprises drivées par des KPI quotidiennes. Cette fois, il s’agit de conduire des actions structurelles, donc moins quantifiables dans l’immédiat. » Dévoilée courant octobre par Cédric O, la feuille de route de la troisième étape de la Mission French Tech se veut ambitieuse. Il s’agit de massifier les programmes d’accompagnement de la mission French Tech sur l’ensemble du territoire, en passant de 200 à 1 000 start-up, dans des secteurs d’avenir tels que ceux des Green Tech, de la santé ou de la cybersécurité. Cette stratégie s’accompagne d’une volonté de renforcer la diversité au sein de l’écosystème, avec notamment le programme Tremplin. L’international fait partie des axes sur lequel le gouvernement compte mettre l’accent en soutenant davantage de start-up françaises dans leur développement grâce à l’initiative Scale-up Europe. « Mon rôle sera aussi d’encourager les entreprises industrielles, celles de la Deep Tech, qui par les innovations de rupture qu’elles portent, vont servir le monde de demain. Elles ont besoin d’être davantage soutenues, notamment sur la partie financement. Pour être pertinente, la French Tech ne doit pas se limiter au numérique. »

 

« Mon rôle sera aussi d’encourager les entreprises industrielles, celle de la Deep Tech. Qui par les innovations de rupture qu’elles portent, vont servir le monde ». 

 

Pragmatique, Clara Chappaz sait que pour relever ces challenges, une des clés sera de garder un contact direct et étroit avec les entrepreneurs. Celle qui par le passé a plusieurs fois accepté de rejoindre des boards d’entreprise en tant qu’advisor, espère arriver à maintenir ces espaces d’échanges privilégiés dans son nouvel emploi du temps. Nul doute que la nouvelle directrice de la French Tech saura trouver l’équilibre pour réussir là où on l’attend, tout en veillant à imprimer sa patte. « Clara sait très bien gérer la pression et a une capacité naturelle à attirer à elle les meilleurs talents. Sans compter son tempérament enthousiaste, qui se révèle communicatif dès qu’il a trait à l’esprit d’entreprise et aux technologies. Je suis convaincu qu’elle réussira à hisser la France au rang des principaux pôles technologiques de niveau mondial », conclut Jose Ojeda.


 

La Mission French Tech

Fondée en 2013 au sein du ministère de l’Économie et des Finances, la Mission French Tech a pour objectif de faire de la France un des pays les plus attractifs au monde pour les start-up qui veulent se lancer, partir à la conquête des marchés internationaux et bâtir un avenir qui ait du sens. Soutenue par un réseau de 121 communautés et capitales French Tech sur tout le territoire français et dans le monde, la Mission déploie des programmes d’accompagnement comme le FT120/Next40 ou French Tech Tremplin, des politiques publiques comme le FT120/Next40 ou French Tech Tremplin, des politiques publiques comme le lancement du French Tech Visa ou encore des plans de financement.


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