Le « coaching » et l’accompagnement des dirigeants, est né dans les années 60 dans les pays anglo-saxons dont le pragmatisme s’accorde bien à la recherche de résultat rapide. En France, pays latin, le coaching arrive dans les années 90 où il est moins bien accueilli et validé. Aujourd’hui, grâce à des certifications professionnelles, le coaching est arrivé à maturité et mieux valorisé en entreprise dans un contexte d’incertitudes. Mais son champ d’intervention reste peu connu. Pour faire le point, nous avons rencontré Ana Pusca qui a quitté le milieu de la haute finance pour suivre sa voie, se former et créer son cabinet de coach de dirigeants et de hauts potentiels.

 

Quels sont les enjeux de votre secteur, le coaching de dirigeants ?

Ana Pusca : Le premier enjeu dans ce jeune métier est d’asseoir la légitimité du coach. Heureusement, la professionnalisation a bien avancé avec la création du titre « Coach Professionnel » reconnu par l’état depuis  2016. C’est un secteur en pleine expansion et la certification par les fédérations professionnelles (ICF, SFCoach…) et les écoles de coaching (Coaching Ways France) est un pas important pour donner une meilleure place au coach dans l’entreprise. Je suis moi même accréditée et possède une certification pour travailler à l’international, en anglais et roumain ma langue maternelle. Le deuxième enjeu, c’est d’utiliser le coaching à bon escient. Pour ma part, je refuse le « coaching sauvage » pour une personne qui n’en a pas fait la demande spécifique, le coaching de la dernière chance décidé par la RH face à une personnalité difficile dont on souhaite se séparer. J’ai une éthique qui consiste à dire : je coach une personne qui en formule la demande, qui a un besoin, une direction à prendre. Autre clarification à apporter souvent dans les entreprises, c’est de préciser qu’il ne s’agit pas d’un conseil stratégique pour apporter des réponses au CODIR. Le coach fait émerger les réponses, l’expert reste le client. Le coach agit comme un guide, il améliore la confiance, aide à mieux gérer les conflits. Il apporte des nuances pour ne pas répondre en réactions aux évènements sur le même mode, trop dur ou trop clément. Enfin, le coach intervient entre l’état présent et l’état désiré, il s’intéresse peu au passé qui est plus du domaine de la thérapie.

 

Qu’est-ce qu’un coaching peut apporter à un dirigeant dans un monde incertain ?

Ana Pusca : Le coaching est un accompagnement, une réponse possible aux besoins de changement dans sa vie professionnelle, de réalignement à ses valeurs et aux aspirations des personnes au cours de leur carrière. Avec chaque dirigeant, nous affinons l’objectif à atteindre, au cours d’une première séance, pour reformuler ensemble sa demande. Pour voir également si je suis la bonne personne, que nos personnalités s’accordent, il faut que le coach et le client soient congruents. Puis le coach agit comme un accompagnateur, il permet d’ouvrir de nouvelles voies en faisant l’effet miroir sur ce qu’il se joue pour son client…  Le coaching est bienveillant mais pas complaisant : souvent je challenge le mode de pensée du dirigeant. Personnellement, mon accompagnement permet aux dirigeants d’avoir un autre regard sur les situations, pour trouver des ressources et transformer les obstacles. Si on regarde de plus près un obstacle, parfois il devient très intéressant et même un tremplin vers autre chose. Le coach va inviter à moins segmenter les choses, à transférer des compétences d’un domaine  à un autre, à utiliser d’autres compétences. Il aide à mobiliser d’autres facettes, il agit comme un catalyseur. Ce qui m’intéresse dans le coaching de dirigeants, c’est accompagner, dans la complexité de leur position, les personnes qui ont le pouvoir de changer les choses, de redonner de la force, être un support pour un dirigeant qui est souvent seul. Le miroir que je renvoie consiste à voir ensemble quelle « carte du monde » le dirigeant s’est forgé au fil du temps jusqu’à son poste actuel. Je challenge pour agrandir cette carte, ouvrir de nouveaux horizons, vers plus de créativité, d’innovations Parfois, il est bien de laisser partir des croyances qui nous limitent ou les adoucir. Je mets en place tous les outils disponibles pour accélérer la réflexion, la prise de conscience et pour qu’ils trouvent leurs propres réponses. En général, après 5 à 6 séances, on peut atteindre l’objectif global.

 

Quelles sont les évolutions de l’accompagnement de dirigeants en France ?

Ana Pusca : Le coaching se développe et s’invite en entreprise avec l’ouverture de postes de coach Interne. Il fait de plus en plus partie de « Talent & Leadership Programs » et autres programmes de développement proposés par le département RH. Au départ réservé à une élite, son accès s’est démocratisé à tous les niveaux d’encadrement de l’entreprise. Avec la situation actuelle, l’activité de coach en reconversion professionnelle a explosé.

 

Quelles sont vos valeurs et engagements personnels dans ce métier?

Ana Pusca : Mes valeurs sont l’authenticité, l’ouverture d’esprit et des expériences de haut niveau qui généreront des résultats concrets et rapides. Ce qui m’intéresse c’est contribuer à élargir le champ de vision de mon client, pour qu’il puisse, entre autres, construire des croyances aidantes dans la réussite de ses projets. Dans leur posture, les dirigeants expérimentent parfois la solitude face à certaines décisions stratégiques ou situations complexes. Je souhaite m’adresser aux dirigeants qui ont du mal à demander de l’aide, qui veulent tout faire seul et se referment. C’est parfois dommage, car cela conduit à tout casser, il vaut mieux voir ce que l’on peut garder pour mieux reconstruire. Le coaching est une chance pour prendre du recul. Il est bon  d’être bienveillant avec soi, de s’accorder un moment de doute, de prendre le temps, de ne pas réagir avec toujours les mêmes automatismes. Le détachement permet de trouver la réponse juste face à une situation et de ne pas gâcher son potentiel et celui de l’entreprise. Mon rêve, c’est d’être un jour l’éminence grise d’un Président, d’une personne qui assure le pouvoir en bienveillance pour l’aider à matérialiser ses projets et être un leader inspirant.