Le développement de biofongicides et de bioherbicides contenant des micropeptides naturels, comme alternative aux pesticides et intrants chimiques,  c’est sa spécialité. Micropep Technologies est née de la recherche sur les microARNs effectuées au sein du groupe “Symbiose Mycorhizienne et Signalisation Cellulaire” du laboratoire LRSV (dépendant de l’université Toulouse-III-Paul-Sabatier et du CNRS). Avec ses 30 collaborateurs, l’entreprise française créée en 2016 est une jeune pousse disruptive qui a déjà reçu plusieurs prix, tels que le Concours Mondial de l’innovation 2016 ou le Concours i-Lab 2017, et qui vise une commercialisation de ses produits en 2025. Thomas Laurent, CEO de Micropep Technologies, répond à nos questions. 

 

En quoi consiste le développement d’une nouvelle génération de produits biologiques pour remplacer les pesticides ?

Thomas Laurent : Micropep Technologies est spécialisée dans le domaine des intrants biologiques pour l’agriculture reposant sur l’utilisation d’une catégorie de toutes petites protéines que nous appelons « micropeptides ». Ces micropeptides sont déjà naturellement produits et utilisés par les plantes pour se protéger des maladies ou réguler leur développement. Chaque micropeptide possède une séquence unique qui lui permet d’avoir une fonction précise et pour une seule espèce de plante donnée. Cette forte sélectivité vient notamment combler un des grands défauts des pesticides conventionnels qui s’attaquent à de nombreux organismes vivants sans distinction. En fonction de la problématique agronomique et de la culture visée, nous identifions et sélectionnons donc les micropeptides les plus appropriés, puis les produisons et les formulons afin d’en faire un traitement efficace et fiable que les agriculteurs pourront utiliser en remplacement des pesticides, avec un potentiel d’efficacité qui se rapproche des standards de la chimie. Nous avons à ce titre bénéficié depuis notre création depuis 2016 de belles levées de fonds dans le domaine de l’AgTech (via Sofinnova Partners et Supernova Invest), et nous visons une commercialisation de nos produits à l’horizon 2025. En résumé, de même que les technologies à partir d’ARN ont révolutionné les vaccins, nous pensons que nos micropeptides vont pouvoir révolutionner le domaine de la protection des plantes.  

 

Quel est le principal défi auquel vous êtes confronté ? 

Thomas Laurent : Le principal défi de notre secteur est simple : il s’agit de réussir à accélérer le développement et le lancement de solutions efficaces pour la protection des cultures qui soient également respectueuses de l’environnement. Le grand public comme l’industrie en ont bien conscience à l’heure du réchauffement climatique : il est primordial de mettre au point rapidement des solutions propres sans pour autant sacrifier leur efficacité et leur fiabilité. La question reste toujours la même : comment faire pour aider une société innovante comme la nôtre à se lancer, puis à se développer et à mettre sur le marché de nouvelles approches dans les délais les plus courts possibles ? Pour y répondre, il est nécessaire d’engager une véritable réflexion sur la structuration de la filière recherche et développement, en adéquation avec les obligations et les parcours réglementaires qui demandent parfois beaucoup de temps, surtout pour les start-up de petite taille qui doivent disposer de moyens pertinents et adaptés. A titre d’exemple, nous pensons pouvoir commercialiser nos premiers produits dans un premier temps aux Etats-Unis avant de pouvoir le faire en Europe, simplement en raison du délai réglementaire. 

 

En quoi consiste cette révolution technologique ? 

Thomas Laurent : Le domaine de la protection des plantes s’appuie aujourd’hui sur deux grandes catégories de produits. La catégorie principale est celle des intrants chimiques, herbicides, fongicides, insecticides, qui ciblent des enzymes clés du développement des plantes, des pathogènes ou des insectes, le plus souvent de manière non-sélective : certains de ces pesticides vont par exemple dévaster tout aussi bien les insectes ravageurs que les abeilles, avec un fort taux de rémanence et de pollution. La seconde catégorie, en fort développement, est celle des intrants biologiques reposant principalement sur les microorganismes ou des extraits de plantes. Les produits développés dans cette catégorie n’ont pas encore atteint le même niveau d’efficacité ou de fiabilité que la chimie conventionnelle pour de nombreuses raisons, en partie liées aux difficultés de travailler avec des microorganismes vivants. 
Micropep propose une troisième voie reposant sur les propriétés uniques des micropeptides qui présentent le même potentiel d’efficacité que les intrants conventionnels mais avec une forte sélectivité et un profil environnemental similaire aux intrants biologiques. Non chimiques, ils sont issus du vivant et ont une activité ciblée au sein des cellules, soit contre les pathogènes, soit contre les mauvaises herbes, soit contre les insectes ravageurs. Si on commence à voir arriver sur le marché les premières innovations technologiques en la matière, nous pouvons nous targuer de faire partie des précurseurs, avec un bon espoir de changer radicalement la manière dont les agriculteurs vont travailler dans le futur. La protection de l’environnement est au cœur de la mission de Micropep Technologies : nous œuvrons ainsi pour apporter des solutions efficaces et respectueuses aux agriculteurs, qui soient sans danger pour leur sol, mais aussi pour les utilisateurs et les consommateurs.